Si les candidats finalistes sont les mêmes qu’il y a cinq ans, les reports de voix semblent avoir bougé. Décryptage d’une nouvelle tectonique des plaques.

Séduire le plus largement possible et élargir son socle. Tel est le défi de Marine Le Pen et Emmanuel Macron dans les jours qui viennent. Sur quels électeurs peuvent-ils s’appuyer ? Où se situent les meilleurs gisements ? Une étude Opinionway-Kia Partners-Les Echos permet d’y voir un peu plus clair.

Les électeurs de LFI ont bien changé en cinq ans

En cette période de second tour, les 7,7 millions d’électeurs de Jean-Luc Mélenchon sont particulièrement choyés par les deux candidats qualifiés pour le second tour. Leur nombre et leur indécision pourraient avoir un impact certain dans les urnes. C’est pourquoi, dans les minutes suivant la proclamation des résultats du premier tour, la candidate RN leur a adressé des œillades sans fioritures en dénonçant "le pouvoir de l’argent" et en assurant qu’elle serait la présidente de tous les Français, qu’ils soient "de droite, de gauche et d’ailleurs, de toutes les origines". Le président de la République, favori à sa réélection, a pour sa part promis qu’il s’inspirera du programme écologique de Jean-Luc Mélenchon en cas de second mandat.

Pour le moment, cette masse électorale est indécise. Si Jean-Luc Mélenchon a tonné à plusieurs reprises qu’il ne fallait pas donner "une seule voix à Marine Le Pen", les électeurs sont plus partagés. Pour le moment, 41% d’entre eux joueront le jeu du front républicain. Mais 35% prévoient d’aller à la pêche le jour J. Ils seraient même un quart à opter pour Marine Le Pen. Si les prédictions sont bonnes, il s’agit d’une rupture par rapport au second tour de 2017 où 52% des électeurs insoumis ont voté Emmanuel Macron, 7% seulement optant pour la candidate d’extrême droite.

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Les électeurs LR pèsent-ils encore ?

Les électeurs LR, de leur côté, semblent se droitiser légèrement. Il y a cinq ans, 48% des personnes ayant glissé un bulletin Fillon dans l’urne au premier tour se sont tournées vers Emmanuel Macron. Un score en baisse de 4 points en 2022. En revanche, Marine Le Pen engrangerait 8 points de plus, passant de 20% à 28%. Notons que le candidat de la majorité axe plutôt sa campagne de second tour à gauche. Logique, l’électorat de la "droite traditionnelle" est déjà siphonné et pèse désormais moins de 5%. Ce qui explique également pourquoi la candidate RN ne s’adresse pas prioritairement à cette cible.

Le camp Zemmour a fait son choix

Durant la campagne d’entre-deux-tours, Marine Le Pen tente de continuer sa campagne de dédiabolisation. Pourquoi faire autrement ? Après tout, l’électorat Reconquête ! lui semble déjà acquis puisque 88% des partisans d’Éric Zemmour sont certains de voter pour elle, le polémiste lui-même ayant annoncé publiquement ce choix. Dans son discours d’entre-deux-tours, la députée du Pas-de-Calais a toutefois envoyé quelques signaux en direction de son aile droite, affirmant vouloir "remettre la France en ordre" et évoquant un second tour qualifié de "choix de société et même de civilisation" pour "sauvegarder la légitime prépondérance de la culture et de la langue française". Du Zemmour dans le texte !

Les Verts au rendez-vous du front républicain

Du côté des Verts, la situation est claire : non seulement tous les cadres du parti ont appelé à voter contre Marine Le Pen (à l’instar de LFI), mais ils ont également assuré s’engager en faveur d’Emmanuel Macron. Un choix suivi par les électeurs Jadot qui, à gauche, se distinguent par un maintien du front républicain : 67% des voix pour Emmanuel Macron, 15% de vote blanc ou d’abstention, le reste allant au RN.

Lucas Jakubowicz

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