L’ancien président de la Banque centrale européenne, considéré comme le sauveur de l’euro, publie une tribune dans le Financial Times. Pour lui, pas de doute à avoir : les gouvernements doivent absorber le choc économique.

« Whatever it takes. » Depuis qu'il a prononcé ces trois mots en 2012 au moment de la crise des dettes souveraines, et alors qu’il était président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi est considéré comme le sauveur de l’euro. En promettant de tout faire pour préserver la monnaie unique, l’Italien calma les marchés et fit redescendre la pression qui pesait alors sur les pays. Que pense de la crise liée au Covid-19  celui qui fut surnommé « Super Mario » ? Réponse dans une tribune publiée mercredi 25 mars dans le Financial Times.

Réponse étatique sans commune mesure

Mario Draghi se garde bien de faire mention du travail de son successeur, Christine Lagarde, dont les premiers pas ont pu être critiqués et qui depuis a redressé la barre avec des mesures exceptionnelles. Il n’hésite, en revanche, pas à donner son avis sur la manière dont les gouvernements doivent gérer cette crise. Pour lui, aucune tergiversation n’est possible : « La question essentielle n’est pas de savoir si, mais comment l'État doit faire bon usage de son bilan. ». Et d’expliquer qu’« il appartient à l'État de déployer son bilan pour protéger les citoyens et l'économie contre les chocs dont le secteur privé n'est pas responsable et qu'il ne peut pas absorber. »

Si des subventions pour le travail et au chômage sont déjà en place, c’est surtout la protection des emplois et de la capacité de production en cette période de perte de revenus qui « exige un soutien (global) immédiat des liquidités ». « Les banques doivent rapidement prêter des fonds à un coût nul aux entreprises », ajoute Mario Draghi. D’où l’intérêt des crédits garantis par les pays, comme ceux mis en place en France et l’assouplissement des normes réglementaires afin que les établissements financiers disposent de la marge nécessaire pour agir.

Ne surtout pas hésiter

Une fois ce soutien en place, que se passera-t-il si les entreprises ne peuvent rembourser leurs prêts ou si elle ne dégagent pas assez de bénéfices pour investir ? « Soit les gouvernements indemnisent les dépenses des emprunteurs, soit ces emprunteurs feront faillite et la garantie sera remboursée par le gouvernement », prévient Mario Draghi. Dans les deux cas, les États mettront la main à la poche, même si cela coûtera moins dans la seconde alternative.

La première option est, en revanche, meilleure pour l'économie. « Le niveau de la dette publique aura augmenté. Mais l'alternative - une destruction permanente de la capacité de production et donc de l'assiette fiscale - serait beaucoup plus dommageable pour l'économie », poursuit l’ancien patron de la BCE. Pour lui, l’Europe est équipée pour faire face à cette crise mais un changement de mentalité est nécessaire, comme il le serait en temps de « guerre ». « Le coût de l'hésitation peut être irréversible, martèle Mario Draghi. Le souvenir des souffrances des Européens dans les années 1920 suffit à nous mettre en garde. » Cette tribune prend la forme d’un appel à la mobilisation des gouvernements et des banques. À eux de s’approprier le « whatever it takes ».

Olivia Vignaud

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