L’année qui s’achève a été riche en petites phrases politiques. Si certaines peuvent porter à sourire par leur maladresse ou leur amateurisme, d’autres sont révélatrices d’une pensée populiste voire anti-républicaine.

Ségolène Royal, une année pleine d’ambiguïté

Indésirable en Macronie, rejetée par le PS, privée de tout mandat. Politiquement, la carrière de Ségolène Royal est au point mort. Pourtant, elle ne cache pas ses ambitions présidentielles et continue d’écumer plateaux et studios pour placer quelques "punchlines" qui lui permettent de rappeler aux Français qu’elle existe encore. Dernière frasque en date le 8 décembre, sur Sud Radio, elle critique le Beauvau de la sécurité d’une manière assez particulière : "Beauvau, vous pensez qu’il y’a beaucoup de gens qui connaissent l’adresse du ministère de l’Intérieur ? Au fin fond de nos campagnes, les gens savent ce que c’est un veau qui est beau". Cette sortie lui a bien évidemment valu d’être critiquée pour son supposé mépris envers les ruraux.

Mais c’est surtout sur les questions de Mila et de Samuel Paty que l’ancienne finaliste de la présidentielle de 2007 a suscité la controverse cette année. Le 3 février, alors que la lycéenne accusée de blasphème vit cachée sous protection policière depuis plusieurs semaines, Ségolène Royal, invitée sur France 2, n’a pas un mot de compassion pour l’adolescente : "Je ne suis absolument pas Mila (…). Elle manque de respect". Lors du meurtre de Samuel Paty, elle fera à nouveau parler d’elle en assimilant l’égorgement à une "agression" et en déplorant que les caricatures montrées aux élèves (dans le cadre du programme scolaire) sont "insultantes".

Agnès Pannier-Runacher, conseillère en placement

Le 10 mars, le coronavirus commence à faire planer un risque sur l’économie mondiale et les cours de toutes les Bourses du monde s’effondrent. Sur CNews, Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’État à l’Industrie, tient à rassurer les Français en vantant la solidité de l’économie mondiale qui, selon elle, a beaucoup appris de la crise de 2008. Elle va même jusqu’à affirmer que "c’est plutôt le bon moment de faire des affaires en Bourse". Pour l’opposition, cette petite phrase sortie de son contexte est un cadeau inespéré. De LR au PCF, nombre de personnalités dénonceront "l’amateurisme", "la légèreté", "la secrétaire d’État à la spéculation" ou encore "le gouvernement des riches".

Sibeth Ndiaye, de la difficulté de mettre un masque

Nous sommes le 20 mars 2020. Depuis trois jours, l’Hexagone est en plein confinement et les Français recherchent activement des masques qui sont scientifiquement le meilleur moyen de se protéger contre la Covid-19. Pourtant, sur BFM, la porte-parole du gouvernement déclare sans sourciller : "Vous savez quoi ? Je ne sais pas utiliser un masque. Je pourrais dire « je suis une ministre, je mets un masque mais en fait, je ne sais pas l’utiliser". Une saillie qui fera l’objet de bien des parodies sur les réseaux sociaux.

Sibeth Ndiaye, une porte-parole aux fraises ?

Le 25 mars, à l’issue du conseil des ministres, cette fidèle de la première heure du président confirme que les enseignants (dont les classes sont fermées) ne seront pas mobilisés pour aider la filière agricole en manque de bras : "Nous n’entendons pas demander à un enseignant qui aujourd’hui ne travaille pas compte tenu de la fermeture des écoles de traverser toute la France pour récolter des fraises gariguettes". En réalité, malgré le confinement, les professeurs assurent à distance une continuité pédagogique. Ces derniers ont très mal pris le fait d’être perçu comme oisifs potentiels et n’ont pas manqué de le faire savoir. Sibeth Ndiaye sera discrètement exfiltrée lors du remaniement de juillet.

Éric Piolle et le porno dans l’ascenseur

Pour Emmanuel Macron, les écologistes français, réfractaires à toute forme de progrès technique sont des "Amishs". Ce que semble confirmer le maire de Grenoble Éric Piolle. Invité du Grand Jury-Le Figaro-LCI le 5 juillet, il a affirmé que la 5G avait pour seule utilité 'de regarder du porno sur votre téléphone, même si vous êtes dans l’ascenseur". Le même mois, le plan de relance allemand consacrait 7 milliards d’euros pour déployer la 5G érigée au rang de priorité. Le tout avec le soutien des Verts d’outre-Rhin.

Aurélien Taché remet une pièce dans le juke box

C’est un fait divers qui a ému les Français en plein cœur du mois d’août. Une adolescente, fille de demandeurs d’asile originaires de Bosnie, est battue et tondue par sa famille à Besançon. Son tort ? Avoir un fiancé de confession chrétienne. Logiquement, toute la classe politique de gauche comme de droite défend la jeune femme. Toute ? Non, un député habitué à la controverse se distingue de la masse. Il s’agit d’Aurélien Taché, élu dans le Val d’Oise. Pour cet ancien macroniste qui a désormais fondé son micro parti (Nous demain), ceux qui défendent l’agressée remettent une "pièce dans le juke-box haine antimusulmane". Si l’on ne peut plus tondre sa fille tranquillement, où va-t-on ? Notons qu’un an plus tôt, il avait assimilé l’hidjab porté par certaines fillettes au serre-tête.

Grégory Doucet et le Tour de France

En politique, il existe une règle simple : ne pas s’en prendre à des choses qui font l’unanimité dans la population. Par dogmatisme ou manque de professionnalisme, le maire écolo de Lyon n’est pas de cet avis. Alors que le Tour de France est populaire partout dans le monde, qu’il donne une belle image de l’Hexagone et que les communes se battent pour être villes d’étape, Grégory Doucet se distingue. Le 9 septembre, il qualifie le Tour de France de "machiste et polluant". Devant le tollé suscité par ses propos, il fera machine arrière et réalisera que la défense de l’écologie populaire exige d’être plus réaliste qu’idéologue.

Pierre Hurmic et l’arbre mort

Deux jours plus tard, Pierre Hurmic, maire écolo de Bordeaux va encore plus loin que son homologue lyonnais. Lors d’une conférence de presse, il affirme sans sourciller que désormais, la ville n’installera plus de sapin place Pey Berland. Motif : "Nous ne mettrons pas des arbres morts sur la place de la ville". De quoi donner des cartouches à ceux qui accusent les Verts d’être des pastèques, des Khmers verts ou des chantres de l’écologie punitive. Il est probable que cette petite phrase colle au nez de Pierre Hurmic comme le sparadrap du capitaine Haddock. D’autant plus que, contrairement à Grégory Doucet, Pierre Hurmic ne fera pas son mea culpa, allant jusqu’à qualifier ses opposants de "fachos".

Nicolas Sarkozy et les singes

Invité sur le plateau de Quotidien le 10 septembre, Nicolas Sarkozy est revenu sur l’ouvrage d’Agatha Christie Dix petits nègres, rebaptisé Ils étaient dix au nom du politiquement correct. Une erreur selon l’ancien président de la République qui s’emmêle quelque peu les pinceaux : "On a le droit de dire singe ? On a plus le droit de dire. On dit quoi ? Les dix petits soldats maintenant c’est ça ? Elle progresse la société. On a peut-être le droit de dire singe sans insulter personne". Des propos au mieux maladroits, au pire révélateurs d’un racisme latent. La polémique n’ayant pas pris d’ampleur, il semble que la maladresse ait été retenue. 

Alice Coffin, la misandrie tranquille

Oui, il est possible de faire carrière en politique en appelant ouvertement à la haine envers une partie de l’humanité. En septembre, l’activiste misandre Alice Coffin (conseillère de Paris sous l’étiquette EELV) publie son pamphlet Le Génie lesbien. Celui-ci ne tarde pas à faire parler de lui, et pour cause. Son auteure assimile tous les hommes à des "assaillants" et passe un message aux femmes quant à leurs relations avec les hommes : "il ne suffit pas de nous entraider, il faut, à notre tour, les éliminer". Son parti la soutiendra sans faillir et estimera que ceux qui remettent en cause son mode de pensée sont des censeurs, des sexistes ou des homophobes. Soulignons qu’en 2019, alors qu’elle n’était pas engagée en politique, Alice Coffin avait annoncé la couleur lors d’une interview à la chaîne RT France : "Ne pas avoir de mari m’expose à ne pas être violée, ne pas être tabassée et ça évite que des enfants le soient aussi". Mais d’où vient une telle haine ?

Manon Aubry, entre pâtes et journalisme

Si la députée européenne insoumise est habituée aux propos controversés, novembre a été un mois particulièrement fructueux pour elle. Le 28, sur France info lors d’un débat sur le racisme en France, l’élue LR Florence Portelli évoque sa mère, immigrée italienne, qui durant son enfance, a été traitée de "sale macaroni". De manière péremptoire, Manon Aubry l’interrompt en assénant que "sale macaroni, ce n’est pas une insulte raciste. Ceux qui subissent au quotidien les insultes et les contrôles au faciès, ce sont les gens de couleur dans les quartiers populaires". Le racisme, selon elle, ne viendrait que d’un camp et ne concernerait qu’une partie de la population. Ce qui est bien évidemment faux, comme le feront remarquer de nombreux élus et citoyens dans les heures qui suivent. Manon Aubry finira par s’excuser, mais ces propos prononcés en direct en disent long.

Une semaine plus tôt, elle s’était distinguée en s’exprimant sur le procès Sarkozy. Selon elle, "il n y a quasiment que la presse étrangère pour en parler. Il n’y a pas comme un problème ?". Il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. À l’heure où son tweet est publié, le procès est traité en Une par Le Monde, Le Figaro, Libération, Le Parisien, la presse régionale (et aussi Décideurs Magazine).

Julien Bayou et le lynchage

Chez, EELV tous les moyens sont bons pour mettre en avant son antiracisme ou sa vision "inclusive" de la société. Quitte à céder avec le sourire aux pires revendications des mouvements indigénistes. Leur secrétaire national, Julien Bayou n’hésite pas à donner l’exemple.

Le 29 novembre, dans un post Twitter, il dénonce le lynchage de policiers lors de la manifestation contre la loi de sécurité globale et prône l’apaisement. Aussitôt, Amandine Gay, universitaire qui se proclame afroféministe, fait part de son indignation. Selon elle "la banalisation du terme lynchage et son usage par les personnes blanches pour décrire du harcèlement en ligne ou des agressions IRL conduit à effacer l’expérience et les souffrances des personnes noires".

En somme, l’utilisation du terme serait réservée aux personnes de couleur. Ridicule, d’autant plus que le terme vient de Charles Lynch, juge durant la guerre d’Indépendance des États-Unis qui voulait punir de manière expéditive les loyalistes à la couronne britannique à 99,9% blancs.

Qu’importe. Dans les minutes qui suivent, Julien Bayou se confond en excuses. "J’entends que le terme lynchage n’est pas adapté pour une personne blanche » « Je serais preneur d’un échange pour déterminer comment qualifier le fait qu’une foule s’en prenne à un policier". Soumission immédiate, absence de réflexion, légitimation de propos s’en prenant à l’universalisme… Julien Bayou a reçu une volée de bois vert sur les réseaux sociaux. Tout en donnant du grain à moudre aux élus qui, comme Anne Hidalgo, estiment que les Verts doivent "clarifier leur rapport à la République".

Florian Philippot, complotiste pro-Trump et anti-vaccins.

Politiquement, le parcours de Florian Philippot ressemble à une descente aux enfers aussi rapide que son ascension. Après avoir joué le rôle d’éminence grise et de VRP de Marine Le Pen, l’énarque a choisi de voler de ses propres ailes en fondant son propre parti : Les Patriotes. Pour le moment, l’échec est total : aux législatives de 2017, leur "meilleur candidat" récolte moins de 2% des suffrages tandis qu’aux européennes de 2019, Ces chantres du Frexit, réalisent un piteux 0,65%. Son patron, pour sa part, n’est plus que conseiller régional de la région Grand Est.

Pour communiquer et faire parler de lui, l’ancienne étoile montante de la vie politique française mise sur un créneau porteur : le complotisme. Depuis le 3 novembre, il relaie les fake news de la droite trumpiste, dénonçant à longueur de journée sur son compte Twitter des tricheries et des manipulations imaginaires.

Évidemment, Florian Philippot fait aussi son miel de l’épidémie de coronavirus. C’est ainsi que le 11 décembre il a dénoncé la "dictature sanitaire" matérialisée par les vaccins contre la Covid-19 vus comme un "ausweis" qui transformera ceux qui ne cèdent pas à la "tyrannie", en citoyens de "huitième zone".

Lucas Jakubowicz

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