Procédures d’alerte, harmonisation des emballages et de la technologie : le système de santé s’est équipé de ressources de pointe pour assurer la traçabilité de sa production et de sa distribution.

Les scandales n’en sont pas toujours
La santé jouit d’un statut tout à fait particulier dans l’opinion publique. L’Homme ne s’est jamais aussi bien porté, l’accès au savoir médical est quasi illimité et, du moins en Occident, chaque mal a sa pilule. Et pourtant les échecs sont impardonnables. La moindre aspérité dans la commercialisation des produits de santé provoque la panique comme dans aucune autre industrie, pas même l’alimentaire. L’ « affaire » du furosémide illustre bien cette sensibilité, mettant en lumière l’enjeu de la traçabilité des médicaments et des dispositifs médicaux.

L’erreur d’une patiente a fait tourner à plein le système de pharmacovigilance, poussant Teva à remettre en cause la sécurité de sa propre chaîne de production. Le laboratoire a fait remonter l’alerte à l’ANSM, qui a demandé le rappel des lots suspects. Selon Dominique Maraninchi, directeur général de l’agence, le système est « très puissant », puisqu’il bloque immédiatement sur l’ordinateur des pharmaciens toute vente des produits en question. La remontée de l’information et la réactivité des autorités de santé résultent du système de pharmacovigilance. Mis en place à grande échelle pour surveiller, enregistrer et évaluer les effets secondaires des médicaments sur le marché, il peut désormais contribuer à révéler les failles sur l’ensemble de la chaîne de production.

Une production codifiée
L’étiquetage des médicaments est essentiel au dispositif de traçabilité, il s’adapte lui aussi aux nouvelles exigences de l’industrie de la santé. Entre 2005 et aujourd’hui, plusieurs réformes ont été engagées alors que la réflexion est toujours en cours. Le code-barres CIP à sept chiffres attribué par l’ANSM au moment de la mise sur le marché a été remplacé par un code CIP à treize chiffres, lui-même inséré dans un marqueur DataMatrix. Présent sur toutes les boîtes, il contient plus d’informations qu’un code à barres linéaire, notamment le code d’identification du produit, le numéro de lot et la date de péremption. Lors de chaque transaction, ces informations sont conservées pour permettre le suivi des médicaments tout au long de la chaîne.


Pour les produits de santé répondant à une urgence médicale ou au traitement de pathologies coûteuses, l’industrie s’appuie sur des technologies plus poussées, telles que le RFID (ou radio-identification). Elles restent encore marginales dans le cadre de stratégies de lutte contre la contrefaçon ou le vol, car leur intégration dans la chaîne de production demande le déploiement d’outils et de process plus complexes.

En attendant l’Europe
Sans surprise, l’heure est à l’harmonisation sur le plan européen et les administrations se préparent à faire évoluer le système de traçabilité des médicaments d’ici à 2017. Pour une analyse encore plus fine de leur distribution, la sérialisation devra être adoptée par les États-Membres : ils passeront à une identification à la boîte et non plus au lot, comme c’est le cas aujourd’hui en France.
Outre la simplification de la production et l’harmonisation du marché, un enjeu principal de la réforme est la protection des laboratoires et des citoyens européens contre la contrefaçon. Il reste à savoir comment et par qui l’information sera récoltée puis traitée. L’idée germe d’une base de données unique et consultable par tous. La Direction européenne de la qualité du médicament promeut un système centralisé de contrôle et de traitement des données. Nommé eTACT, il est encore au stade de projet mais est conçu pour être applicable à tous les médicaments.

La contrefaçon se porte bien
Une meilleure lisibilité du lot et de la date de péremption, un système de vérification centralisé et accessible depuis le grossiste jusqu’au consommateur final sont autant d’outils de lutte contre la contrefaçon. Si elle cause moins de ravages que dans les pays émergents, cette dernière demeure un fléau difficile à éradiquer. En 2011, les médicaments « trustaient » le podium des saisies de produits contrefaits par les douanes européennes (près d’un quart), et génèrent encore des profits considérables pour un risque pénal bien moindre que les stupéfiants.

Voir aussi, Entretien avec Gaëlle Hulin, chef de marché santé, Chronopost International


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