La présidente du groupe Socialistes et apparentés à l’Assemblée nationale estime que la politique du gouvernement appauvrit les plus modestes et met en péril la cohésion sociale. Pour remédier à la situation, elle formule des propositions concrètes.

Le 18 octobre, votre groupe a présenté un budget alternatif. Une attention particulière est portée aux retraités…

Aider les retraités nous semble une priorité. Jamais un gouvernement n’avait autant ponctionné cette catégorie de la population. La stagnation des pensions corrélée à la hausse de la CSG a fait perdre un demi- mois de pouvoir d’achat à 8 millions de personnes. Et ce n’est pas la suppression de la taxe d’habitation qui change les choses.

Le plus préoccupant, c’est que l’appauvrissement des retraités touche toute l’économie réelle. Le charcutier installé en dessous de ma permanence m’expliquait que les personnes âgées continuent à venir mais consomment moins. Et il est loin d’être le seul commerçant dans ce cas. La politique d’Emmanuel Macron a donc des conséquences sur l’économie française. Matraquer les retraités accélère la désertification de bien des centres-villes.

"Nous proposons d'exonérer de la CSG les personnes qui gagnent moins de 3 000 euros par mois".

Pour inverser les choses, il faut remettre en place l'indexation des retraites. Concernant la hausse de la CSG, nous avions proposé l'an dernier que cette hausse ne s'applique qu'à des niveaux de retraite supérieur au prix d'une place dans un EHPAD médicalisé en région parisienne, soit au delà de 3 000 euros par mois. Nous proposons également que les retraites agricoles soient revalorisées à 85% du Smic pour les exploitants ayant eu une carrière complète. Enfin, concernant les Ephad, nous préconisons également un plan de construction de 10 000 places supplémentaires.

Le projet de réforme des retraites risque-t-il d’aggraver la situation ?

C’est plus que probable. C’est un projet qui me semble flou. J’ai rencontré Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme des retraites pendant l'été pour des clarifications qu’il n’a pas été en mesure de me donner. Globalement, l’incertitude est là. Les Français ne savent pas de quoi sera composée leur retraite. J’ai la conviction que la mise en place d’un régime de retraite par points conduira de fait à un système de capitalisation à l’anglo-saxonne, sans passage par les marchés financiers. Ce qui me semble aller à l’encontre de notre modèle social.

Pensez-vous que l’exécutif tiendra compte de vos propositions ?

Le gouvernement est je pense très embêté. Il a affirmé qu’il ne comptait pas reculer. Les élus LREM se rendent toutefois bien compte que les choses sont allées trop loin et que les ponctions sur les retraités sont d'une ampleur inégalée. Il n’est jamais trop tard pour réajuster l’action.

Globalement, vous estimez que les politiques menées cassent le tissu social…

Oui. C’est un point qui nous préoccupe. Prenons le cas des emplois aidés. Ils ont été réduits drastiquement et brutalement. Désormais, les associations, les clubs sportifs, les petites communes ont plus de difficultés à recruter. On risque donc de se retrouver avec une partie du territoire sinistrée : sans commerces, sans associations, sans clubs de sports…

Concernant le sport, nous allons organiser les Jeux olympiques en 2024. Mais nous empêchons l’émergence de nos futurs athlètes. Notre projet de budget propose donc d’investir 200 millions d’euros dans les clubs sportifs. En somme, il s’agit d’annuler la coupe budgétaire dans le ministère des Sports.

Quels sont les autres principaux chantiers du groupe Socialistes et apparentés pour les mois à venir ?

Nous œuvrons au quotidien pour installer l’idée que le centre-gauche est en capacité d’apporter des idées nouvelles et concrètes dans le débat public. Actuellement nous travaillons sur la question du revenu de base. En janvier 2019, nous allons déposer une proposition de loi pour l’expérimenter. Dix-neuf présidents de conseils généraux sont d’accord pour que leur territoire serve de laboratoire. Nous avons bon espoir de rallier la majorité parlementaire à notre proposition.

En janvier 2019, nous déposerons une proposition de loi pour expérimenter le revenu de base.

Nous sommes présents et force de proposition sur tous les textes. Le groupe veut aussi montrer aux Français ce qu’il fait au quotidien. Nous avons lancé une lettre d’information hebdomadaire qui permet à tous de suivre notre action. Les socialistes ont des propositions et les moyens de peser dans le débat parlementaire. Nous restons la troisième force politique au Parlement en nombre d’élus.

Les départs du PS de Marie-Noëlle Lienemann et d’Emmanuel Maurel et l’entrée au gouvernement de Didier Guillaume, l’ancien président du groupe socialiste au Sénat portent-ils atteinte au PS ?

Absolument pas. Pour Marie-Noëlle Lienemann et Emmanuel Maurel, il s’agit d’une stratégie individuelle.  Ils sont partis seuls, sans élus et sans militants. Il existe donc toujours une aile gauche au PS. Concernant Didier Guillaume, il n’était plus encarté. Ce n’est pas cela qui va nous empêcher de travailler, de proposer. Les Français ne sont pas concernés par ces anecdotes. Ils attendent des propositions pour améliorer leurs conditions de vie. Ce que nous faisons.

Lucas Jakubowicz (lucas_jaku)

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