Depuis le début des années 2000, les économies africaines affichent des rythmes de croissance soutenus, dont nombre de secteurs bénéficient – secteurs miniers, pétroliers, bancaires, industries, de télécommunications… – et dont les vecteurs sont aussi bien les entreprises africaines que les acteurs économiques étrangers. L’accroissement des flux d’investissement a inévitablement et corollairement mené à la multiplication de litiges internationaux impliquant des parties africaines. Le CIMAC, basé à Casablanca, peut offrir à cet égard le forum neutre recherché par les investisseurs opérant en Afrique. La troisième édition des Casablanca Arbitration Days (3-4 novembre 2017) sera l'occasion d'évoquer les atouts de cette place montante de l'arbitrage africain.

Par Hicham Zegrary, Secrétaire Général, CIMAC, Jalal El Ahdab, Avocat aux barreaux de Paris, Beyrouth et New York, Ginestié Magellan Paley-Vincent, Jacob Grierson, Barrister, McDermott Will & Emery, Tarik Mossadek, Docteur en droit, Mossadek law firm & Partners et Ilham Kabbouri, Paralegal, Hogan Lovells.

 

Essor de l’arbitrage en Afrique

Les litiges impliquant des parties africaines sont pour la plupart portés devant des institutions arbitrales bien établies et sises en dehors de l’Afrique, en particulier devant la Chambre de Commerce Internationale (CCI) et la Cour internationale d’arbitrage de Londres (LCIA). La multiplication des institutions arbitrales en Afrique (de récentes études ont recensé l’existence de plus de quatre-vingts  centres d’arbitrage régionaux et nationaux sur ledit continent) a récemment placé le continent africain sous le feu des projecteurs. Le Centre international de médiation et d’arbitrage de Casablanca (CIMAC), créé sous l’impulsion de Casablanca Finance City (CFC), est l’une des institutions arbitrales africaines les plus prometteuses. Le CIMAC vise à se hisser au rang d’acteur de référence en matière de résolution des litiges internationaux et à faire la jonction, non seulement entre l’Europe et l’Afrique du Nord, mais également au sein de l’Afrique subsaharienne. L’objectif de cet article est d’étudier comment le CIMAC peut s’intégrer au paysage de l’arbitrage africain, en mutation rapide.

Arbitrage en Afrique, les options disponibles

Tel qu’indiqué ci-dessus, la majorité des litiges impliquant des parties africaines font traditionnellement l’objet d’un offshoring en ce qu’ils sont réglés en dehors de l’Afrique. Les raisons sous-jacentes à cette tendance sont multiples –  et ont notamment trait aux préjugés profondément ancrés à l’égard des systèmes judiciaires des pays africains  – mais ne feront pas l’objet du présent article, lequel se concentrera plutôt sur les différentes options disponibles sur le continent, en s'intéressant plus particulièrement au CIMAC.

En règle générale, la rédaction d’une clause compromissoire nécessite deux choix dé- cisifs de la part des parties, ceux-ci ayant trait à l’institution arbitrale et le siège de l’arbitrage. Et en la matière, l’Afrique offre un large éventail de possibilités.

Institutions arbitrales en Afrique, une prolifération?

L’Afrique abrite nombre d’institutions arbitrales bien établies, dont les suivantes: - la Cour d’arbitrage de Lagos (LCA) et la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) établie par l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) à l’Ouest;

- le Centre d’arbitrage international de Kigali (KIAC), le Centre d’arbitrage LCIAMIAC (collaboration entre la LCIA et le Centre d’arbitrage international de Maurice) et le Centre d’arbitrage et de médiation de la Chambre de commerce et d’industrie de Maurice (MCCI/Marc) à l’Est;

- le Centre d’arbitrage conjoint ChineAfrique à Johannesburg, au Sud.

- le CIMAC et le Centre régional d’arbitrage commercial international du Caire (CRCICA) au Nord;

- L’organisation d’événements au rayonnement mondial dédiés à l’arbitrage (e.g.: Casablanca Arbitration Days, Congrès du Conseil international pour l’arbitrage commercial (ICCA) à Maurice, ICC Africa Regional Arbitration Conference, etc.), l’adoption de règles conformes aux standards internationaux et l’inclusion d’éminents arbitres au sein des cours arbitrales sont autant d’éléments suscitant l’attention et la reconnaissance mondiales à l’égard de ces institutions. Le CIMAC ne fait pas figure d’exception. Sa Cour de médiation et d’arbitrage (qui, entre autres fonctions, nomme les arbitres) est constituée de seize arbitres hautement expérimentés, de quatorze nationalités différentes, couvrant les quatre langues officielles du CIMAC et présidée par Laurent Lévy1 , qui est l’un des plus grands noms dans le monde de l’arbitrage international. De nouvelles règles d’arbitrage sont entrées en vigueur en janvier 20172 . Par ailleurs, le Centre accueillera une nouvelle fois les Casablanca Arbitration Days les 3 et 4 novembre prochains.

Le choix du siège de l’arbitrage

Pour être un siège d’arbitrage attractif, un centre financier doit offrir bien plus qu’un centre d’arbitrage d’envergure. En effet, il doit impérativement disposer d’un cadre juridique et institutionnel favorable à l’arbitrage. Fondamentalement, un pays sera attractif en la matière s’il comprend :

- un cadre législatif prévisible et clair en matière d’arbitrage 

- un système judiciaire efficace et impartial qui soutiendra activement la procé- dure d’arbitrage ou, à tout le moins, n’interférera pas dans celui-ci.

Afin que le CIMAC puisse fonctionner dans les meilleures conditions, le Maroc a instauré un environnement favorable à l’arbitrage, tant sur le plan législatif que judiciaire.

En effet, le pays est signataire de la Convention de New York de 1958, pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères, ainsi que de la Convention CIRDI, laquelle ouvre une voie de recours aux investisseurs contre les États en cas d'atteinte par ces derniers aux investissements étrangers. Le Maroc a promulgué une loi relative à l’arbitrage en 2007, actuellement en cours de ré- vision. Ces éléments devraient apaiser les éventuelles craintes des investisseurs étrangers s’intéressant au marché marocain, car en cas de survenance d’un litige, une procédure d’arbitrage à Casablanca sera régie par des lois conformes aux principes internationalement reconnus. En outre, un dialogue a été amorcé avec les juges et des programmes de formation ont été mis en œuvre afin d’assurer le soutien actif du système judiciaire local – et de prévenir de potentielles interférences. Une réunion importante réunissant le président de l’International Bar Association et le président de la Cour de cassation s’est tenue en décembre 2015, au cours de laquelle ce dernier s’est clairement engagé à instaurer des conditions favorables à l’arbitrage au Maroc.

Conclusion

La relativement récente prolifération d’institutions arbitrales en Afrique, l’adoption de nouvelles lois alignées sur les standards internationaux et l’instauration d’un dialogue constructif avec la sphère judiciaire sur l’ensemble du continent témoignent de deux tendances claires. D’une part, une partie majeure des acteurs économiques souhaite que les procédures d’arbitrage impliquant des parties africaines soient menées sur le sol africain. D’autre part, il convient de souligner les efforts considérables déployés par de nombreux États africains afin de doter leurs villes de tous les atouts nécessaires pour accueillir de telles procédures – et donner corps à la résolution onshore des litiges.

Et le Maroc ne fait pas figure d’exception. Casablanca, hub financier du pays et plaque tournante du trafic aérien régional (via la RAM), a le potentiel pour devenir un lieu d’arbitrage de premier plan en Afrique, promouvant un environnement juridique favorable à l’arbitrage national et international sur le continent.

 

***

1 Membres de la Cour: Laurent Levy (Président); Mohamed S. Abdelwahab ; Hassan Arab ; Michael Black ; Thomas Clay ; Jalal El Ahdab ; Mohamed El Mernissi; Juan FernandezArnesto; Jacob Grierson; Azzedine Kettani; Mamadou Ismaila Konate ; Tarik Mossadek ; Nikolaus Pikowitz ; Ina C. Popova ; Maxi Scherer; Dorothy Udeme Ufot San.

Le règlement CIMAC: une offre institutionnelle moderne : le règlement d’arbitrage, qui comprend aussi un volet « médiation », a été rédigé, avec soin (sur deux ans), par des spécialistes de la matière, y compris les membres de la Cour. Il s’est inspiré des centres les plus reconnus, CCI, LCIA, ICDR, HKIAC ou SIAC et a voulu répondre au plus près aux besoins des utilisateurs. Il prévoit des dispositions très précises et pratiques pour aider les entreprises et leurs conseils à mieux s’orienter dans un arbitrage CIMAC, comme l’évocation des principales échéances procédurales, ce qui est attendu d’un témoin ou d’un expert, le rappel des principes d’efficacité et d’éthique… D’ailleurs, à l’image des nouveaux règlements, une procédure accélérée a été prévue, notamment pour les litiges de taille plus modeste. Le règlement est disponible en français (langue de référence), anglais, arabe et espagnol.

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