Les initiatives philanthropiques se multiplient au sein des fonds d’investissement. Pour amener des financements à des associations qui en manquent cruellement, mais aussi et surtout pour structurer un secteur qui doit faire face à des défis sociaux et sociétaux toujours plus difficiles à relever.

Le secteur associatif français n’est pas un "petit" domaine d’activité qui ne concernerait que les femmes au foyer ou les retraités souhaitant occuper leur temps. Il emploie près de deux millions de personnes, et traite de problématiques d’intérêt général cruciales dont l’État s’est peu à peu désengagé, laissant ces associations face à une responsabilité énorme. C’est à elles qu’incombe le devoir de sauver des enfants en échec scolaire, de réinsérer des détenus, d’accompagner des familles de malades, d’œuvrer pour le climat...

Une responsabilité compliquée à assumer quand on sait que 65 000 associations sont en grande difficulté financière. Mais pas seulement. L’associatif peine à recruter des talents, tant les salaires y sont peu attractifs. Ce secteur souffre encore d’une image d’amateurisme qui désemployabilise ceux qui souhaitent s’y investir quelques années. Ils peinent à retrouver leur place dans un secteur privé encore très condescendant vis-à-vis du secteur social. C’est très injuste, mais peut-être pas totalement injustifié… Le mode de fonctionnement et de management des associations a parfois 30 ans de retard sur les entreprises : combien n’ont pas de système d’informations, combien peinent à gérer leur trésorerie, combien n’ont jamais rédigé un plan stratégique ?

À ce discours, il pourra être rétorqué : "dans les associations, on ne parle pas de produits, ou de services mais de bénéficiaires. On n’évoque pas le profit mais l’impact". Bien sûr les associations ne sont pas des entreprises, et la culture y est différente. Mais les mentalités changent et les dirigeants d’associations le savent bien : le secteur doit se structurer, se professionnaliser. Pour être plus efficace car les causes qu’ils traitent sont trop importantes pour être traitées avec les moyens du bord.

Pour professionnaliser ce secteur, les fonds de private equity peuvent jouer un rôle majeur : apporter des financements aux associations bien sûr, mais surtout, en tant que professionnels de l’investissement, mettre à profit leur savoir-faire en termes de développement, de réduction des coûts, de mise en place d’indicateurs de performance dans des organisations qui peinent à se déployer.

Il n’est évidemment pas question qu’ils deviennent des "actionnaires", les associations tiennent trop à leur indépendance, mais en tant que financeurs ils peuvent jouer un rôle crucial pour professionnaliser ce secteur, le rendre plus efficace et plus attractif.

Quelques fonds ont déjà compris la place qu’ils doivent prendre et ont monté des fonds de dotation philanthropiques, certains abondés directement par les deniers personnels des équipes d’investissement. Quelques exemples : Raise, pionnier dans ce domaine, ArchiMed (qui a reversé 3 millions d'euros à sa fondation Eureka, Ardian (dont la Fondation œuvre pour l’éducation des jeunes défavorisés), Geneo (1/3 du carried interest des équipes est dédié à des actions philanthropiques), ou encore Eurazeo (également engagé dans l’éducation). Ces initiatives resteront-elles isolées ou les fonds private equity ont-ils vocation à incarner le nouveau visage de la philanthropie française ?

Caroline Bossan-Torset

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