Avec trente-quatre bureaux sur les cinq continents, Clifford Chance confirme son ambition globale
Avec trente-quatre bureaux sur les cinq continents, Clifford Chance confirme son ambition globale. Sa stratégie de développement, fondée sur une croissance interne conjuguée à des opérations d’absorption, mène la firme à haut niveau d’intégration. L’ouverture d’un bureau à Casablanca en est le dernier exemple.

Le niveau de performance atteint par Clifford Chance, avec un chiffre d’affaires de 1 438?millions d’euros en 2011, ne repose certainement pas sur… la chance ! La firme est présente sur le marché depuis plus de deux cents ans et elle occupe le rang de premier cabinet anglais en termes de chiffre d’affaires. Carrefour, BNP Paribas, Natixis, EADS Airbus, Deutsche Bank, Carlyle Group, Société générale, Siemens, etc. Tant de références qui font confiance à la marque Clifford Chance et à sa forte identité bâtie au fil de son histoire.

La mobilité pour moteur
L’expansion de la firme est un savant mélange d’opportunisme et d’esprit visionnaire. Le cabinet est né à Londres au début du XIXe?siècle sous l’impulsion d’un homme, Anthony Brown. La structure deviendra un acteur majeur à la fin des années 1980, au moment où le métier d’avocat est en pleine mutation. La fusion de Coward Chance et Clifford Turner en 1987 place ainsi la nouvelle firme en haut de l’affiche. Elle est aujourd’hui la première représentante du fameux Magic Circle. Clifford Chance s’impose dans ses matières phares, sur ses métiers d’origine : le droit bancaire et financier, le droit immobilier et le droit commercial.
Ce positionnement précoce sur le droit financier pousse naturellement hors des frontières du pays. Le développement à l’international de Clifford Chance s’est opéré dans un premier temps par transfert d’associés à l’étranger. Plusieurs bureaux comme Bruxelles (1968), Amsterdam (1972) ou Tokyo (1974) sont nés de la mobilité des équipes, poussées par la clientèle britannique. Ils ont débuté leur activité «?avec des dossiers de divorce et des touristes anglais?», s’amuse Yves Wehrli, managing partner de Clifford Chance Paris, pour arriver aujourd’hui à un très haut niveau d’expertise et de reconnaissance.
Clifford a également bénéficié de coups d’accélérateur qui ont entraîné des pics de développement, comme l’entrée du Royaume-Uni dans le Marché commun et le boom des investissements immobiliers en France au début des années 1970. Puis, à l’aube des années 1990, la globalisation des marchés prend forme et les demandes des clients deviennent de plus en plus complexes. Dans ce contexte international, la croissance organique ne suffit plus à répondre de manière satisfaisante aux exigences des clients. Clifford entame alors une nouvelle phase de son développement en faisant le pari audacieux de la fusion.

L’attrait de la fusion
D’abord il y eut Madrid en 1980. Aujourd’hui star du M&A et à la pointe de l’expertise en finance, le bureau a été dilutif – en dessous du seuil de profitabilité moyen – durant une dizaine d’années. L’activité a été soutenue dans le temps par un plan élaboré sur le long terme.
Pour affirmer sa présence aux États-Unis et en Allemagne, Clifford emploie les grands moyens. L’opération menée en janvier?2000 est inédite sur le marché du droit avec une fusion tripartite : Clifford absorbe l’allemand Pünder Volhard Weber & Axster et l’américain Roger & Wells. Cette fusion donne naissance au premier cabinet global intégré. «?La fusion tripartite de 2000 était très agressive en termes de choc entre les cultures et les méthodes de travail, notamment entre Londres et New York?», commente Yves Wehrli. En effet, la firme tente le pari fou de faire adopter par des avocats américains le système du lockstep très répandu dans les cabinets britanniques. Ici réside l’élément phare de la réussite d’une fusion transatlantique, celui en raison duquel tant échouent. «?Il a été difficile de faire adopter par nos associés américains notre mode de rémunération basé sur une répartition équitable des bénéfices. Beaucoup sont partis. Mais nous sommes convaincus que cet élément fait aussi partie intégrante de notre identité à laquelle nous sommes tous attachés?», poursuit Yves Wehrli (lire l’interview de David Childs).
Grâce à la réussite de ces fusions, Clifford Chance se convainc de l’efficacité de sa stratégie de croissance par absorption. La stratégie de la firme sera donc à présent mêlée de croissance externe et de croissance organique.

Une expansion rapide
L’expansion se fait tous azimuts et la firme conquiert les zones stratégiques. Clifford ne crée pas de bureau satellite ; il vise au contraire à devenir rapidement un acteur majeur sur le marché qu’il investit. Les opérations récentes le démontrent. En 2011, Clifford s’installe en Australie à la suite de la double fusion avec deux cabinets locaux : Chang Pistilli & Simmons à Sydney et Cochrane Lishman Carson Luscombe à Perth. L’opération fait gonfler le partnership de quatorze nouveaux associés et implante la marque Clifford Chance grâce à des compétences déjà reconnues sur ce marché. Si l’Australie était jusqu’à récemment autonome et autosuffisante en termes de structures et de clientèle, elle constitue aujourd’hui un marché ouvert vers l’Asie. La firme marque ainsi son réel investissement dans la zone Asie Pacifique. À tel point que le marché lance des rumeurs, telles que celle du rapprochement avec le cabinet pékinois Broad & Bright, aussitôt démenties par le haut management.
Enfin, le dernier-né, Casablanca, a ouvert ses portes en janvier?2012 sous l’impulsion de l’équipe parisienne. La structure, dirigée par Mustapha Mourahib, devient la porte d’entrée directe de Clifford Chance sur le continent africain. Elle est aussi l’expression de la réussite de l’african desk qui regroupe plus de deux cents avocats dans seize bureaux différents. Avec ce dernier bureau, Clifford Chance passe du rang de cabinet international à celui de cabinet global puisque la firme est présente sur les cinq continents.
Mais Clifford ne s’arrête pas là. La firme vient d’annoncer qu’elle n’attendait plus que l’autorisation du ministère de la Justice pour ouvrir son bureau coréen, pays dans lequel le cabinet développe une activité depuis plus de trente ans.

La rançon de la gloire
Cette expansion inclut aussi quelques remises en question. La stratégie de la firme – anticiper les besoins de ses clients et évaluer l’avenir d’un marché en construction – la conduit nécessairement à quelques faux pas. Lorsqu’un nouveau bureau ne s’avère pas porteur de dossiers et que l’équipe ne parvient pas à supporter les coûts fixes, ou que l’interaction entre les équipes est inefficace, Clifford Chance n’hésite pas à faire marche arrière. Dans les années 1980, les bureaux ouverts au Vietnam et à Bahreïn ou plus tard en Hongrie ont été fermés. L’anticipation induit la prise de risque que ne craint pas Clifford Chance. La solidité de ses bureaux moteurs et l’efficacité générale des nouveaux bureaux souvent pionniers sur le marché servent de filet de sécurité.
Aux États-Unis également, les débuts ont été très poussifs. Durant quasiment dix ans, les bureaux outre-Atlantique n’ont pas été aussi rentables qu’en Europe. D’autant plus que la portabilité de la clientèle américaine est très forte. Tout départ d’associé est donc une perte sèche de chiffre d’affaires. Mais la marque s’est imposée peu à peu, plusieurs associés continentaux ont été détachés à New York pour favoriser l’intégration des avocats, et aujourd’hui, les effectifs sont redevenus stables. Même la facturation a été lissée à travers le monde. Les États-Unis (et São Paulo qui en dépend) représentent à présent environ 12?% du chiffre d’affaires global de la firme.
Gérer un haut niveau de globalisation
Parvenue à un tel niveau de globalisation, la firme a mis en place des outils pour garantir la bonne intégration des nouvelles équipes, essentiellement pour les bureaux issus d’opérations de fusion. C’est parfois une centaine d’avocats qu’il faut intégrer au fonctionnement du groupe. Les outils informatiques quotidiens ont été mis à jour et déployés pour une meilleure harmonisation entre les bureaux (archivage électronique, Internet, visioconférence, etc.). Les outils de knowledge management ont été rendus plus accessibles et plus fluides. Un centre de services partagés en Inde a ainsi été créé en 2007. Opérationnel sept jours sur sept, jour et nuit, il traite d’un certain nombre de fonctions administratives dans un souci de meilleure rentabilité. Par ailleurs, le programme de corporate social responsibility porte maintenant ses fruits (lire également l’interview de David Childs à ce propos).
La force de Clifford Chance tient donc à sa globalisation avancée et à son haut niveau d’intégration. La marque induit une capacité à mobiliser ses équipes pour des interventions de masse sur des affaires imposantes. Le dossier Nordstream est un bon exemple : 38 banques, 11 sponsors/actionnaires, 45 avocats dont 7 associés, 8 bureaux impliqués, 4 juridictions, le tout finalisé avec 50 signataires pour 68 documents différents sur deux jours de signature.

Le cabinet se relève de la crise
Si tout semble solide chez Clifford Chance, la crise a en réalité eu des conséquences importantes sur la firme au même titre que pour la majorité des cabinets d’avocats d’affaires. Clifford Chance l’a simplement gérée à sa manière. L’identité peut alors devenir un élément fondamental de la résistance aux difficultés économiques. C’est aussi une démarche qui guide les compor­tements dans ces moments difficiles. D’autant plus compliqués que les métiers de la banque et de la finance, qui constituent le socle de l’activité avec quasiment 60?% du chiffre d’affaires global, sont lourdement touchés par la crise financière de 2008. Clifford se sépare alors de cent associés. Les décisions sont prises par consultation de la base, de chacune des équipes dans chacun des bureaux, pour être ensuite validées par le comité exécutif. Des audits de la performance respective de chaque groupe et de chaque associé sont réalisés pour aboutir à un consensus. La procédure prend du temps, à tel point que les critiques du marché pointent l’incapacité de la firme à se restructurer. Il s’agit en réalité d’une réorganisation profonde des équipes, réfléchie et mesurée, qui assurera de solides bases pour la seconde vague de difficultés qui s’annoncent.
En 2011, la crise de la dette touche donc moins Clifford, qui a largement travaillé sur les coûts et consolidé ses métiers. La firme affiche même une croissance de son chiffre d’affaires. Yves Wehrli explique cette force par plusieurs facteurs : «?La crise ramène naturellement les opérations vers les grandes signatures, nous avons recruté des pointures dans plusieurs bureaux, nous avons créé un relais de croissance, nos associés consacrent une large part de leur temps à l’étranger et enfin nous nous sommes illustrés sur plusieurs dossiers phares, notamment la création du Fonds européen de stabilité financière. Ces éléments font notre force face à la crise qui sévit sur la plupart des marchés.?»

Serein pour l’avenir
Pour maintenir son haut niveau et poursuivre sa croissance, Clifford Chance entend conserver sa stratégie d’anticipation. Tout groupe de practice dans chacun des bureaux est amené à réfléchir sur une perspective d’avenir sur cinq ans. Rien de mieux pour anticiper les difficultés et lier le sort de la firme à celui de chacun de ses membres. Mais surtout, l’avenir de Clifford Chance se tourne une nouvelle fois vers les États-Unis. D’abord directement sur le territoire américain, puisque sa présence est encore insuffisante en matière de couverture de produits. Mais aussi et surtout en ce qui concerne la concurrence sur le marché international. Sur le plan global, Clifford Chance occupe la cinquième place au niveau mondial. L’enjeu se situe donc sur la stratégie internationale, comme l’explique Yves Wehrli : «?Les grands cabinets d’avocats doivent faire face à une réalité : beaucoup d’investissements stratégiques se situent aujourd’hui non pas en Europe mais en Asie. Les cabinets européens, contrairement aux américains, ont très tôt investi dans cette région, prenant ainsi une avance sur leurs concurrents américains. Pour rattraper leur retard, il semble que beaucoup de cabinets américains intensifient aujourd’hui leurs efforts en délaissant le marché continental européen. Cela explique que beaucoup de cabinets américains présents en Europe, aussi performants soient-ils, ne connaissent pas la croissance des cabinets anglais.?» Tous les atouts sont maintenant du côté de Clifford Chance.

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