À la tête de Baidu, le Google chinois, Robin Li suit la même stratégie que son grand frère américain : véhicule autonome et IA. En parallèle, il se montre très proche du régime en place à Pékin.

Que ce soit dans la tech américaine ou chinoise, la saga de l’entrepreneur audacieux et diplômé parti de rien, sauf d’une idée de génie, est fréquente. Robin Li, fondateur et dirigeant de Baidu, le Google chinois, fait partie du club. C’est en 1998 qu’il fonde sa société dans une chambre d’hôtel de Pékin avec son associé Eric Xu. 

Paysan chinois "américanisé"

Le parcours du milliardaire est une fusion intéressante entre la Chine profonde et le meilleur des campus du pays de l’oncle Sam. Né dans une famille de paysans de la région rurale du Shanxi en 1968, il est diplômé d’une licence d’informatique à Pékin. L’excellence de ses résultats lui permet de décrocher une bourse pour les États-Unis et l’université de New York à Buffalo où il termine son cursus universitaire. C’est durant cette période de sa vie qu’il rencontre une étudiante chinoise qui deviendra la mère de ses quatre enfants.

Devenu spécialiste des algorithmes, il commence sa carrière professionnelle aux États-Unis dans la société Dow Jones & Company. Sur son temps libre, il travaille sur son propre projet : un moteur de recherche B2B qui se finance d’une manière inédite pour l’époque: il est possible de promouvoir un produit sur la page des résultats contre espèces sonnantes et trébuchantes. Concrètement, vous cherchez à acquérir une voiture, Baidu vous propose de cliquer sur un site qui vend une assurance et qui rémunère la société de Robin Li. Ce seront les premiers pas de Baidu. Le groupe s’étoffera peu à peu jusqu’à détenir 80 % du marché des moteurs de recherche en Chine en 2020.

Diversification et internationalisation

Mais l’ambition de Robin Li ne s’arrête pas à une situation de quasi-monopole sur son cœur de cible. La croissance future de son groupe passe par deux leviers : une diversification et une présence à l’international. Baidu ambitionne d’occuper une place de leader sur le marché de l’IA. Pour cela, en 2017, il frappe un grand coup en débauchant Qi Lu, spécialiste mondial du sujet et vice-président de Microsoft. Le groupe se mobilise également sur le véhicule nouvelle génération.

Baidu produit Apolong, un bus autonome de 14 places

Loin des effets d’annonces, Baidu fait dans le concret puisque, associé à une quarantaine d’entreprises comme Valeo, il a lancé fin 2017 la production en série de l’Apolong, un bus autonome.

Prince rouge

Si Robin Li est un entrepreneur de talent qui n’a rien à envier aux géants de la Silicon Valley, il est également avisé sur le plan politique. Pour s’assurer une place de choix en Chine, il a très vite compris qu’il fallait s’attirer les bonnes grâces du parti unique qui régente le pays d’une main de fer depuis 1949. Pour cela, le milliardaire suit les directives et anticipe les attentes à l’instar d’autres "princes rouges" du pays comme Ma Huateng, à la tête de Tencent.

Ainsi, en 2006, il lance Baidu Baike, le Wikipédia chinois "régime compatible". Deux ans plus tard, il efface de son propre chef les données de Carrefour sur Baidu. Raison invoquée: l’attitude de la France qui a osé émettre des réserves sur la situation des droits de l’homme à quelques jours des jeux olympiques de Pékin. En 2018, Robin Li est également à l’initiative d’une fédération de 300 entrepreneurs de la tech qui s’engagent à "soutenir les valeurs centrales du communisme". Supporter le communisme pour faire grandir son entreprise et sa fortune. Voilà qui doit faire tiquer Lénine et Karl Marx dans leur tombe !

Lucas Jakubowicz

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