Pour la présidente de l'AFJE,  la mobilisation du monde de l'entreprise à une pétition de soutien sur la confidentialité des avis des juristes est un succès.
Décideurs. Vous cherchez le soutien des dirigeants d’entreprise. Pourquoi ?
Stéphanie Fougou.
Nous ne le cherchons pas, nous l’avons déjà ! Les dirigeants sont déjà plus de cent trente à avoir signé notre pétition. La mobilisation a été rapide et unanime, tant du côté des grands groupes que des PME, des syndicats et des associations.
La pétition répond à l’invitation publique faite lors des débats par la députée Cécile Untermaier qui s’inquiétait de connaître le point du vue des entreprises sur l’opportunité de confier aux juristes d’entreprise la confidentialité des avis. Avec tant de signatures, la réponse est claire.
La pétition que nous avons lancée avec le Cercle Montesquieu confirme s’il en était besoin l’importance du sujet pour les entreprises. Nous avons déjà été entendus par Bercy et poursuivons nos actions auprès des pouvoirs publics.

Décideurs. Le Medef s’est montré réservé sur le sujet de l’avocat en entreprise. Avez-vous également son soutien ?
S. F.
Sa directrice des affaires juridiques Joëlle Simon, a indiqué que le Medef était d’accord sur le principe de la création de l’avocat en entreprise mais pas à n’importe quelle condition. Sur ce point, nous sommes tout à fait d’accord : nous avons par exemple toujours rappelé que ce statut devait être valable pour tous les juristes et non quelques-uns seulement. Par ailleurs, le Medef n’est pas le seul syndicat d’entreprises qui soutient l’appel à la confidentialité : l’Afep (Association française des entreprise privées) s’est également fortement mobilisée.

Décideurs. Vous vous focalisez donc à présent sur la confidentialité des avis. Avez-vous définitivement abandonné l’espoir d’obtenir le statut d’avocat en entreprise ?
S. F.
L’avocat en entreprise a été refusé par l’ensemble des avocats, à travers la voix du Conseil national des barreaux. Le projet a été retiré par la commission spéciale, puis les amendements présentés en audience publique ont été rejetés devant l’Assemblée nationale. Les avocats nous ont fait comprendre qu’ils n’étaient pas prêts à ce que nous fassions partie de cette profession, ils ont même argué que nous n’avions pas compris que l’intention du projet de loi déposé par Emmanuel Macron ne consistait pas à proposer un statut d’avocat en entreprise aux juristes mais celui d’un avocat détaché en entreprise. Cela laisse perplexe sur les conditions de l’avocat en entreprise si celui-ci devait revenir sur le devant des débats. Si nous voulons être entendus, il faut savoir proposer autre chose et trouver d’autres solutions pour répondre à l’urgence. La confidentialité des avis ne concerne pas les avocats.

Décideurs. Le CNB était entouré d’une agence de lobbying pour faire retirer le projet d’avocat en entreprise. Pourquoi les directeurs juridiques ne s’arment-ils pas pour peser encore plus dans le débat public ?
S. F.
L’AFJE et le Cercle Montesquieu déploient leurs forces avec leurs propres moyens. Nous n’avons pas le budget du CNB, même si nous avons ponctuellement et conjointement fait appel à des professionnels de la communication pour appuyer nos actions. Il faut dire aussi que la profession d’avocat est largement répandue, voire exercée, par nos parlementaires et donc souvent mieux connue et soutenue.

Décideurs. La plupart des signataires sont des dirigeants de grands groupes. N’avez-vous pas le sentiment que les juristes d’entreprise ont également besoin de relais en province et auprès des PME ?
S. F.
Nombreuses sont les PME qui ont signé la pétition et la mobilisation n’est pas uniquement parisienne, notamment grâce au travail des délégués régionaux de l’AFJE. L’AFJE est très présente en province avec quatorze délégations régionales. L’Association nationale des juristes de banque (ANJB) relaie aussi les positions au travers de ses juristes en région, mais malgré cela rien n’y fait.

Propos recueillis par Pascale D’Amore

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