À moins d’une semaine du deuxième tour, les prétendants à l’Élysée et leurs soutiens tentent d’expliquer leur programme sur le sujet brûlant des retraites. Emmanuel Macron se montre plus souple que lors de son premier projet de réforme, tandis que Marine Le Pen est revenue sur une retraite pour tous à 60 ans, telle qu’envisagée en 2017.

Les retraites ne sont pas un petit sujet pour qui se présente à l’élection présidentielle. Vues comme trop libérales pour certains ou populistes pour d’autres, les réformes en la matière font couler beaucoup d’encre et la manière dont elles sont calibrées peut avoir un impact sur le résultat du scrutin.

Au premier tour de cette élection, les retraités ont largement voté (40 %) pour Emmanuel Macron. Le chef de l’État fait ainsi mieux que son adversaire du second tour, Marine Le Pen, qui a remporté 18 % de leurs suffrages. Si les seniors semblent approuver la politique du fondateur de La République en marche, il n’y a pas que cette frange de la population qui vote sur les programmes des candidats et notamment leurs promesses sur les retraites. Il suffit de voir les quelques soulèvements étudiants de l’entre-deux-tours pour constater une colère chez une partie des électeurs qui s’inquiètent pour leur avenir.

Une réforme remise à plat

Brûlant, le sujet des retraites n’a pas fait l’objet d’une réforme sous le premier quinquennat Macron à cause de la pandémie. Auparavant, le Président souhaitait instaurer un système unique à points et fusionner les 42 régimes de retraite existants. Le délai, quasi imposé par la Covid-19, a été l’occasion pour lui de retravailler des propositions qui ne faisaient pas l’unanimité et risquaient d’engendrer l’émoi social.

En prévision de sa nouvelle candidature, Emmanuel Macron a d’abord proposé le relèvement progressif, dès l’été 2022, de l’âge de la retraite à 65 ans, contre 62 ans aujourd’hui. Le président-candidat inscrit cette mesure dans une réforme des retraites plus large qui consiste à prendre en compte les carrières longues ou pénibles tout en supprimant les principaux régimes spéciaux (EDF, RATP) pour les nouveaux entrants. Il souhaite également s’attaquer au chômage des seniors.

Emmanuel Macron se dit "prêt à discuter du rythme et des bornes" de la réforme

Mais la troisième place obtenue haut la main par Jean-Luc Mélenchon au premier tour de la présidentielle et le risque de voir Marine Le Pen fouler la porte de l’Élysée, ont donné du grain à moudre au chef de l’État qui envisage désormais, certes, de relever le plafond des retraites mais seulement jusqu’à 64 ans et de manière progressive. "L’âge légal serait décalé de quatre mois chaque année et le cap des 64 ans arriverait ainsi en 2027-2028", a-t-il ajouté. Emmanuel Macron s’est même dit "prêt à discuter du rythme et des bornes" de cette mesure qui vise à sauver le système par répartition et n’exclut pas un référendum sur le sujet. Outil que Marine Le Pen promet de mettre régulièrement en place pour faire passer ses lois si elle venait à être élue.

En faisant travailler davantage les Français, le candidat table sur une économie de 9 à 15 milliards d’euros par an. En contrepartie, il promet de revaloriser les pensions afin d’assurer un minimum pour vivre de 1 100 euros par mois, contre un taux plein minimum actuellement de 652 euros. "Nous voulons indexer [la pension de retraite] sur l’inflation et, dès le mois de juillet prochain, permettre aux retraites d’être augmentées pour suivre l’augmentation des prix, a expliqué sur Europe 1 Bruno Le Maire, ministre de l’Économie. Donc il ne reste qu’une solution : repousser l’âge légal de départ à la retraite."

Changement de cap pour Marine Le Pen

Marine Le Pen souhaite également augmenter le minimum vieillesse (à 1 000 euros) et revaloriser les retraites en fonction de l’inflation. La candidate du Rassemblement national n’envisage en revanche pas d’allonger l’âge du départ à la retraite. Elle veut que les personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans et qui justifient de 40 annuités puissent partir à 60 ans. Les hommes et les femmes commençant tôt étant généralement à des postes plus pénibles que ceux arrivant plus tard sur le marché de l’emploi. Cette réforme s’avère moins ambitieuse que celle proposée en 2017, période où la candidate proposait de rétablir la retraite à 60 ans pour tous.

Un système progressif s’étalant entre 160 et 168 trimestres serait également mis en place pour toute personne entrée sur le marché du travail entre 20 et 24,5 ans. Les personnes ayant commencé à travailler à 25 ans devraient cotiser, elles, 42 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Soit un an de moins que ce qui est prévu aujourd’hui pour les générations nées après 1973. Pour les autres, le système ne changerait pas. Coût de la réforme selon le RN : environ 9,6 milliards pour les départs à 60 ans, sur lesquels Marine Le Pen espère économiser 4,4 milliards grâce aux postes libérés plus tôt qui favoriseraient l’emploi des jeunes. Le service après-vente effectué par les candidats et leurs soutiens afin de faire comprendre leur réforme n’est pas une mince affaire. À voir si les Français en entendront toutes les subtilités.

Olivia Vignaud

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