En réalisant une introduction en Bourse avec une cotation directe en avril dernier, le géant suédois du streaming musical a affirmé son indépendance et sa confiance dans son modèle économique. Son entrée sur le marché devrait également lui permettre de mieux résister aux assauts à venir de la concurrence.

La musique sauvera-t-elle l’Europe ? Réseaux sociaux, cinéma, transport, les plus grandes “licornes” de l’ère numérique sont souvent nées aux Etats-Unis. Un secteur fait encore de la résistance, la musique. Avec l’introduction au Nasdaq du leader mondial de la musique à la demande au printemps dernier, l’Europe a pour une fois damé le pion aux licornes américaines. L’opération a valorisé à près de 17,5 milliards d’euros la start-up de Daniel Ek. Le couronnement d’une pépite née il y a moins de 10 ans.

Les banques court-circuitées

Depuis ses débuts, Spotify connaît une croissance spectaculaire. Elle a quasiment doublé ses abonnements payants chaque année, pour arriver à 81 millions mi-2018. Souvent comparé à Netflix, son alter-ego dans le cinéma, Spotify peut en revanche se targuer de creuser l’écart avec ses concurrents. Alors que Netflix bataille avec les plateformes Amazon ou HBO, et peut être un jour avec le français Salto, Spotify compte aujourd’hui presque le double d’abonnés sur son premier concurrent, Apple Music. Grâce à cette introduction, Spotify a pu, en prime, se libérer des engagements contractés lors de sa précédente levée de fonds.

Toutefois, c’est moins l’entrée en Bourse de la start-up au Nasdaq que la méthode “disruptive” d’introduction utilisée qui a marqué les esprits. Epaulé par son directeur financier, Barry McCarthy, ancien de chez Netflix, Daniel Ek a choisi de réaliser une introduction “directe”, profitant de ce que Spotify n’avait pas besoin de lever de fonds. L’équipe s’est ainsi épargnée la tournée des banques pour pré-vendre ses actions, estimant que la marque Spotify était assez puissante pour attirer à elle seule les investisseurs. À la clef, de sérieuses économies pour le spécialiste du streaming.. Il lui en aura coûté 50 millions de dollars contre plus de 100 millions dans le cas d’une cotation classique.

Une absence de rentabilité structurelle

L’opération n’était pas sans risque. Les analystes ont promis une forte volatilité du cours en bourse, alors qu’aucun lock-up n’était prévu. Pourtant le titre a peu évolué dans les premiers échanges, et s’est même avéré « ennuyeux » à suivre selon le site américain Recode. Le marché ne semble pas tenir rigueur à Spotify de la progression de ses pertes. Elles sont passées de 539 millions d’euros en 2016, à 1,2 milliard en 2017. L’optimisme des investisseurs est porté par la hausse du nombre d’abonnements payants, le maître-étalon dans ce secteur. Spotify vise pour cette année 96 millions d'utilisateurs payants, contre 71 millions fin 2017. Reste que le suédois devra avoir les reins solides pour affronter la concurrence qui s’organise. Apple Music n’a manifestement pas dit son dernier mot, et Google s’est récemment lancé sur le marché du streaming musical avec Youtube Music. Mais ce nouveau concurrent, s’il arrive un peu tard sur ce marché disputé, a les poches pleines.

Cet article fait partie du dossier "Deal de l'année' à découvrir prochainement dans la version papier de Décideurs Magazine.

Florent Detroy (florentdetroy)

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