Inévitable pour certains, écartée par d'autres, la menace d'une deuxième vague de Covid-19 est surveillée par tous en plein déconfinement. Si l'incertitude demeure, plusieurs indices laissent penser à un risque contenu, au moins à court terme.

Confinement et gestes barrière ont nettement freiné la diffusion de la maladie Covid-19 ou Sars Cov-2 en Europe. Mais le déconfinement fait craindre désormais une deuxième vague, face à des populations encore peu immunisées. Même la Suède, jamais confinée, voit sa stratégie de l’immunité collective mise à mal : à Stockholm, foyer de l’épidémie, seulement 7,3 % de la population présentait des anticorps début mai, bien moins que les 26 % prédits par l’Agence de santé suédoise.

Pourtant, aucune deuxième vague ne semble vraiment se dessiner. Quelques alertes ont bien émergé en Chine, où une dizaine de cas seulement dans le nord du pays ont suffi à imposer un confinement strict à près d'un million de personnes. La Corée, l'Allemagne ou encore Singapour ont aussi été confrontés à des moments de doute après la découverte de nouveaux clusters, mais jusqu'à présent, la décrue se poursuit indéniablement dans tous les pays qui sont parvenus à maîtriser l'épidémie.

Météo et immunité croisée

La vigilance de la population est étroitement liée à cette baisse, mais elle s'explique aussi par les caractéristiques du virus, notamment sa sensibilité à la chaleur et à l’humidité. Ces freins, moins importants qu'espérés, ralentissent malgré tout sa transmission dans l'air ou sa durée de vie sur les surfaces. Si à Wuhan, le strict confinement a permis de contrôler le coronavirus, seule la brusque montée des températures et du taux d’humidité dans cette ville du sud de la Chine expliquerait son éradication complète.

Certains chercheurs émettent par ailleurs l’hypothèse d’un ralentissement, voire d’une fin de l’épidémie, en raison de la présence d’anticorps efficaces contre le virus chez des sujets n’y ayant pourtant jamais été exposés. En France, les soignants ont cruellement manqué de matériels de protection au plus haut de l'épidémie.

"Si à Wuhan, le strict confinement a permis de contrôler le coronavirus, seule la brusque montée des températures et du taux d’humidité dans cette ville du sud de la Chine expliquerait son éradication complète"

Pourtant le nombre d'infections à l'hôpital, qui a explosé les premières semaines s'est ensuite stabilisé. Environ 70 % des médecins et infirmiers en contact étroit avec les patients n'ont pas été contaminés. Un phénomène d'immunité croisée est possible : en ayant contracté un virus différent, de type grippe ou un autre coronavirus, certaines personnes pourraient avoir développé des anticorps capables de lutter contre le Sars-Cov-2. Dans ce scénario, l'immunité collective serait déjà atteinte chez les soignants.

Une mutation ?

Depuis son apparition fin 2019 à Wuhan, le nouveau coronavirus a déjà muté à de nombreuses reprises. Pour se diffuser, un virus produit en effet des copies de lui-même, qui peuvent présenter des erreurs et des modifications. La plupart n'ont aucune incidence sur sa structure ou la façon dont il se comporte. D'autres peuvent le rendre toutefois plus résistant, plus adapté à son milieu et favoriser sa propagation. Début mai, des chercheurs américains ont ainsi évoqué la possibilité que le Covid-19 qui frappe le monde aujourd'hui se soit transformé depuis son apparition en Chine, renforçant sa contagiosité. Au passage, l'étude montre qu'au moins 14 versions différentes du virus circulent aujourd'hui.

"Depuis son apparition fin 2019 à Wuhan, le nouveau coronavirus a déjà muté à de nombreuses reprises"

D'où l'importance de freiner autant que possible sa propagation : moins le virus circule, plus ses chances de muter en une version plus agressive seront limitées. Le plus grand risque serait, une fois un vaccin développé, de voir le coronavirus résister aux anticorps créés par l'injection, limitant ainsi son efficacité.

Un virus saisonnier

Cependant, l'exemple chinois montre au monde qu'il est possible de juguler complètement la circulation du coronavirus. Mais à un coût économique et social que tous les pays ne sont pas prêts à payer. La reprise des liaisons aériennes, la baisse de vigilance des populations et le retour dès septembre/octobre de températures plus fraîches pourraient accélérer son retour la saison prochaine. Selon l'OMS, le nouveau coronavirus pourrait ainsi "ne jamais disparaître" et devenir une maladie avec laquelle l’humanité devra apprendre à vivre.

Des vaccins, de nouveaux protocoles thérapeutiques ou l'immunité de certaines personnes pourraient néanmoins limiter l'ampleur de cette nouvelle vague. À condition de renforcer aussi les collaborations entre pays, notamment dans le domaine scientifique, pour identifier tout risque de mutation et s'armer enfin contre le risque de nouveaux virus. Selon la virologue chinoise, Shi Zhengli, de l’institut de virologie à Wuhan, le Sars-Cov-2, n'est que la partie émergée de la menace épidémique. De nouvelles maladies infectieuses et contagieuses, véhiculées par les animaux, pourraient émerger à l'avenir.

Fabien Nizon

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