Alors que NavalGroup est en difficulté après l'annulation du "contrat du siècle" australien, l'américain General Dynamics se porte bien. A sa tête depuis 2013, une ancienne de la CIA. Profitant du rebond du budget de la défense sous Donald Trump, elle mène son groupe vers les sommets.

Le patriotisme de Phebe Novakovic, la PDG de General Dynamics, n’a d’égal que sa discrétion. Quoi de plus normal pour une dirigeante qui travaille dans le secteur de la défense et dans un groupe dont la majorité du chiffre d’affaires dépend de l’État américain ? Fille d’un lieutenantcolonel de l’ US Air Force d’origine serbe, Phebe Novakovic passe la majeure partie de son enfance en Europe, notamment en Allemagne de l’Ouest durant la Guerre froide. Une expérience "qui donne vraiment le sentiment d’être américain et de voir les menaces potentielles pour l’Amérique", expliquait il y a deux ans, lors d’une conférence au Boston College, celle qui se dit "férocement patriote".

Femme de chiffres

Diplômée en 1979 du Smith College (Massachusetts), Phebe Novakovic veut servir son pays. Estimant sa personnalité non compatible avec une carrière militaire, elle rejoint en 1983 la CIA, grimpe les échelons au sein du Pentagone et parfait son CV avec un MBA de la Wharton School (université de Pennsylvanie). Elle sera notamment assistante spéciale du secrétaire et du secrétaire adjoint à la Défense sous la présidence de Bill Clinton. À ce titre, elle est responsable des processus pour toutes les grandes décisions budgétaires et politiques du ministère. Elle travaille également au bureau de la gestion et du budget où elle est directrice adjointe pour la sécurité nationale, poste où elle assiste le président américain dans la préparation du budget pour la défense et les agences de renseignement.

"Nos clients sont mieux servis si nous nous taisons et faisons bien notre travail"

Femme de chiffres, elle préfère s’en tenir aux faits et éviter les interviews. Elle confie ne pas voir l’intérêt de faire du "prosélytisme public" sur les produits et services proposés par General Dynamics, qui couvrent les univers de l’aérospatial, de la marine, des systèmes de combat et des technologies. "Nos clients sont mieux servis si nous nous taisons et faisons bien notre travail", estime-telle dans le Wall Street Journal

Self-made-woman

Avant de devenir, en 2013, PDG de General Dynamics, et d’être depuis considérée comme l’une des femmes les plus influentes de son pays, Phebe Novakovic a fait ses preuves au sein du groupe. Elle a été responsable de trois filliales – Bath Iron Works, Electric Boat et Nassco– avant de devenir directrice des opérations de la maison mère. La dirigeante se hisse parmi les rares profils féminins du secteur de la défense, tels que Marillyn Hewson, CEO de Lockheed Martin, Leanne Caret de Boeing ou, plus récemment, Kathy Warden, patronne du conglomérat Northrop Grumman.

Son parcours a été clé pour maintenir le cap ces dernières années, son entreprise ayant traversé de fortes turbulences liées aux coupes budgétaires dans le secteur de la défense. Sous la présidence de Barack Obama, l’enveloppe allouée aux opérations militaires a considérablement chuté jusqu’à atteindre un plus bas à 3,1 % du PIB pour la période 2017-2018, avant que Donald Trump ne décide d’inverser la tendance face aux menaces russes et chinoises. Afin de profiter de cette nouvelle courbe ascendante, Phebe Novakovic mène à bien en 2018 l’acquisition de CSRA, un prestataire en informatique du ministère de la Défense et des renseignements, pour 9,6 milliards de dollars. Avec plus de 19 millions de dollars de compensation annuelle et un groupe dans le vert, la sexagénaire, fière de son parcours d’enfant d’immigré, est un parfait exemple de self-made-woman. 

Olivia Vignaud

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