Amber Capital souhaite évincer Arnaud Lagardère de son empire médiatique, remettant principalement en cause sa mauvaise gestion, et en particulier ses investissements dans le sport. La cession de Lagardère Sports à HIG Capital sonne comme un aveu d’échec afin de s’accorder les faveurs des actionnaires du groupe.

À dix jours de la déterminante AG du groupe, Arnaud Lagardère fait le dos rond en actant la cession de Lagardère Sports, une entité qui symbolise l’échec industriel d'un homme, héritier d'un empire, celui de son père. Lorsqu’il rachète Sportfive pour 865 millions d’euros, il est persuadé que ce secteur peut être un formidable relais de croissance. Douze ans plus tard, en cèdant  75 % des titres de Lagardère Sports pour seulement 110 millions d’euros à HIG Capital, il cède aussi aux pressions qui s’accentuaient dernièrement quant au recentrage des activités du groupe autour du travel media et du publishing

Une gestion critiquée par les activistes

L’instigateur principal de cette restructuration est le financier franco-libanais Joseph Oughourlian, à la tête du fonds activiste londonien Amber Capital, qui détient aujourd’hui 18 % du groupe Lagardère, contre seulement 7,3 % pour l’héritier du groupe. Adepte de la bonne gestion, M. Oughourlian critique à la fois le statut de commandite, qui rend Arnaud Lagardère quasiment irrévocable à la tête du groupe, sa mauvaise gestion stratégique, mais aussi ses abus quant à la distribution dispendieuse de dividendes qui ne serviraient en fait qu’à rembourser sa dette personnelle qui s’élèverait à plus de 200 millions d’euros.

Les deux parties rassemblent leurs alliés

Révoquer un conseil de surveillance à la botte d’Arnaud Lagardère semble être une tâche ardue, d’autant qu’Amber Capital n’a pas les moyens de monter davantage au capital de la société. En outre, celui-ci met en ordre de bataille son puissant réseau politico-économique français, duquel M. Oughourlian est très éloigné. En effet, confiant sur le vote du Qatar, deuxième actionnaire avec 13 % du capital, Arnaud Lagardère a convaincu Marc Ladreit de Lacharrière et Vincent Bolloré de reprendre respectivement 3,5 % et 10,6 % du capital de la société. L’ami, proche de ce dernier et ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy, a même intégré le conseil de surveillance pour conforter l’issue du vote. Amber Capital n’a alors pas d’autre choix que de se tourner vers les plus petits porteurs, plus sensibles à la cause du fonds, selon son président. Dans ce bras de fer entre le tout-Paris et l’incarnation de la finance mondialisée, le vote de la Caisse des dépôts et consignations, détentrice de 5,4 % des droits de vote, pourrait s’avérer déterminant.

Une victoire dangereuse se profile pour Arnaud Lagardère

Malgré de bonnes intentions, l’initiative de M. Oughourlian serait vouée à l’échec, mais ne signerait pas la fin du feuilleton. Selon le Monde, « l’histoire est écrite : victoire en AG de Lagardère et, après un délai de décence, prise de contrôle par Vivendi. Bolloré a toujours fait ainsi », prédit l’une des bonnes connaissances de l’homme d’affaires breton. Depuis l’arrivée de celui-ci au capital, le cours de l’action a perdu 18 % de sa valeur. Si certains considèrent M. Ourghoulian comme un pirate prêt à prendre d’assaut un navire en détresse pour empêcher que ne sombrent ses trésors, son capitaine semble, lui, préférer couler avec que d’abandonner son héritage familial à des mains étrangères.

Baptiste Delcambre

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