La présidente de la Commission européenne, aura finalement su organiser la riposte face à la pandémie, tout en veillant à la poursuite du projet communautaire malgré un continent qui ferme actuellement ses frontières intérieures.

Comme la grande majorité des dirigeants politiques, la présidente de la Commission européenne a mis du temps à réagir à l’épidémie de Coronavirus. Mais, et c’est tout à son honneur, elle a implicitement reconnu que l’Europe avait manqué de réactivité en admettant que les dirigeants politiques avaient "sous-estimé" l’ampleur du virus et que le Vieux-Continent avait été "pris de court" par la pandémie.

Difficile de reprocher à l’ancienne ministre d’Angela Merkel de ne pas avoir pleinement compris la nature d’un virus qui a déconcerté de nombreux experts médicaux. Pour autant, l’Europe ne doit pas échapper à ses responsabilités. À commencer par celle de l’effort financier à consentir.

Le retour des frontières

Ursula von der Leyen s’est vue confrontée à un ensemble de défis inédits auxquels peu de dirigeants mondiaux avaient dû faire face avant elle, notamment parce que la réponse apportée par les États membres a, par définition, constitué une atteinte aux fondements mêmes de l’Union européenne, l’une des politiques clés de l’UE étant celle de l’Espace Schengen, un espace couvrant 26 pays européens ayant supprimé les contrôles aux frontières. Or, avec le Coronavirus, ceux-ci ont été restaurés de manière unilatérale considérablement affaibli la position d’Ursula von der Leyen et, par extension, celle de la Commission européenne.

Soulignons toutefois que sur la question du rapatriement de ressortissants européens, la coopération a fonctionné. La Commission européenne signalait fin mars le rapatriement de dizaines de milliers de citoyens européens de l’étranger, la plupart à bord de vols intra-européens.

Santé communautaire

Sur le volet financier, la Commission européenne est très vite passée à l’offensive. Dès le 6 mars, 47,5 millions ont été débloqué pour mettre au point de vaccins, de nouveaux traitements, et des tests de dépistage. Certes, Ursula von der Leyen ne se chargera pas en personne de cette annonce, préférant en déléguer la responsabilité à Mariya Gabriel, commissaire en charge de l’innovation, de la recherche, de la culture, de l’éducation et de la jeunesse avec le risque que cela soit perçu comme une façon de minimiser la gravité de l’épidémie. Mais la présidente de la Commission se trouvera au premier plan lors de l’annonce d’un soutien financier de 80 millions d’euros au laboratoire allemand CureVac. Le 26 mars, elle annoncera également que 37 milliards d’euros seraient consacrés aux efforts visant à atténuer l’impact de la crise.

Le 12 mars, jours plus tard, Ursula von der Leyen annonce également la création de la réserve de matériel médical rescEU (comprenant des équipements de soins intensifs, des équipements de protection individuelle et du petit matériel de laboratoire) à destination des pays de l’Union européenne. Réserve à laquelle, annonce-t-elle, elle prévoit d’abord d’allouer un budget de 50 millions d’euros avant de le porter à 80 millions d’euros le 27 mars. L’initiative est décisive et permet de mettre en avant une Europe Unie.

Aides financières concrètes

Le 26 mars, elle annoncera égalmeent que 37 milliards d’euros seraient consacrés aux efforts visant à atténuer l’impact de la crise. La Commission va encore plus loin le 1er avril en annonçant le déploiement du dispositif SURE qui vise à financer une partie du salaire des salariés européens travaillant à temps partiel. Par son montant (100 milliards d’euros) et ses effet concrets, l’initiative constitue une véritable victoire en matière de relations publiques.

Ursula von der Leyen parvient à exploiter une initiative qui avait été couronnée de succès en Allemagne après la crise financière de 2008, et à l’étendre à toute l’Europe tout en donnant un vrai coup de pouce à sa présidente qui, lors de son annonce, apparaîtra sous son meilleur jour médiatique, parlant avec calme et assurance d’un plan destiné à rassurer les citoyens européens confrontés à la menace du chômage.

La séquence en atteste : la communication est sans aucun doute l’un des points forts d’Ursula von der Leyen par ailleurs présente et rassurante sur les réseaux sociaux, multipliant les appels à la solidarité et exaltant les avantages d’une Europe capable d’agir de manière coordonnée lorsque, dans les premiers temps de l’épidémie, celle-ci apparaît désunie face à la crise.

La présidente de la Commission a aussi été, le 10 mars à l’initiative d’un plan permettant aux compagnies aériennes de conserver leurs "créneaux aéroportuaires", laissant à penser qu’elle accorde plus d’importance à la santé de l’industrie qu’à celle des citoyens européens.

 " Humaniser" la Commission

Dans les premiers temps de l’épidémie, la Commission a concentré ses efforts sur la recherche en matière de protection et de vaccins ainsi que sur la protection des compagnies aériennes, au détriment de l’aspect sanitaire et humain de la crise. Toutefois, il semble qu’au fur et à mesure des semaines, Ursula von der Leyen se soit employée à "humaniser" sa réponse. Elle évoquera ainsi la dette de gratitude de l’Europe envers le personnel soignant et les employés de supermarchés.

Cela dit, l’impact du coronavirus sur l’Europe a été considérable, et de nombreux dirigeants mondiaux seront hantés par des réflexions sur l’impact qu’aurait pu avoir une réponse plus tranchée à un stade plus précoce de la crise. Si les mesures pratiques qu’Ursula von der Leyen et la Commission auraient pu prendre pour sauver davantage de vies peuvent apparaître limitées, il est clair que davantage aurait pu être fait pour tenter d’orienter les réponses des États membres et, ce faisant, de limiter l’impact de la pandémie.

Ben Cook

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