Profil atypique, ouverture internationale et culture du lâcher prise : Mark Rollinger, directeur juridique du groupe PSA Peugeot Citroën, bouscule les lignes à la direction juridique de PSA.

Décideurs. Lors de votre arrivée chez PSA il y a deux ans, quelle était votre principale mission??

 

Mark Rollinger. L’objectif était de travailler l’efficience de la direction juridique. Nous avons désormais cinq départements en lien avec l’activité de notre groupe?: un département amont (industrie et technologie), un département aval (commerce) et un troisième dédié au corporate. La direction juridique est internationale, les deux autres départements étant situés en Asie et en Amérique latine. Cette volonté d’internationalisation se retrouve d’ailleurs dans nos choix de nouveaux profils en France puisque nous avons recruté une juriste américaine. Nous sommes également très attentifs à la limitation des frais fixes. L’équipe est composée de cinquante juristes dans le monde, dont une trentaine en France. Cela fait moins d’un juriste par milliard de chiffre d’affaires annuel.

 

Décideurs. Vous avez aussi mis en place une organisation avec un minimum de hiérarchie.

 

M.?R. Effectivement, car la responsabilisation de chacun est une préoccupation essentielle. C’est pourquoi nous avons placé la polyvalence de nos juristes au cœur de notre organisation. De la même manière que lorsque j’étais avocat chez Cleary Gottlieb, je n’étais pas cantonné à un domaine de compétence particulier. Être polyvalent permet aux juristes d’accroître leurs compétences et leur employabilité. Cette pluridisciplinarité est également source de stimulation. Elle favorise la curiosité intellectuelle, le courage, et invite au lâcher prise.

 

Décideurs. Un juriste peut-il faire carrière chez PSA??

 

M.?R. Il existe différentes voies de carrière dans un groupe comme PSA. Nos juristes peuvent évoluer entre les départements juridiques en France et à l’étranger mais aussi dans le groupe. Un de nos juristes a ainsi quitté la direction juridique pour rejoindre la sphère commerciale de l’automobile puis est revenu superviser l’un des cinq départements. C’est une chance de pouvoir s’ouvrir à d’autres domaines et d’apprendre le lâcher prise, comme j’ai pu le faire durant trois ans chez Lafarge en tant qu’opérationnel, aux côtés de géologues et d’ingénieurs. D’autres font maintenant carrière dans les RH et la finance chez nous.

Nous veillons aussi au bien-être de l’équipe. Nous avons développé le télétravail et privilégions les méthodes de travail collaboratives en interne avec l’utilisation d’un sharepoint. La proximité de notre équipe avec les opérations du groupe est cruciale. Toute la direction juridique a par exemple rencontré l’ingénieur à l’origine de la technologie Hybrid Air et a aussi découvert la Citroën Cactus qu’elle a pu tester en avant-première dans les rues de Paris?!

 

Décideurs. Votre direction juridique agit d’ailleurs pour l’autonomie des opérationnels. En quoi cela consiste-t-il??

 

M.?R. Nous sommes partis du constat qu’il n’est pas nécessaire de mobiliser des juristes hautement qualifiés pour certaines typologies de contrats et pour le contentieux de masse, à faible enjeu économique et dont les variables ne changent pas. Nous avons donc formé les opérationnels au fonctionnement et à l’utilisation d’un kit «?do it yourself?» leur permettant d’intervenir seuls. Ils ne font appel à nous que lorsque le dossier s’éloigne du champ prédéfini par nos soins.

De ce fait, les ressources rares que représentent les juristes sont réservées pour des dossiers stratégiques, nécessitant une implication intellectuelle forte. Nous ne nous tournons d’ailleurs vers les cabinets d’avocats que lorsqu’une affaire exige une compétence pointue. Nous recherchons sans cesse le bon dosage entre la gestion interne et les cabinets, où le rapport qualité-prix est primordial.

 

 

Propos recueillis par Pascale D'Amore et Alice Mourot

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