La présidente du CNB espère que la crise, après avoir durement impacté le monde des avocats et de la justice, débouchera sur une prise de conscience du rôle majeur de l’institution et sur une meilleure prise en compte de ses besoins.

Pour Christiane Féral-Schuhl, le paradoxe est saisissant. Alors que "les notions de justice sociale, fiscale, économique sont omniprésentes dans les débats publics", jamais l’institution n’a semblé aussi mal en point. Déjà fragilisée par une absence de moyens et une série de compromis qui, selon l’avocate et présidente du CNB, n’auront cessé de l’éloigner du citoyen, elle a payé un lourd tribut à la crise sanitaire laquelle, "si elle a démontré que les avocats savaient faire preuve de résilience, a aussi exacerbé leurs faiblesses structurelles". 

Accentuant la fracture numérique entre cabinets,aggravant les retards et réduisant drastiquement l’activité, jusqu’à 75% chez certains. "Il faut bien constater que l’institution judiciaire n’a pas été capable d’affronter la crise qui, pour les avocats, a majoritairement été synonyme d’arrêt total ou partiel d’activité", explique celle qui s’inquiète aussi d’avoir vu nombre de cabinets opter, durant cette période de frugalité forcée, "pour des modes d’organisation conduisant à l’exclusion des plus fragiles ou des moins rentables"

La crise sanitaire : un électrochoc collectif

D’où son espoir de voir la crise susciter, plus encore qu’une prise de conscience, "un électrochoc collectif" pour constater les dégâts, d’une part, et agir pour y remédier, d’autre part. Ceci dans l’intérêt non pas uniquement de la profession, mais de l’ensemble de la société. "Les avocats, les magistrats et les personnels de justice ne peuvent pas être les seuls à s’alarmer du délitement de notre justice qui est en train d’échapper aux citoyens en devenant abstraite, lointaine...", estime Christiane Féral-Schuhl pour qui "on n’a jamais autant parlé de justice sociale et si peu considéré l’institution judiciaire." En tête des enjeux : l’urgence, déjà prégnante avant le Covid et que "la pandémie n’a fait qu’aggraver, d’obtenir un budget permettant de faire fonctionner la justice".

"On n'a jamais autant parlé de justice sociale et si peu considéré l'institution judiciaire"

Crise démocratique

"La crise sanitaire s’accompagne d’une crise sociale sans précédent qui aura des répercussions incalculables dans les tribunaux, au civil comme au pénal. L’État est-il prêt à faire face à ce tsunami ?", interroge la présidente du CNB avant de poursuivre : "Par temps calme, le budget de la justice était déjà insuffisant, mais par gros temps pourrons-nous faire face ? C’est une question essentielle : si la justice cède, c’est la crise démocratique assurée."

En l’absence de moyens suffisants, Christiane Féral-Schuhl craint que la généralisation de "politiques de pénuries" n’achève de déshumaniser la justice. "Qu’il s’agisse des box vitrés, des cours criminelles, de la carte judiciaire, de la visio-audience... À chaque fois on renonce à des principes fondamentaux du droit pour des raisons d’économies", s’inquiète-t-elle tout en reconnaissant que, après avoir accentué les difficultés, la crise pourrait accélérer leur résolution.

Dysfonctionnements

Non seulement parce qu’elle a placé la justice au cœur des préoccupations citoyennes mais aussi parce qu’elle a mis en lumière les failles de l’institution. "Les dysfonctionnements que nous, avocats,dénonçons depuis longtemps, deviennent flagrants : des procédures trop complexes, anormalement longues, des délais d’attente interminables, des prisons surpeuplées... ", énonce celle qui veut croire en l’imminence d’une prise de conscience généralisée.

"Avant le Covid, les avocats ont démontré leur capacité de combattre des réformes injustes : celle de la justice, des retraites... Pendant le Covid, ils ont démontré leur capacité de résilience. Après le Covid, je crois plus que jamais dans leur capacité à résister pour défendre certaines valeurs fondamentales : le débat contradictoire, l’oralité des débats, le secret professionnel... " Surtout, conclut l’avocate, si le nouveau garde des Sceaux leur apporte son soutien.

Caroline Castets

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