À la tête de l’Amrae depuis juillet 2020, Oliver Wild retrace ses premiers mois de mandat et nous livre ses ambitions. Il revient également sur le succès du premier événement 100 % digital de l’association qui s’est tenu début février 2021 au Studio Gabriel, avec pour thème d’actualité "La sagesse du risque pour l’immunité collective".

Décideurs. Comment s’est passée la passation de flambeau à la tête de l’Amrae avec Brigitte Bouquot ?

Olivier Wild. Elle s’est très bien passée. Nous avons beaucoup échangé en amont de la passation officielle et le fait que Brigitte Bouquot soit toujours membre du Comex – et j’en suis ravi – a permis d’assurer une excellente transition sur l’ensemble des thèmes que nous abordons au sein de l’association. Elle m’a également rapidement associé sur les sujets phares de l’Amrae : nous avons notamment décalé l’élection pour ne pas entraver les discussions engagées avec le ministère de l’Économie, qui se poursuivent d’ailleurs toujours. Il était important que nous ayons tous les deux le même niveau d’information et une même position claire de l’Amrae.

Que retenez-vous de ces premiers mois de mandat ? 

Ce n’est pas vraiment ce à quoi je m’attendais ! Nous avons tous été chahutés par les événements. Nous avons notamment dû reporter notre journée scientifique du printemps à septembre afin de la maintenir en présentiel, toujours dans le respect des règles sanitaires. Je me faisais un plaisir de rencontrer les adhérents et d’y effectuer ma première intervention en tant que président. Malheureusement, j’étais cas contact… J’ai ainsi dû m’isoler et faire mon discours d’ouverture en visioconférence. Pour ce qui est des "Rencontres", nous avions espoir de les tenir en présentiel. Nous avons travaillé dur sur deux scénarios : le présentiel et le digital. Nous avons retardé au maximum la prise de décision officielle… Nos partenaires et prestataires ont fait preuve d’une très grande souplesse, ce qui nous a permis de prendre la décision mi-novembre de basculer l’événement en digital. Notre objectif était clair : organiser le meilleur événement digital des douze derniers mois ! Nous nous sommes ainsi concentrés pour préparer deux belles journées, reprenant le principe des plénières, et transformer nos nombreux ateliers en plusieurs tables rondes. Les sujets déjà préparés que nous n’avons pas pu traiter au cours de cet événement le seront donc dans le cadre des "Jeudis de l’Amrae" sous le format de webinaires.

"La résilience et la résistance aux chocs sont très importantes pour une entreprise"

Quelles sont vos ambitions ?

Nous avons toujours le projet de fonder la "Maison de l’Amrae". Nous avons un temps arrêté notre recherche immobilière pour nous concentrer sur notre événement digital, mais nous sommes déterminés à créer un environnement plaisant dans lequel pourront se créer des interactions entre adhérents ainsi qu’entre adhérents et partenaires, de manière beaucoup plus fréquente. Nous recherchons des locaux plus attractifs et plus agréables pour l’équipe qui y travaille en permanence, mais également pour que nos adhérents puissent avoir accès à un bureau de passage lorsqu’ils sont sur Paris et que nous puissions accueillir des événements ainsi que donner des formations beaucoup plus fréquemment.

Concernant la formation justement, où en êtes-vous ?

Si nous avons augmenté le nombre de formations certifiantes avec des modules très techniques, sans pour autant oublier les soft skills, les fondamentaux de l’initiation à la gestion des risques (cartographie des risques, PCA, couvertures assurantielles) font toujours partie des basiques. Nous proposons plus de formations pour que nos adhérents puissent acquérir des compétences de gouvernance, par exemple savoir comment bien interagir avec le conseil d’administration ou le Comex. Ces sujets se sont accélérés avec la crise actuellement : le risk management se positionne à des niveaux différents de la prise de décision dans l’entreprise. Il est nécessaire d’avoir des outils de communication, mais également les bons comportements pour pouvoir convaincre les instances de gouvernance et de décision.

"Les Rencontres du Risk Management" ont cette année été transformées en un e-événement. Comment se sont passés ces deux jours de conférence ?

Nous sommes très contents des retours positifs reçus. Nous avons organisé un bel événement dont tous les adhérents peuvent être fiers. Nous avons ainsi appris qu’il n’était finalement pas si compliqué de préparer un événement digital et d’augmenter la qualité visuelle ! Nous étions en effet plus habitués à travailler sur le contenu des conférences. Au cours de ces deux jours, nous n’avons pas voulu traiter que de la crise du Covid, car les enjeux du risk management et des entreprises d’avant crise sont toujours bien présents. Nous avons donc traité les sujets concernant les entreprises responsables, le capital humain ou encore la résilience et les risques climatiques…

Grâce à cet e-événement, nous avons pu intéresser un public beaucoup plus large, et pas uniquement la communauté du risk management, dont les métiers de la finance et des ressources humaines, que nous avons habituellement du mal à attirer. C’est la flexibilité du digital ! Pour les rencontres de 2022, nous allons réfléchir au meilleur moyen de diffuser nos tables rondes sur Internet, tout en préservant l’attrait de se retrouver tous à Deauville pour échanger. Pourquoi ne pas organiser un événement digital en plus au cours de l’année ? Nous y pensons.

La crise sanitaire du Covid-19 n’est pas encore derrière nous. Néanmoins, quels premiers enseignements pouvons-nous en tirer ? Le risk management sortira-t-il renforcé de cette crise ?

Indéniablement ! Le risk management en sortira indéniablement renforcé, tout comme l’entreprise. Celles qui avaient déjà un risk management important ont mieux géré l’urgence en constituant des groupes de travail impliquant différents corps de métier, ce qui a ainsi pu casser les silos présents. Par sa fonction et son expérience, le risk manager travaille avec tout le monde dans l’entreprise et a donc aidé à l’animation de ces groupes. 

"Nous proposons plus de formations pour que nos adhérents puissent acquérir des compétences de gouvernance"

Au cours des derniers mois, j’ai eu de nombreux retours d’expérience de risk managers qui ont eu des interactions fructueuses avec des membres du Comex, alors qu’elles étaient auparavant plus faibles ou ponctuelles. Il faut profiter de ces relations créées pour développer une meilleure compréhension des acteurs dans l’entreprise et de ce qu’est le risk management, qu’il ne faut pas confondre avec la gestion de crise qui ne gère que ce qui est urgent et important. Chez Veolia par exemple, nous avons créé une cellule consacrée à l’anticipation au sein de laquelle nous parlons de sortie de la crise, de ce à quoi ressembleront les trois, douze voire dix-huit prochains mois ainsi que de la stratégie de l’entreprise.

Et pour les entreprises qui n’avaient pas encore un risk management mature ? 

De nombreux dirigeants d’entreprise de petite et moyenne taille se sont rendu compte que c’étaient eux les risk managers. Nous avons reçu de leur part beaucoup de questions et de demandes d’outils dès le début de la crise. Nous avons donc partagé de l’information sur le sujet, surtout de mars à juin 2020.

Le marché de l’assurance est depuis quelques mois assez secoué. Quel regard portez-vous dessus ?

Le marché de l’assurance a en effet été très touché par la crise sanitaire. L’Amrae a pu ainsi démontrer auprès du gouvernement sa capacité à réfléchir au-delà du sujet initial qui était de savoir s’il fallait créer un produit pandémie. La réponse est évidemment non : il faut un produit d’assurance sur tous les grands risques, car les entreprises sont de moins en moins bien assurées sur les risques exceptionnels et il est nécessaire de trouver une solution pérenne plutôt que de jeter de l’argent dans un fonds.

"Nous avons organisé un bel événement dont tous les adhérents peuvent être fiers"

Quel message souhaitez-vous envoyer aux entreprises en matière d’assurance ?

Il faut parler gestion des risques. Pour avoir une discussion constructive avec le marché de l’assurance, il faut soi-même bien comprendre ses risques et connaître la maturité de ses dispositifs de maîtrise des risques pour savoir ce qu’on est prêt à absorber. La résilience et la résistance aux chocs sont très importantes pour l’entreprise.

Et aux assureurs ? 

Il est essentiel qu’ils reconnaissent et comprennent le travail accompli en gestion des risques. Le courtier doit être présent comme animateur de la discussion pour aider à la compréhension de la qualité du risk management de son assuré client au marché de l’assurance. Ce dernier se tendait déjà énormément avant la crise sanitaire : on nous disait que c’était la fin d’un cycle… J’aimerais bien que les assureurs fassent eux aussi du risk management afin de mieux comprendre leurs assurés lorsqu’ils font face à une hausse brutale des tarifs d’assurance après des années de baisse… En 2019, il y avait des fissures dans le dialogue, et en 2020 une vraie fracture. Il faut maintenant que les trois partenaires – assureurs, assurés et courtiers – discutent de nouveau ensemble pour bien comprendre les contraintes de chacun. Je ne m’attends pas à ce que le marché change du tout au tout au renouvellement du 1er janvier 2022. Il va falloir que les augmentations des tarifs soient audibles pour les entreprises.

On parle en ce moment beaucoup des captives. Quel est votre regard sur le sujet ?

Nous avons poussé cette thématique, car cela fait partie de la stratégie de bonne gestion du risque. La captive est un formidable tableau de bord pour mesure l’efficacité de son risk management et de sa prévention. Mais une fois qu’on y a pris goût et qu’on maîtrise cet outil, on a un peu moins besoin de l’assureur qui ne va donc pas collecter beaucoup de primes, ce qui n’arrangera pas la situation non plus.

"Voir l'effet de la création de captives prendra du temps"

Il est donc nécessaire que le gouvernement accélère ses travaux et fasse maintenant rapidement des annonces sur le sujet des captives, de l’autoassurance ou encore des provisions réglementées qu’on puisse désormais s’appuyer sur des éléments concrets. Nous sommes assez impatients de rentrer dans les détails. À l’Amrae, nous recevons de nombreuses demandes sur la manière de créer une captive par exemple.

Quel est l’intérêt d’une captive pour l’État ?

Protéger l’épargne du citoyen. Mais ce que prévoit le gouvernement ce n’est pas uniquement de faciliter ou d’apporter de la souplesse à la création de captives, il y a clairement un objectif de provisions. Toutes les entreprises ne pourront pas créer une captive, mais le fait de pouvoir provisionner dans ses comptes permet plus de résilience et renforce tout le tissu économique.
L’idée est de donner cette opportunité à toutes les entreprises, de la plus petite à la plus grande afin de les responsabiliser, qu’elles soient moins dépendantes de l’État qui pourra ainsi investir de l’argent sur d’autres initiatives, par exemple pour sauver la jeunesse de demain. C’est un effort intellectuel très compliqué pour les petites entreprises qui ont déjà du mal à mettre de l’argent de côté pour provisionner pour une potentielle crise à venir. C’est probablement le plus gros défi en matière de culture de la gestion des risques. Tout est une question d’équilibre. Voir l’effet de la création de captives prendra du temps : c’est un système qui se développera sur les dix prochaines années. On ne crée pas une captive du jour au lendemain et on n’en comprend pas les rouages tout de suite. Il faut une certaine maturité.

Propos reccueillis par Margaux Savarit-Cornali

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