Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ont tenté de se servir de la colère de la France périphérique pour assouvir leurs ambitions personnelles. C’est raté. Une liste de gilets jaunes risque de leur faire subir une défaite cinglante aux européennes.

C’était une rumeur tenace, elle est désormais officielle depuis le 24 janvier. Une liste de gilets jaunes se présentera très probablement aux élections européennes. Baptiséé Ralliement d'initiative citoyenne (RIC); elle a pour tête de liste, Ingrid Levavasseur, une aide-soignante de 31 ans qui pourrait bien se retrouver propulsée au Parlement européen. Le mouvement est en effet crédité de 13% selon un sondage Elabe. Bien plus que 5%, le seuil minimal pour envoyer un représentant.

Sitôt rendue publique, cette initiative a provoqué deux réactions majeures dans les médias et sur les réseaux sociaux : elle ne représenterait pas les gilets jaunes et elle serait favorable à la liste LREM. Vrai dans les deux cas. Si les gilets jaunes radicaux (Drouet, Maxime Nicolle et consorts) ne sont pas sur la liste, il en est de même pour les figures modérées du mouvement telles que Jacline Mouraud, Benjamin Cauchy ou Cédric Guémy qui occupent les médias (autant voire plus que les rond-points) depuis plusieurs mois. Mais elle pourrait suffire à fragmenter encore plus l’opposition au président.

Cette nouvelle liste marque surtout un camouflet pour les deux principaux partis populistes. Depuis cet automne, Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen ne ménagent par leur peine. Ils n’ont eu de cesse d’attiser les braises et de tenter de récupérer le mouvement. Le député de Marseille a utilisé sa position de « personne sacrée » pour décrire sa fascination pour Éric Drouet. Un homme qui a notamment appelé à marcher sur l’Élysée. De son côté, Marine Le Pen est allée plus loin en déclarant le 20 janvier : « Les gilets jaunes c’est nous. » Et leurs militants occupent le terrain pour porter la bonne parole auprès des gilets jaunes à coups de slogans et de fake news.

Romantisme révolutionnaire ou calculs politiciens ?

Ne nous leurrons pas derrière ce romantisme révolutionnaire de salon, les deux leaders pensaient davantage à des calculs politiciens qu’au sort de nos concitoyens qui peinent à boucler les fins de mois et qui perçoivent le futur avec angoisse… L’idée de ces tribuns était on ne peut plus simple : déstabiliser le gouvernement voire les institutions de la Ve République pour provoquer une dissolution de l’Assemblée nationale et, pourquoi pas, une démission d’Emmanuel Macron.

Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ont joué avec le feu. Ils sont punis.

Mais les choses ne se sont pas passées comme prévu. Les gilets jaunes ont dit « niet » à ces tentatives grotesques. Pire encore, ils se sont saisis des règles démocratiques pour présenter leur propre liste. Et selon le sondage Elabe, elle devrait donner des sueurs froides aux deux attiseurs de haine qui voient leur fonds de commerce grignoté.

Longtemps au coude à coude avec LREM, la liste RN menée par l’inconnu Jordan Bardella passerait de 20,5% à 17,5%. Loin derrière les macronistes qui sont crédités de 22,5% des suffrages. Du côté mélenchoniste, c’est également la soupe à la grimace. Les intentions de votes sont en baisse constantes depuis septembre. Elles décrochent encore, passant de 9,5% à 8%. L’effet Manon Aubry, tête de liste censée donnée une image ouverte et progressiste du mouvement est pour le moment inexistant. Et ne parlons même pas de Debout La France. Le mouvement de Nicolas Dupont-Aignan passe de 5% à 3,5% d’intentions de vote. Jean-Luc Mélenchon et Marine le Pen ont joué avec le feu. Ils risquent d’être triplement punis : des scores plus faibles qu’espéré aux européennes, un gouvernement victorieux et des institutions renforcées.

Lucas Jakubowicz (lucas_jaku)

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