Députée puis sénatrice LR des Bouches-du-Rhône, Valérie Boyer revient sur les principaux enseignements des régionales. Selon elle, la droite traditionnelle, trop vite enterrée, a de bonnes raisons de voir le futur avec optimisme.

Décideurs. En région Paca, le RN Thierry Mariani et le président sortant Renaud Muselier étaient annoncés au coude-à-coude. Finalement, ce dernier a remporté nettement le second tour. Que s’est-il passé ?

Valérie Boyer. Cette victoire est tout à fait normale, notre région s’est comportée comme le reste du pays. Les électeurs ont montré avec éclat qu’ils ne voulaient pas d’un duel Macron-Le Pen annoncé comme acquis pour la prochaine présidentielle. Ils sont les deux faces d’une même pièce, chacun étant l’assurance-vie de l’autre. Cela a donné un avantage aux listes LR mais aussi PS. C’est pourquoi je persiste à penser que l’alliance de la droite avec LREM dans la région Paca était une erreur. Renaud Muselier l’aurait emporté face au RN comme dans les autres régions, sans nouer des accords contre nature. Les électeurs RN sont certes "anti-Macron", mais ils ont compris qu’en votant extrême droite, cela ne changerait rien.

L’abstention n’a jamais été aussi élevée pour une élection régionale. Avez-vous une explication ?

Il n’y a pas de raison unique, c’est la combinaison de plusieurs facteurs. D’abord, il y a eu des dysfonctionnements inédits dans l’organisation du scrutin, notamment avec des professions de foi qui ne sont pas arrivées à destination. Cela a pu donner aux citoyens l’impression que l’on se désintéressait d’eux. Je pense aussi que le discours ambiant qui consiste à dire qu’il n’y a plus de droite ni de gauche a contribué à désintéresser les Français. Certains commencent à penser que les élections ne servent à rien. Avec le grand débat ou les tirages au sort, le président de la République a une part de responsabilité puisqu’il a inventé des moyens de consultation qui court-circuitent les élections. Ce qui désacralise le rôle de l’élection.

"Le discours ambiant qui consiste à dire qu'il n'y a plus de droite ni de gauche a contribué à désintéresser les Français"

Pour LR, ce scrutin est plutôt une bonne nouvelle…

Oui, comme les dernières municipales. Tous nos présidents sortants ont été réélus avec des scores plus importants qu’en 2015. Mis à part l’Occitanie, notre parti se place en seconde position partout et distance l’extrême droite. Ces résultats ont été obtenus dans un contexte où nous avons été clairs sur nos convictions. Ce qui nous a permis de convaincre (et non de chasser ou faire un hold-up) des électeurs frontistes ou macronistes.

Les élections régionales auront-elles des répercussions sur 2022 ?

C’est bien possible. Outre le refus d’un duel Macron-Le Pen, des messages clairs ont été envoyés. La social-démocratie n’est pas morte et les alliances avec l’extrême gauche n’ont rien apporté. Le rassemblement de toutes les forces de gauche ne marche pas. Le cas d’école est l’Ile-de-France où Manuel Valls et Jean-Paul Huchon, ancien président PS de la région ont appelé à voter Valérie Pécresse. Comme lors des municipales, LREM a échoué à s’ancrer fortement dans les territoires et montre qu’il s’agit d’un parti centré sur une seule personne. Il est révélateur qu’aucun ministre n’ait réussi à s’imposer… Le principal enseignement à tirer de ce scrutin est qu’il ne sert à rien d’écrire le scénario à l’avance. Rien n’est joué pour 2022. L'abstention nous oblige à faire preuve de modestie mais ces résultats confirment nos victoires municipales. Nous restons le parti des territoires. Les Républicains  ont un véritable défi pour éviter un nouvel échec, se trouver un leader. Nous le devons aux Français afin d'être de nouveau crédible dans leur cœur et leur tête.

Propos recueillis par Lucas Jakubowicz

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