Pascal Eydoux, président nouvellement élu du Conseil national des barreaux, et Laurent Martinet, vice-bâtonnier de l’ordre des avocats de Paris, font front commun.
Le CNB et l’Ordre de Paris se sont affrontés sur plusieurs points de la réforme Macron. Vous êtes-vous accordés ou l’image d’unité présentée à l’occasion des vœux à la presse du CNB n’est-elle que de façade ?
Pascal Eydoux
. Il faut avoir en tête que les ordres sont les régulateurs de l’exercice professionnel et qu’aucun n’est en concurrence avec le CNB, pas même l’Ordre de Paris qui compte la moitié des avocats français. Le CNB représente la profession dans son ensemble et détermine la politique de développement économique. La présence du vice-bâtonnier de Paris et du président de la conférence des bâtonniers dans le bureau du CNB constitue la pérennisation de notre unité. Nous travaillons tous ensemble sur l’avenir de la profession et aucun sujet ne nous divise.
Laurent Martinet. S’il arrive que nous ne partagions pas le même avis, il est toujours très enrichissant d’échanger au sein de la même institution. Par exemple, au sujet de la postulation, le barreau de Paris estimait qu’elle pouvait être supprimée comme le suggérait le projet de loi Macron. Le CNB, de son côté, a voté pour son maintien. Nous avons considéré que si nos confrères, dans leur organe représentatif, considéraient que la postulation était fondamentale, nous devions changer de position.

Comment procéderez-vous à l’avenir ?
P. E.
Il est nécessaire qu’au sein du CNB chaque groupe puisse exprimer son avis. Nous n’empêcherons pas cette profession d’être multiforme, avec des modes d’exercice totalement différents. Le CNB est l’expression de la réunion de la profession. Notre union est avant tout une question d’individus : nous ne devons faire preuve de pédagogie et ne jamais cesser le dialogue. Les avocats de province craignent que les ordres locaux disparaissent. Il faut les rassurer sur ce sujet. Une vision globale n’est pas de nature à malmener leur avenir.

À l’heure de l’examen de la loi Macron par l’Assemblée nationale, dans quel état d’esprit êtes-vous ?
P. E.
Nous sommes sereins, et satisfaits de constater que le projet de l’avocat en entreprise a disparu du texte. En revanche, nous nous inquiétons de voir apparaître dans les débats l’instauration du legal privilege pour les juristes d’entreprise. Ce système, en vigueur uniquement en Belgique, sans apporter d’ailleurs de réelles satisfactions, crée une nouvelle profession et porte atteinte à l’unité des activités de conseil et de contentieux. Dans un souci d’apaisement, la Chancellerie a d’ailleurs décidé de ne pas porter le débat.
L. M. Nous étions déterminés à ne pas céder sur les fondamentaux : pas de création de deux professions distinctes, préservation du secret professionnel et de la déontologie des avocats. Nous agissons pour la protection des avocats dans leur ensemble.

Plus généralement, quels sont les objectifs de votre mandature au CNB ?
P. E.
Nous nous inscrivons dans la continuité de la précédente mandature, ce qui signifie que tout ce qui a été voté aux différentes assemblées générales sera poursuivi. Nous nous inscrivons aussi dans l’innovation et la prospective : notre société évolue et la profession d’avocat doit pouvoir répondre aux nouvelles attentes. Notre unique objectif est celui de servir la profession, sans aucun clivage, crainte ou compétition. Nous devons évoluer et cela s’inscrit dans le cadre de la loi Macron, qui nous impose de revoir plusieurs points. L’évolution de la postulation, tout d’abord, implique un débat d’aménagement du territoire. Les conditions de travail ensemble et avec les autres professions du droit ensuite, pour un meilleur service du droit. L’adaptation de l’offre professionnelle à la demande des citoyens et des entreprises enfin.
L’ancienneté de nos origines induit des habitudes et des comportements qui doivent à présent être changés. L’identification du métier de chacun devient de plus en plus complexe puisque chacune des professions du droit et du chiffre tente d’élargir sans cesse son champ d’intervention et de nouveaux sites en ligne proposent des services juridiques à moindres coûts. Notre profession fait donc face à la nécessité de développer une offre de plate-forme numérique pour conseiller les demandeurs et nous affranchir d’un exercice dépendant de notre situation géographique.

Pouvez-vous détailler ces innovations numériques ?
P. E.
Nous avons créé un cloud privé de la profession d’avocat totalement sécurisé. Notre objectif est d’étendre le service du droit au plus grand nombre en facilitant l’accès professionnel à ses représentants.
Nous sommes également en cours d’élaboration d’un réseau de transmission d’entreprises avec les notaires et les experts-comptables. Enfin, sous l’impulsion du barreau de Paris, les avocats bénéficieront bientôt d’une plate-forme de partage des actions de groupe et plus largement de toute procédure civile pour fédérer les consommateurs. Le barreau de Nantes fait de même.
L’avocat doit bénéficier de toutes les clés pour aller conquérir les nouveaux marchés et répondre aux mieux aux besoins des entreprises et des particuliers.

La formation fait également partie de vos centres de préoccupation. Quelle politique engager pour les élèves avocats ?
P. E.
C’est notre devoir impérieux d’offrir aux futurs avocats une formation de grande qualité. Pour cela, nous devons continuer de discuter et de travailler avec les universités sur cette question de la formation. Nous souhaitons engager un travail de réflexion de concert entre les différents acteurs du droit, qu’ils soient professionnels ou universitaires. Le Conseil national du droit joue un rôle important dans cette dynamique. Depuis sa création en 2008, celui-ci permet des réflexions concrètes et des propositions globales sur l’enseignement du droit.


Pros recueillis par Pascale D’Amore, magazine Décideurs, et Capucine Coquand, Carrières-Juridiques.com
Copyright de la photo de Pascal Eydoux : Bryan du Halgouet

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