La crise sanitaire a mis en évidence la nécessité de la logistique dans l’économie française et, par voie de conséquence, de la logistique urbaine dans le maintien de l’activité, entre autres, des commerces de centre-ville. Suffisant pour l’accueillir de nouveau dans nos villes.

La logistique urbaine se définit comme l’art d’acheminer dans les meilleures conditions les flux de marchandises qui entrent, sortent et circulent dans la ville. Elle embrasse des dimensions variées bien qu’interdépendantes : habitat, activités économiques, gestion urbaine, transports… Un écosystème riche malgré une forme floue et une pratique parfois bégayante, qui participent à la défiance publique et constituent, aujourd’hui encore, des freins à son accueil général dans les villes. "Nous savons bien ce qu’est un entrepôt ou une usine de stockage, or, la logistique urbaine peut revêtir différentes formes", observe Cécile Tricault, regional head Southern Europe chez Prologis.

La fin d’un a priori

Aux enjeux de la logistique urbaine, s’ajoutent trois problématiques annexes qui l’ont contrainte à quitter la ville : une image dégradée, un foncier rare et des taux de rendement jugés trop faibles. Cécile Tricault évoque d’ailleurs son exclusion : "Pour parler de son retour, il convient d’évoquer son rejet. La logistique a été repoussée en dehors des villes car elle n’était pas assez rémunératrice et parce que l’on voyait de meilleurs usages pour les sites qu’elle convoitait. Alors qu’elle devient plus lucrative et mieux acceptée du public, elle réapparaît". Elle procède, par ailleurs, d’un biais cognitif tenace : lorsque l’on évoque la logistique urbaine, on pense camions, trafic, pollution alors même que son atout majeur réside dans la réduction des flux au profit des stocks en centre-ville.

Des atouts devenus visibles

La crise sanitaire a consacré notre dépendance à la logistique en général et à la logistique urbaine en particulier. La fermeture des commerces et le télétravail généralisé ont assez largement affecté le segment des bureaux comme l’immobilier commercial, rendant rationnelle la réintégration de la logistique urbaine en ville, par effet d’opportunité."Les commerces de centres-villes sont un peu moribonds, des surfaces seront vraisemblablement abandonnées au profit de la logistique urbaine car beaucoup d'entre elles s'y prêtent particulièrement et sont difficilement convertibles pour d'autres usages commerciaux", témoigne Gabriel Schillaci, directeur du pôle Transport et Mobilité chez Roland Berger. Par ailleurs, le e-commerce aura eu raison de l’ambition collective en matière d’écologie. Sébastien Manceau, partner chez Roland Berger, poursuit : "Il existe un paradoxe énorme entre la volonté d’écologie et le désir d’être livré rapidement. Aujourd’hui, on veut se faire livrer vite et vert, mais ces prétentions ont un coût et personne n’est prêt à l’assumer. Tout ce qui est économiquement optimisé est écologiquement désoptimisé". Suffisant pour que la logistique se réinstalle durablement en centre-ville ?

Tendance durable ? 

Afin d’y voir un peu plus clair et un peu plus loin, il conviendrait de mutualiser les intelligences des différents acteurs de l’écosystème, y compris entre concurrents. À ce sujet, Gabriel Schillaci avertit : "On est passé de flux denses au magasin à de tous petits flux disparates. Il faut renouer avec un peu de standard, d’interopérabilité. À titre d’exemple, il apparaît un peu aberrant que des concurrents livrent des produits à la même heure et au même endroit." La méfiance reste vive lorsqu’il s’agit de logistique urbaine, il appartient désormais aux acteurs de son écosystème de faire de ce mal nécessaire un bien vertueux.

Alban Castres

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