Lancé en juillet 2017, FrenchFood Capital a choisi de se concentrer sur un secteur : l’alimentaire. Perrine Bismuth, associée fondatrice, revient sur la stratégie du fonds d’investissement et ses ambitions pour les années à venir.

Décideurs. Quelle est la genèse de FrenchFood Capital ?

Perrine Bismuth. Nous sommes partis de deux constats. Le premier est que l’agroalimentaire est le premier secteur économique français et se compose à 90 % de TPE et de PME, qui réalisent environ 50 % du chiffre d’affaires global du marché et pèsent pour un tiers des exportations. Il y a donc un véritable enjeu pour faire de ces entreprises des ETI tournées vers l’international. Le deuxième est que le consommateur change sa manière de s’alimenter, aussi bien dans l’assiette que dans les usages entourant l’acte de restauration. Nous considérons que la valeur de marque est un vrai atout pour les entreprises et sommes très attentifs à leur capacité à répondre à ces nouvelles attentes des consommateurs.

Avec quel type d’entreprises souhaitez-vous travailler ?

Nous avons levé un fonds d’une taille de 100 millions d’euros, avec un premier closing à 70 millions d’euros en juillet dernier. Notre objectif est d’investir des tickets de 3 à 10 millions d’euros dans des entreprises que nous pourrons aider à grandir. Nous avons réalisé un premier investissement dans « Thierry Marx, La Boulangerie » en novembre 2017, avec pour objectif d’ouvrir une vingtaine de points de vente en cinq ans. Notre vision de la thématique alimentaire est large. Nous nous intéressons beaucoup aux marques et à leur relation avec les consommateurs. Nous pouvons ainsi investir dans la distribution, la restauration, le retail, mais aussi les services BtoB comme la logistique ou le packaging.

« Deux tiers de nos investisseurs sont des entrepreneurs, des familles et des corporate »

Qu’apportez-vous à ces entreprises ?

Les PME et TPE peinent souvent à se développer. Cela peut être dû en partie à un manque de financement, mais les dirigeants ont surtout besoin d’une expertise opérationnelle et d’une mise en réseau. Nous avons conçu une équipe atypique, très entrepreneuriale. Les trois fondateurs sont Laurent Plantier, ancien associé d’Alain Ducasse, Paul Moutinho, ex-membre du directoire de Naxicap Partners, et moi-même, créatrice d’entreprise dans le secteur de l’alimentation durable. Plus récemment, Denis Hennequin, ancien dirigeant de McDonald’s Europe et du groupe Accor, a rejoint l’équipe. Nous savons que la force pour accélérer vient souvent du réseau. Deux tiers de nos investisseurs sont des entrepreneurs, des familles et des corporate. Nous nous sommes également entourés de beaucoup d’entrepreneurs non-investisseurs afin de créer un écosystème. Ce sont ces échanges, ces contacts et ces retours d’expérience qui manquent particulièrement aux entreprises de l’alimentaire, souvent familiales, qui se sont développées, pour beaucoup d’abord localement et n’ont pas toutes les clés pour accélérer à plus grande échelle.

Quelles tendances identifiez-vous sur le marché de la food ?

Nous pensons que le consommateur veut mieux manger, d’où l’émergence de plusieurs tendances, parmi lesquelles la naturalité, la traçabilité, le bio. Les usages se transforment aussi, avec un impact qui ne se résume par au domaine de la livraison mais touche aussi, par exemple, tout le secteur de la logistique alimentaire. Nous voyons également une volonté de reconnexion avec la terre agricole. Le sous-jacent fort de cette « révolution food » est de retrouver la relation de confiance entre le consommateur et son alimentation. Les marques joueront à cet égard un rôle essentiel.

Vous avez développé une politique RSE forte. En quoi consiste-t-elle ?

Nous avons en effet développé un référentiel spécifique à notre secteur que nous utilisons en due diligence pour identifier les risques auxquels sont exposées les entreprises. L’alimentaire est un secteur dans lequel il peut y avoir des crises d’envergure. Nous avons donc élargi les critères ESG classiques en y ajoutant d’autres facteurs essentiels : les fournisseurs, les clients et la question du gaspillage alimentaire notamment. Cette analyse nous permet de cerner les zones de risque et de mettre en place des actions afin de les prévenir, mais aussi d’identifier les points de différenciation des sociétés. Lorsque nous investissons, nous choisissons avec le dirigeant certains indicateurs qui ont du sens pour son business, qu’il s’engage à piloter tout au long de la participation.

Propos recueillis par Camille Prigent

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