Les 10 et 11 mars, les 27 se sont réunis dans l'ancienne capitale royale pour unir leurs force suite à l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Défense, énergie, industrie, réfugiés : voici le texte entier.

Il y a deux semaines, la Russie a ramené la guerre en Europe. L'agression militaire non provoquée et injustifiée de la Russie contre l'Ukraine viole de façon flagrante le droit international et les principes de la charte des Nations unies, et porte atteinte à la sécurité et à la stabilité européennes et mondiales. Elle inflige à la population ukrainienne des souffrances indicibles. La Russie, et sa complice la Biélorussie, portent l'entière responsabilité de cette guerre d'agression et les personnes responsables devront répondre de leurs crimes, notamment des attaques ciblant sans discernement les civils et les biens civils.

À cet égard, nous saluons la décision du procureur de la Cour pénale internationale d'ouvrir une enquête. Nous demandons que la sûreté et la sécurité des installations nucléaires ukrainiennes soient assurées immédiatement avec l'aide de l'Agence internationale de l'énergie atomique. Nous appelons la Russie à cesser ses actions militaires et à retirer toutes ses forces et tous ses équipements militaires de la totalité du territoire ukrainien, immédiatement et sans condition, et à respecter pleinement l'intégrité territoriale, la souveraineté et l'indépendance de l'Ukraine à l'intérieur de ses frontières reconnues au niveau international.

Nous saluons le courage dont fait preuve le peuple ukrainien en défendant son pays et nos valeurs communes de liberté et de démocratie. Nous n'abandonnerons pas les Ukrainiens à leur sort. L'UE et ses États membres continueront de fournir un soutien politique, financier, matériel et humanitaire coordonné. Nous sommes résolus à apporter notre appui à la reconstruction d'une Ukraine démocratique, une fois que l'offensive russe aura cessé. Nous sommes déterminés à faire encore davantage pression sur la Russie et sur la Biélorussie. Nous avons adopté des sanctions significatives et nous nous tenons prêts à en adopter rapidement de nouvelles.

Un nombre incalculable de personnes fuient la guerre en Ukraine. Nous offrons une protection temporaire à tous les réfugiés de guerre en provenance d'Ukraine. Nous félicitons les pays européens, notamment ceux qui sont frontaliers de l'Ukraine, pour l'immense solidarité dont ils font preuve en accueillant les réfugiés de guerre ukrainiens. L'UE et ses États membres continueront de se montrer solidaires et d'apporter un soutien humanitaire, médical et financier à tous les réfugiés et aux pays qui les accueillent.

Nous demandons que des fonds soient mis à disposition sans plus attendre au moyen de l'adoption rapide de la proposition en ce qui concerne l'action de cohésion pour les réfugiés en Europe (CARE) et de REACT-EU. Nous appelons la Russie à respecter pleinement les obligations qui lui incombent en vertu du droit international humanitaire. Elle doit garantir un accès de l'aide humanitaire sûr et sans entrave aux victimes et aux personnes déplacées à l'intérieur de l'Ukraine, et permettre un passage en toute sécurité aux civils qui souhaitent quitter le territoire.

"Le Conseil européen a pris acte des aspirations européennes de l'Ukraine et de son choix de se tourner vers l'Europe, conformément à l'accord d'association"

Le Conseil européen a pris acte des aspirations européennes de l'Ukraine et de son choix de se tourner vers l'Europe, conformément à l'accord d'association. Le 28 février 2022, le président ukrainien, exerçant le droit de l'Ukraine de choisir son propre destin, a présenté la demande d'adhésion de l'Ukraine à l'Union européenne. Le Conseil a agi rapidement et a invité la Commission à rendre son avis sur cette candidature, conformément aux dispositions pertinentes des traités. Dans l'attente de cet avis, nous allons sans plus attendre renforcer encore nos liens et approfondir notre partenariat pour aider l'Ukraine à progresser sur sa trajectoire européenne. L'Ukraine fait partie de notre famille européenne.

Le Conseil a invité la Commission à rendre ses avis sur les candidatures de la République de Moldavie et de la Géorgie. La guerre d'agression menée par la Russie constitue un bouleversement tectonique dans l'histoire européenne. Lors de notre réunion à Versailles, nous avons discuté de la manière dont l'UE peut se montrer à la hauteur de ses responsabilités dans cette nouvelle réalité, en protégeant nos citoyens, nos valeurs, nos démocraties et notre modèle européen. 7. Confrontés à une instabilité et à une concurrence stratégique croissantes et à des menaces grandissantes pour la sécurité, nous avons décidé d'assumer une plus grande responsabilité en ce qui concerne notre sécurité et de prendre de nouvelles mesures décisives en vue de construire notre souveraineté européenne, de réduire notre dépendance et d'élaborer un nouveau modèle de croissance et d'investissement pour 2030. Dans ce contexte, nous avons abordé aujourd'hui trois dimensions essentielles:  le renforcement de nos capacités de défense; la réduction de notre dépendance énergétique; et la construction d'une base économique plus solide.

Nous avons abordé aujourd'hui trois dimensions essentielles:  le renforcement de nos capacités de défense; la réduction de notre dépendance énergétique; et la construction d'une base économique plus solide.

Renforcer nos capacités de défense

En décembre 2021, nous avons décidé que l'Union européenne assumerait une plus grande responsabilité en ce qui concerne sa propre sécurité et, en matière de défense, qu'elle suivrait une ligne d'action stratégique et renforcerait sa capacité à agir de manière autonome. La relation transatlantique et la coopération entre l'UE et l'OTAN, dans le plein respect des principes énoncés dans les traités et de ceux que le Conseil européen a adoptés, y compris les principes d'inclusivité, de réciprocité et d'autonomie décisionnelle de l'UE, sont fondamentales pour notre sécurité globale. Une Union plus forte et plus capable dans le domaine de la sécurité et de la défense contribuera positivement à la sécurité globale et transatlantique et est complémentaire à l'OTAN, qui reste le fondement de la défense collective pour ses membres.

La solidarité entre les États membres est exprimée à l'article 42, paragraphe 7, du TUE. Plus largement, l'UE réaffirme son intention d'accroître son soutien à l'ordre mondial fondé sur des règles et articulé autour des Nations unies. Compte tenu des défis auxquels nous sommes confrontés et afin de mieux protéger nos citoyens, tout en reconnaissant le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres, nous devons résolument investir davantage et mieux dans les capacités de défense et les technologies innovantes. Nous sommes donc convenus:

a) d'augmenter considérablement les dépenses en matière de défense, en consacrant une part importante aux investissements, à axer sur les insuffisances stratégiques relevées, et en développant les capacités de défense de manière collaborative au sein de l'Union européenne;

b) d'élaborer de nouvelles mesures d'incitation afin d'encourager les investissements collaboratifs des États membres dans des projets conjoints et dans l'acquisition conjointe de capacités de défense;

c) d'investir davantage dans les capacités nécessaires pour mener à bien l'ensemble des missions et opérations, y compris dans des capacités de soutien stratégiques telles que la cybersécurité et la connectivité spatiale;

d) de favoriser les synergies entre les activités de recherche et d'innovation menées dans les domaines civil, spatial et de la défense, et d'investir dans les technologies critiques et émergentes et l'innovation pour la sécurité et la défense;

e) de prendre des mesures pour renforcer et développer notre industrie de la défense, y compris les PME.

Nous devons également nous préparer au mieux aux défis surgissant rapidement:

a) en nous protégeant contre une guerre hybride qui prend toujours plus d'ampleur, en renforçant notre cyberrésilience, en protégeant nos infrastructures – en particulier nos infrastructures critiques – et en luttant contre la désinformation;

b) en renforçant les dimensions de sécurité et de défense des industries et activités spatiales;

c) en accélérant les efforts actuellement déployés pour améliorer la mobilité militaire dans toute l'UE.

Nous invitons la Commission, en coordination avec l'Agence européenne de défense, à présenter une analyse des déficits d'investissement dans la défense d'ici la mi-mai et à proposer toute initiative supplémentaire nécessaire pour renforcer la base industrielle et technologique de défense européenne.

Parallèlement à cela, nous aiderons nos partenaires au moyen de tous les instruments disponibles, y compris en ayant davantage recours à la facilité européenne pour la paix. 13. La boussole stratégique à venir donnera des orientations pour l'action à mener dans toutes ces dimensions de sécurité et de défense afin de faire de l'Union européenne une garante de la sécurité plus forte et aux capacités renforcées.

Réduire notre dépendance énergétique

Ces dernières années, l'Union européenne a fixé des objectifs ambitieux pour atteindre la neutralité climatique d'ici à 2050. Alors que l'UE s'emploie à atteindre cet objectif, la situation actuelle nous oblige à réévaluer entièrement la manière dont nous assurons la sécurité de nos approvisionnements énergétiques. À cet égard, nous sommes convenus de nous défaire progressivement de notre dépendance aux importations de gaz, de pétrole et de charbon russes, et ce dès que possible, notamment par les moyens suivants:

a) accélérer la réduction de notre dépendance globale aux combustibles fossiles, en tenant compte des situations nationales et des choix des États membres en ce qui concerne leur bouquet énergétique;

b) diversifier nos approvisionnements et nos voies d'approvisionnement, y compris en ayant recours au GNL et en développant le biogaz;

c) continuer de mettre en place un marché de l'hydrogène pour l'Europe;

d) accélérer le développement des énergies renouvelables et la production de leurs composants essentiels, et rationaliser les procédures d'autorisation pour accélérer les projets énergétiques

e) compléter et améliorer l'interconnexion des réseaux de gaz et d'électricité européens et synchroniser complètement nos réseaux électriques dans toute l'UE

f) renforcer les plans d'urgence de l'UE en matière de sécurité d'approvisionnement; g) améliorer l'efficacité énergétique et la gestion de la consommation d'énergie, et favoriser une approche plus circulaire des modes de fabrication et de consommation. Nous invitons la Commission à proposer un plan REPowerEU à cet effet d'ici la fin du mois de mai.

De plus, nous continuerons à travailler sur les volets suivants:

a) assurer des niveaux suffisants de stockage de gaz et mettre en place des opérations de réapprovisionnement coordonnées;

b) surveiller et optimiser le fonctionnement du marché de l'électricité;

c) orienter les investissements coordonnés vers les systèmes énergétiques, et notamment fournir des infrastructures de GNL;

d) améliorer la connectivité avec notre voisinage immédiat. Nous invitons la Commission à présenter, d'ici la fin du mois de mars, un plan visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement et des prix de l'énergie abordables au cours de la prochaine saison hivernale. 19. Parallèlement, et dans les plus brefs délais, sur la base de la communication de la Commission du 8 mars 2022, nous examinerons l'impact de la hausse des prix de l'énergie sur nos citoyens et nos entreprises, en particulier sur nos citoyens vulnérables et nos PME, et envisagerons des options concrètes pour y faire face, y compris lors de la prochaine réunion du Conseil européen des 24 et 25 mars 2022.

Construire une base économique plus solide

En nous appuyant sur les atouts du marché unique, dont nous poursuivrons le parachèvement, nous rendrons la base économique de l'Europe plus résiliente, plus compétitive et mieux adaptée aux transitions écologique et numérique, tout en ne laissant personne de côté. Réduire notre dépendance stratégique 21. Pour l'avenir, les secteurs ci-après jouent un rôle déterminant dans le cadre des mesures à prendre concernant notre dépendance stratégique, en particulier dans les domaines les plus sensibles: Matières premières critiques Nous garantirons l'approvisionnement de l'UE au moyen de partenariats stratégiques, en envisageant la constitution de stocks stratégiques et en favorisant une économie circulaire et une utilisation efficace des ressources; Semi-conducteurs Nous diversifierons les chaînes de valeur d'approvisionnement, préserverons l'avance technologique et continuerons à développer une capacité de production de l'UE dans le but de garantir, par l'intermédiaire de la législation européenne sur les semiconducteurs, 20 % des parts du marché mondial d'ici à 2030;

Nous mettrons l'accent sur le soutien à l'innovation et à une production européenne durable de médicaments abordables, sur l'accélération de l'enregistrement des fournisseurs européens, sur le financement de la recherche et du développement et le renforcement des capacités de production de produits critiques pour réagir aux crises sanitaires, y compris par l'intermédiaire de l'Autorité européenne de préparation et de réaction en cas d'urgence sanitaire (HERA), et sur l'objectif consistant à faire de l'Europe un acteur de premier plan dans le domaine de la biomédecine; Numérique Nous investirons dans les technologies numériques, telles que l'intelligence artificielle, le cloud et le déploiement de la 5G en Europe et à l'étranger.

Nous étudierons la faisabilité de la création de partenariats numériques, nous renforcerons le cadre normatif de l'UE en adoptant rapidement les actes législatifs en attente (en particulier la législation sur les données, la législation sur les services numériques, la législation sur les marchés numériques et la législation sur l'intelligence artificielle), et nous pèserons de tout notre poids sur la normalisation de certaines technologies clés, telles que la future 6G; Produits alimentaires Nous améliorerons notre sécurité alimentaire en réduisant notre dépendance aux importations des principaux produits et intrants agricoles, en particulier en augmentant la production de protéines végétales au sein de l'UE.

 Nous invitons la Commission à présenter des options visant à remédier à la hausse des prix des denrées alimentaires et à répondre à la question de la sécurité alimentaire mondiale, et ce dès que possible. Action au niveau de l'UE et au-delà 22. Au niveau de l'UE, nous assurerons la coopération en encourageant les initiatives industrielles, y compris par le biais de projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC) et d'alliances industrielles. De plus, nous renforcerons les capacités de l'UE en matière de recherche et d'innovation. 9 FR 23. Au niveau mondial, nous continuerons à mener une politique commerciale ambitieuse et solide, de manière multilatérale ainsi que par des accords commerciaux, et à promouvoir nos normes, l'accès au marché, les chaînes de valeur durables et la connectivité. Nous compléterons notre boîte à outils des politiques commerciale et de concurrence par des instruments visant à lutter contre les effets de distorsion des subventions étrangères sur le marché unique, à protéger contre les mesures coercitives de pays tiers, ainsi qu'à assurer la réciprocité avec les partenaires commerciaux en ce qui concerne l'ouverture des marchés publics. Le processus conduisant à la conclusion d'accords commerciaux devrait être transparent et inclusif afin de garantir des résultats positifs.

Favoriser les investissements

Nous créerons un environnement de nature à faciliter et à attirer les investissements privés:

a) en réformant, simplifiant et accélérant résolument les procédures administratives d'autorisation des projets d'investissement dans l'UE;

b) en créant un environnement réglementaire simple et prévisible, en particulier pour les PME;

c) en promouvant des compétences permettant de répondre à l'évolution des besoins du marché du travail et en garantissant des emplois de qualité;

d) en continuant à promouvoir la cohésion sociale et en préservant notre modèle social;

e) en complétant notre marché unique dans toutes ses dimensions, notamment en ce qui concerne le numérique et les services;

f) en créant des marchés financiers européens plus intégrés, plus attractifs et plus compétitifs, permettant de financer l'innovation et préservant la stabilité financière, en approfondissant l'union des marchés des capitaux et en parachevant l'union bancaire.

Nous mobiliserons les financements publics européens et nationaux nécessaires pour améliorer l'accès au capital-risque, surmonter les défaillances du marché, mobiliser les investissements privés et encourager les projets innovants. Nous utiliserons au mieux les ressources de l'UE. Nous mettrons à profit le budget et le potentiel du groupe BEI pour stimuler les investissements, y compris un financement plus élevé du risque pour l'entrepreneuriat et l'innovation. 26. Nos politiques budgétaires nationales devront tenir compte de l'ensemble des besoins en matière d'investissements et refléter la nouvelle situation géopolitique. Nous mènerons des politiques budgétaires saines, qui garantissent la soutenabilité de la dette de chaque État membre, y compris en encourageant des investissements qui sont propices à la croissance et sont essentiels pour nos objectifs écologiques et numériques. Dans le même temps, nous intensifierons les réformes qui amélioreront la compétitivité, favoriseront la création d'emplois et développeront le potentiel de croissance dans l'Union européenne.

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