Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, et Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, tenaient le 15 février une conférence de presse lors de laquelle ils ont abordé la question de la politique industrielle. Le locataire de Bercy doit échanger avec son homologue allemand afin de pousser des axes d’amélioration au niveau de l’UE dans les mois à venir.

Branle-bas de combat. Il y a quelques jours, la presse se faisait l’écho de la pénurie de composants électroniques qui paralyse l’industrie automobile. Les constructeurs de cette filière industrielle, stratégique pour l’économie européenne, sont en manque de semi-conducteurs. Résultat : des usines à l’arrêt ou qui voient leur activité réduite, comme celles de Stellantis, nouvel ensemble issu de la fusion entre PSA et FCA, pourvoyeur d’emplois en France comme en Italie. En cause ? L’épidémie de Covid-19 provoquerait une augmentation des besoins en puces électroniques. Les ventes d’ordinateurs, de téléviseurs ou encore de petit électroménager ayant été dopées par les confinements et l’accroissement de la pratique du télétravail.

Si l’État français monte au créneau sur le sujet, la bataille s’engage également sur le Vieux Continent. Nous devons "tirer toutes les leçons de la crise que nous connaissons depuis plusieurs mois, qui a montré, au niveau national comme européen, des lacunes industrielles inacceptables", déclarait le 15 février Bruno Le Maire lors d’une conférence de presse commune avec Thierry Breton, commissaire européen chargé de la politique industrielle. Son propos vise aussi bien les composants électroniques que d’autres thèmes majeurs comme celui de la santé.

Un sujet loin d’être épuisé

La problématique n’est pas nouvelle. En février 2019, Bruno Le Maire et son homologue allemand, Peter Altmaier, publiaient un manifeste destiné à soutenir le poids des industries européennes. Pour ce faire, les États voisins misent sur trois piliers. Les pays souhaitent renforcer la dynamique d'innovation des entreprises, et vise en particulier à améliorer l'action européenne ; permettre l'émergence de champions en prenant mieux en compte la concurrence internationale et défendre le multilatéralisme tout en confortant notre capacité à protéger nos intérêts stratégiques.

Le 10 mars dernier, Bruxelles présentait ses ambitions en matière de politique industrielle

Le 10 mars dernier, Bruxelles présentait ses ambitions en matière de politique industrielle afin de peser face à une concurrence chinoise et américaine de plus en plus menaçante pour la souveraineté de l’UE. Hasard du calendrier : le lendemain de cette communication, l’OMS estimait que la Covid-19 pouvait être qualifiée de pandémie. La suite, on la connaît : le coronavirus a révélé le manque de stratégie européenne et française dans certains domaines, comme en matière de santé avec l’exemple flagrant des difficultés pour les pays du Vieux Continent à s’approvisionner en masques.

Coordination et ambition

D’où l’intervention de Bruno Le Maire ce lundi sur le sujet : "Il nous paraît indispensable de renforcer la stratégie industrielle européenne avec comme objectif de maintenir les capacités industrielles de l’Europe, de les développer dans un avenir proche et de garantir l’indépendance stratégique européenne." Un point sur lequel le ministre échangera mardi 16 février avec Peter Altmaier pour présenter de nouvelles propositions en la matière, qui seront soumises à la Commission et aux pays de l’Union. Bruno Le Maire souhaite gagner en souveraineté dans les domaines tels que l’hydrogène, le calcul quantique, l’intelligence artificielle ou encore les composants électroniques.

Sur ce dernier volet, l’UE pourrait adopter dès cette année un nouveau projet d’intérêt européen commun (Piec). L’hôte de Bercy précise que la France a identifié 18 projets susceptibles d’être éligibles. Si des filières ont vocation à être bâties, le ministre ajoute que le gouvernement "sera très vigilant" quant à leur indépendance, souhaitant éviter les rachats ultérieurs par des concurrents étrangers.

De son côté, Thierry Breton n’entend pas modifier la stratégie présentée en mars 2020, jugeant celle-ci suffisamment ambitieuse, mais il souhaite avancer. "Dans les années qui viennent nous allons assister à un certain nombre de tensions, notamment d’un point de vue géopolitique, il faut nous redonner les moyens de notre autonomie, avec de l’ambition", insiste-t-il notamment à propos des semi-conducteurs. Le ton est donné. Place à l’action.

Olivia Vignaud

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail

GUIDE ET CLASSEMENTS

> Guide 2024