Alors que les observateurs se réjouissaient du franchissement du seuil de 11 000 euros par mètre carré, les prix de l’immobilier parisien ont légèrement décru en ce mois de juillet, de quoi combler les acquéreurs, mais pas que. Décryptage des mécanismes qui engagent ces variations et retour sur l’emballement que génèrent les hausses.

À la faveur de la prolongation du déséquilibre entre l'offre et la demande, et en dépit des pulsions rurales des citadins français, les prix de l’immobilier des métropoles françaises, Paris en tête, ont poursuivi leur progression au gré des confinements successifs, dans un enthousiasme presque général. Selon Meilleurs Agents, les prix de l’immobilier parisien ont finalement accusé une légère baisse le mois dernier (-0,3 %) quand tout le monde s’inquiétait le trimestre précédent de la seule décélération de sa progression (+0,3 % sur les trois mois précédents) après une augmentation de 27,8 % sur les cinq dernières années.

Pourquoi les prix flambent ?

L’accès à la propriété, facilité par des taux d’emprunt ridiculement bas et une demande largement supérieure à l’offre, est devenu un acte dans lequel le vendeur perpétue l’arnaque à laquelle il a été confrontée à l’acquisition. Schématiquement, le propriétaire, avec le concours calculé de son agent, sélectionné sur sa seule approbation d’un prix de vente qu’il juge lui-même délirant, met son bien sur le marché moyennant le prix auquel il l’avait acquis ainsi qu’une plus-value généreuse et spéculative basée sur les prix des appartements vendus alentours. Généralement, son propre appartement est un peu mieux que les autres, donc le prix est instinctivement gonflé de cette appréciation forcément subjective. Les sites recensant les dernières ventes immobilières par quartier finissent de conforter le propriétaire dans son rôle d’estimateur de son propre bien. La forte demande rend le vendeur puissant et la négociation dérisoire. L’appartement aura donc été cédé à un montant supérieur à sa valeur théorique de marché, dans une compétition stimulée par des taux d’emprunt historiquement bas. La hausse des prix de l’immobilier se retrouve engoncée dans la dynamique inconsciente qu’elle crée : comme les prix augmentent, les propriétaires en déduisent que la valeur de leur bien augmente, et s’attachent fermement à la plus-value qu’ils ont eux-mêmes concédée au vendeur lors de leur achat.

La hausse de la valeur vénale du mètre carré produit, nécessairement, la hausse des valeurs locatives, et, immanquablement, la hausse des produits de consommation

Pourquoi s’en réjouir ?

À y réfléchir raisonnablement, rien n’appelle quiconque à se réjouir de la hausse des prix de l’immobilier. Cet appartement vendu trop cher ne devrait pas, théoriquement, constituer un motif de fierté, de satisfaction ou une prétention prophétique de son propriétaire, du simple fait qu’il va s’exposer à un achat plus cher, selon les mêmes mécanismes ineptes qui l’ont conduit à vendre son appartement trop cher. De surcroît, cette vente participe à la dynamique inflationniste du marché de l’immobilier, qui déclenche, fatalement, une hausse des valeurs locatives du quartier et, par effet boule de neige, la hausse du coût de la vie. En d’autres termes, l'augmentation de la valeur vénale du mètre carré produit, nécessairement, celle des valeurs locatives, et, immanquablement, la hausse des produits de consommation, car, de manière systémique, les commerces requièrent un business model bénéficiaire. En outre, le pouvoir d’achat n’accompagne, en aucun cas, ces surévaluations immobilières.

Si l’exode urbain attendu n’aura vraisemblablement pas lieu, ou en tout cas, pas dans les proportions promises, les quelques mouvements consécutifs de la crise sanitaire auront finalement eu raison de l’ascension débridée des prix de l’immobilier parisien. Il faudra néanmoins un peu plus de temps et de désir d'ailleurs pour retrouver des prix déjà considérés comme indécents dix ans en arrière.

Alban Castres

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