Finaliste des Mipim Awards dans la catégorie « meilleur projet futur », la Cidade Matarazzo recèle de nombreuses spécificités. Visite guidée avec son concepteur, Alexandre Allard.

Vous avez aimé la rénovation du Royal Monceau à Paris ? Vous allez adorer la Cidade Matarazzo à Sao Paulo au Brésil. « Ce sera un lieu de célébration de la créativité brésilienne qui permettra de solutionner les grands problèmes mondiaux, à savoir la religion, l’environnement et les problèmes raciaux par ordre d’apparition », assure Alexandre Allard, le dénominateur commun aux deux projets.

L’entrepreneur avait initialement pensé ce programme pour reconvertir l’Hôtel de la Marine à Paris. Présentée en 2011 avec l’ancien ministre de la Culture Renaud Donnedieu de Vabres et l’architecte Jean Nouvel, « La Royale » prévoyait de rassembler les disciplines créatives, des fermes urbaines au cinéma en passant par les studios de musique et les grands artisans, dans un seul et même lieu. Mais la commission pilotée par Valéry Giscard d’Estaing pour décider de l’avenir du bâtiment a finalement empêché le projet de voir le jour. « Avec le recul, je le remercie car nous avons repris les racines de la Royale pour les transposer au Brésil et développer un projet avec une véritable portée mondiale », lâche Alexandre Allard.

L’entrepreneur commence ses recherches en 2004. Exigeant, il finit par trouver son bonheur trois ans plus tard à côté de l’avenue Paulista : « Nous nous focalisons toujours sur l’épicentre des villes où nous souhaitons réaliser un projet. A Sao Paulo, un immeuble moderne sans charme particulier se trouve pile à cet endroit. J’ai demandé au collaborateur mandaté pour la recherche de monter en haut du bâtiment et de prendre en photo les alentours. Nous avons découvert un site de trois hectares où se nichait un ancien hôpital inscrit au patrimoine historique de la ville et laissé à l’abandon depuis 1993. C’est exactement ce qu’il nous fallait pour créer de la valeur grâce à des mètres cubes d’âme plutôt que des mètres carrés économiques. »

Un programme créatif et XXL

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La chapelle Santa Luzia © Gabriel Matarazzo

Une salle d’exposition, la plus grande de la ville selon Alexandre Allard, accueillera des artistes brésiliens et internationaux qui viendront réaliser leurs œuvres sur place dans le cadre notamment d’un transfert des connaissances. Elle sera située dans l’ancien hôpital, alors qu’une salle de cinéma sera hébergée à proximité en dessous de la chapelle Santa Luzia, édifice centenaire entièrement restauré et suspendu. Au total, plus de 10 000 mètres carrés seront consacrés à l’expression des arts dans des salles d’expositions et de spectacle, un théâtre, une discothèque… Cet ensemble baptisé « maison de la créativité » a été imaginé par Rudy Ricciotti.

« Le plus grand studio de musique d’Amérique du Sud sera installé en-dessous de la tour Mata Atlântica, édifice paysage de 25 étages conçu par Jean Nouvel, afin de permettre aux plus grands producteurs mondiaux de s’inspirer de la culture brésilienne et aux artistes nationaux d’exprimer tout leur talent, déroule Alexandre Allard. Non loin, nous allons ouvrir un incubateur dédié à la mode. Et plus de soixante maisons de communautés d’artisans dans les domaines de la joaillerie, de l’habillement, de la décoration, de la gastronomie et de la nature seront disséminés dans la forêt urbaine. Ces nanoshops permettront de mettre en valeur des produits brésiliens de grande qualité inconnus du public et de créer des revenus pour aider ces communautés à préserver leur exception culturelle. »

Et de compléter : « Nous avons prévu de donner une place importante à la gastronomie avec plus de trente restaurants qui permettront à des restaurateurs internationaux de travailler avec des producteurs locaux. En parallèle, nous allons créer le premier marché de permaculture du monde avec 150 000 clients par semaine attendus. Cette initiative permettra d’ouvrir 200 fermes urbaines et de donner du travail à 4 000 sans-domiciles fixes. »

Dernier élément de programmation qui sera qualifiant pour le projet, deux hôtels seront ouverts. Le premier sera installé dans la tour Mata Atlântica et comportera 150 chambres opérées par la chaîne hôtelière de luxe Rosewood. « Cet établissement six étoiles offrira ce qui se fait de mieux en Amérique du Sud dans le secteur, avec notamment un design signé Philippe Starck, promet Alexandre Allard. Nous avons également prévu de réaliser 122 appartements de luxe de 110 à 800 mètres carrés dans le bâtiment. » Quant au deuxième hôtel, il s’adressera aux millenials. Au final, Cidade Matazarro développera plus de 200 000 mètres carrés.

Innovations technologiques et RSE

« Toute cette expérience, la Cidade Matarazzo la donne en contrepartie de la data, explique l’entrepreneur. Le lieu est relativement inexploitable si vous ne téléchargez pas l’application. Que le visiteur soit à l’hôtel, au cinéma, au restaurant ou dans un magasin, elle lui offrira un accès inédit à une multitude de services. Ainsi, la technologie se met au service de l’expérience physique pour mélanger la valeur ajoutée de ces deux mondes. »

Le système de livraison a également été pensé pour répondre aux nouvelles attentes. « Grâce à notre centre logistique automatisé, nous pourrons préparer les commandes en un temps record et livrer en moins d’une heure toute la ville, détaille Alexandre Allard. Le tout sans générer de pollution car l’acheminement des produits se fera par véhicules électriques. »

Dernier point marquant, Cidade Matarazzo se veut un projet 100 % brésilien. « Tous les éléments sont locaux, à l’exception des charnières et des fours qui sont allemands et des toilettes qui viennent du Japon. Nous avons également fait venir trente ingénieurs sur place pour former 3 800 personnes de la main d’œuvre locale et ainsi procéder à un transfert de compétences. Je ne peux pas imaginer faire du business sans valoriser le travail de l’humain. »

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©Gabriel Matarazzo

Le montant de l’investissement total s’élève à 540 millions d’euros. Les premières ouvertures sont attendues d’ici la fin de l’année et l’essentiel du programme sera opérationnel en 2020. Alexandre Allard compte le garder en patrimoine pour le faire vivre. 

Par François Perrigault (@fperrigault)

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