Le volet RSE de la loi Pacte, adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale le 9 octobre dernier, a pour ambition d’inciter les entreprises françaises à évoluer vers un capitalisme socialement responsable. Suivront-elles ?

« Réconcilier les Français et l’entreprise, et créer un capitalisme à l’européenne.» C’est en énonçant ces objectifs que Roland Lescure, président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, ouvrait au printemps dernier la session d’auditions préalables aux débats sur le projet de loi. Pour amorcer le mouvement, le gouvernement mise sur l’intégration dans le corpus législatif français de l’obligation pour les entreprises de tenir compte des principes de la  responsabilité sociale et environnementale (RSE). La démarche est conforme aux recommandations ­formulées par Jean-Dominique Senard, dirigeant du groupe Michelin, et Nicole Notat, ancienne secrétaire générale de la CFDT et présidente du cabinet Vigeo Eiris, dans le ­rapport remis au gouvernement au printemps 2018.

Prise en considération

Dans son article 1833, le Code civil définit sobrement l’objet social : «Toute société doit avoir un objet licite et être constituée dans lintérêt commun des associés.» Le projet de loi Pacte prévoit d’y ajouter qu’il doit également «prendre en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité». Le code de commerce évoluera également afin de donner au conseil d’administration la possibilité de déterminer les orientations de l’activité de la société «conformément à son intérêt social, en considérant ses enjeux sociaux et environnementaux.»

Les organisations patronales appelaient le gouvernement à renoncer à cette mention et à se contenter de ce que la soft law – le code Afep Medef principalement – prévoyait déjà. Ils invoquaient le risque juridique que ce texte ferait peser sur les entreprises. «Nous sommes incapables de démontrer la portée de ces modifications, s’inquiétait Michel Guilbaud, directeur général du Medef, devant la commission des affaires économiques. Le juge va les interpréter et cela va multiplier les contentieux.» Lors de l’examen du texte en commission en septembre dernier, Bruno Le Maire, qui porte le projet de loi, a écarté l’objection. «Nous demandons simplement à lentreprise destimer les conséquences sociales et environnementales de ses choix avant de prendre ses décisions, ni plus ni moins, a-t-il expliqué. L’expression " en prenant en considération" ne permet pas de faire référence à l’intérêt des parties prenantes à l’entreprise. Par conséquent, elle ne saurait servir d’accroche à un recours juridique.» 

Raison d’être

Difficile à ce stade de prédire les effets de la nouvelle définition de l’objet social. Puisqu’elle est sans risque pour l’entreprise d’après l’exécutif, faut-il en déduire qu’elle a peu de portée ? Plusieurs groupements agissant pour la promotion de la RSE restent à ce stade sur leur faim. Toutefois, le but recherché est avant tout de donner une impulsion. «Nous avons voulu un concept qui consacre la dynamique qui est engagée et que nos recommandations provoquent une accélération», déclarait Nicole Notat à la commission des affaires économiques. Aux entreprises maintenant de se saisir de cette nouveauté et de lui donner corps. Elles pourront aller plus loin puisque l’article 1835 du Code civil sera également amendé pour permettre à celles qui le souhaitent de se doter d’une «raison d’être» dans leurs statuts. Certains groupes y réfléchissent déjà.

Miser sur la volonté des entreprises de s’inscrire dans une démarche de long terme, c’est le pari de l’exécutif. Bruno Le Maire est convaincu de la pertinence de l’approche : «Si une entreprise demain veut être profitable, reconnue par nos concitoyens, la raison d’être va devenir un passage obligé, pour mobiliser les salariés, les fournisseurs, les clients, les actionnaires autour d’un objectif commun», déclarait-il au site Prophil. Reste à savoir si, dans les faits, les entreprises répondront à l’élan vers un capitalisme responsable.

Marie-Hélène Brissot

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