Les législatives se succèdent et la droite voit son influence inexorablement réduite à l’Assemblée nationale. Seul moyen de peser : jouer le rôle de parti charnière si Emmanuel Macron n’obtient pas la majorité absolue. Naguère au centre de la vie politique, LR pourrait se muer en force d’appoint. Changement de culture en perspective.

C’est un grand classique des soirées électorales. À la télé et à la radio, les représentants des partis politique font étalage d’éléments de langage pour critiquer leurs adversaires et mettre en avant leurs performances même lorsqu’elles sont moyennes. Le 12 juin au soir, les orateurs de LR ont respecté la tradition en clamant qu’avec un peu plus de 11% des suffrages, le parti fait plus du double de son résultat du premier tour de la présidentielle, preuve de son ancrage local. Peut-être. Mais certaines données chiffrées font froid dans le dos et confirment un statut de parti en déclin.

Érosion de sièges

Les résultats des élections législatives depuis vingt ans prouvent que les héritiers du gaullisme ne sont plus conquérants. Les années passent et les sièges détenus au Palais-Bourbon se réduisent : 398 députés en 2002, 345 en 2017, 196 en 2012, 100 en 2017. Les projections pour la nouvelle législature accordent à LR entre 50 à 80 sièges. Le 12 juin au soir, le parti dirigé par Christian Jacob était en tête dans seulement 42 circonscriptions et présent au second tour dans 71.

La droite avait 398 députés en 2002, 345 en 2017, 196 en 2012, 100 en 2017. Et entre 50 et 80 dans la prochaine législature selon les projections

Pertes de bastions et de grands noms

Plus préoccupant encore, LR est en difficulté dans certaines zones qui, auparavant, faisaient figure de bastions imprenables.  Dans l’ancien fief de Nicolas Sarkozy, la sixième circonscription des Hauts-de-Seine, Les Républicains ne figurent pas au second tour qui opposera la ralliée à la macronie Constance Le Grip à la Nupes. Dans l’ouest parisien, Francis Szpiner et Brigitte Kuster partent en ballotage défavorables face aux marcheurs Benjamin Haddad et Astrid Panosyan-Bouvet. Le 19 juin, la droite pourrait ne plus avoir de députés dans la capitale pour la première fois de son histoire. Dans la cinquième du Vaucluse, Julien Aubert, figure de l’aile droite du parti, est éliminé dès le premier tour et arrive en quatrième position. Dans la première de l’Yonne, Guillaume Larrivé réputé Macron-compatible n’accède pas au second tour.

Merci aux anciens et aux jeunes pousses

Malgré tout, certains députés très bien implantés dans des circonscriptions majoritairement rurales arrivent à tirer leur épingle du jeu et à distancer LREM et le RN pourtant devant lors du premier tour. Ainsi dans le département de la Haute-Loire, chasse gardée de Laurent Wauquiez, les sortants Isabelle Valentin et Jean-Pierre Vigier sont à 45,7%. Dans le Doubs Annie Genevard est bien partie pour se faire réélire (42% au premier tour). Marc Le Fur, inamovible patron de la droite bretonne et député depuis 2002 est en position de force pour conserver son siège (40,7%).

D’autres jeunes députés réalisent de belles performances alors que la Macronie souhaitait les "abattre". Citons notamment Fabien Di Filippo, "meilleur" candidat LR avec 46% en Moselle ou encore le vice-président du parti Aurélien Pradié dans le Lot (45%). Julien Dive, dans l’Aisne, Virginie Duby-Muller en Haute-Savoie sont favoris, tout comme les trentenaires Raphaël Schellenberger dans le Haut-Rhin ou Pierre-Henri Dumont dans le Nord. Leur tâche à l’Assemblée sera d’éviter la marginalisation de leur parti.

Si Emmanuel Macron obtient une majorité relative, LR pourra accroître son influence

Parti d’appoint ?

Pour LR, les choses sont claires : si Ensemble obtient la majorité absolue, le mouvement risque la marginalisation progressive et peinera à être influent dans l’hémicycle. Cependant, le parti représenté par Valérie Pécresse lors de la dernière élection présidentielle pourrait paradoxalement jouer un rôle central malgré un nombre de députés qui n’a jamais été aussi bas. Si la majorité macroniste est relative, le président de la République aura besoin d’une force "d’appoint" pour faire et défaire des lois. Seuls Les Républicains pourront remplir cette mission. Et ils devraient faire payer le prix fort. En somme, tout indique que LR jouera le rôle de parti "petit mais influent" auquel il est peu habitué. Un changement de culture puisqu’il ne jouera plus dans la cour des grands. Mais il n’a pas le choix.

Lucas Jakubowicz

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