Après avoir renforcé le pôle transactions de son bureau parisien en 2019, Aberdeen Standard Investments a toujours de l’appétit pour l'immobilier tricolore malgré la crise actuelle. Vincent Moulard, head of transactions et portfolio management France, dévoile sa lecture du marché et les grandes lignes de la stratégie d’investissement du groupe.

Décideurs. Quelles sont vos convictions concernant l'évolution des marchés immobiliers français compte tenu de la crise sanitaire ?

Vincent Moulard. Depuis le début de la crise sanitaire, notre priorité est de gérer la relation avec nos clients pour les accompagner dans leur quotidien. Nous avons procédé à des étalements de loyers, des franchises… Nous avons beaucoup travaillé sur les actifs de commerce ces dernières semaines car nous détenons des retail parks. Nous espérions un rebond de l’activité en début d’année mais le Covid-19 va bien évidemment prolonger les difficultés du secteur. Nous aurons plus de visibilité à la rentrée sur le panel d’enseignes qui résisteront aux difficultés économiques engendrées par cette crise et le confinement. Dans ces conditions, nous ne sommes plus investisseurs dans le commerce pour le moment.

A contrario, le résidentiel a montré sa résilience. Nous avons d’ailleurs déposé plusieurs lettres d’offres ces dernières semaines. La logistique a également tiré son épingle du jeu pendant le confinement et est très prisée des investisseurs comme Aberdeen Standard Investments. En parallèle, tout le monde s’interroge sur l’évolution des bureaux. Je ne pense pas que le télétravail va se généraliser mais la demande locative devrait être impactée. Si nous ne savons pas encore comment vont évoluer les valeurs, nous ne nous attendons pas à une baisse significative et nous resterons actifs sur cette typologie de produits.

Nous n’excluons pas de regarder des opérations hôtelières en fonction de la qualité des localisations, de la solidité des exploitants et de la sécurité offerte par le bail. Quant au secteur de la santé, nous n’investissons pas dans les cliniques et les maisons de retraite car nous avons décidé de ne pas prendre position sur des actifs nécessitant des autorisations administratives d’exploitation. Les résidences services seniors rentrent pour leur part dans notre scope.

Dans ces conditions, comment évolue votre thèse d'investissement en France ?

Les taux de rendement observés pour des actifs de bureaux à Paris et en première couronne avant la crise sanitaire étaient très bas si bien que nous avons regardé d’autres villes comme Lyon, ville où nous avons signé en VEFA l’été dernier le futur siège européen de Bandai Namco Entertainment, et Marseille où nous avons été sollicités à plusieurs reprises ces derniers mois. En logistique, nos fonds se concentrent sur la dorsale. Et nous ciblons les zones tendues en résidentiel.

La crise sanitaire nous amène à être encore plus vigilant sur la qualité de la localisation et le risque locatif. Nous privilégions donc des actifs core dans nos recherches. La prudence est également de mise au niveau de l’effet de levier de la dette. Le ratio LTV de nos fonds oscille généralement entre 25 et 35 %. La taille des dossiers a pour sa part été revue à la baisse. Nous pouvions prendre position sur des sujets de 120 M€ il y a quelques mois alors que nous irons rarement au-delà de 80 M€ aujourd’hui. Le plancher reste lui inchangé, autour de 20 M€ pour les bureaux et de 15 M€ en résidentiel. Enfin, il était difficile pour nous de faire des propositions inférieures à 4 % de rendement immédiat avant le déclenchement de la crise. Nous ne nous attendons pas à ce que les taux augmentent fortement dans les mois à venir car les capitaux continuent à affluer sur l’immobilier.

Qu'en est-il des ambitions d'Aberdeen Standard Investments en France ?

Nous gérons près de 700 M€ d’actifs en France, ce qui représente plus de 5 % de nos encours européens (hors Royaume-Uni). Nous avons conscience que nous devons davantage appuyer notre empreinte française au sein du groupe et c’est pour cela que le pôle transactions de notre bureau parisien s’est vu renforcé par le recrutement de 3 personnes, dont le mien, l’an dernier. Cela illustre bien nos ambitions de croissance et démontre que l’Hexagone reste un de nos principaux pays européens cibles. Mais nous n’avons pas d’objectifs chiffrés. Mes collègues européens et moi-même présentons chaque semaine aux fund managers du groupe les opportunités d’investissements que nous avons sourcées. Ce sont eux qui décident d’allouer du temps et des capitaux à un deal plutôt qu’un autre. De nouveaux fonds dédiés à l’immobilier sont en cours de structurations et nous sommes confiants dans notre capacité à saisir les opportunités qui naîtront de la crise.

Propos recueillis par François Perrigault (@fperrigault)

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