Alors que la mairie de Bobigny a pris l'engagement inédit d'annuler le loyer d'avril pour les résidents de logements sociaux, Jonathan Berrebi, président de l'Office HLM de la ville, revient sur les implications de cette décision et sur l'actualité de son office.

Qu’est-ce qui a motivé cette décision d’exonération des loyers ?

Rappelons que ce n’est pas une décision de l’office mais de la mairie sur laquelle le conseil d’administration doit encore se prononcer. Cette dernière a décidé de prendre une décision solidaire, compte tenu du fait que nous sommes l’un des départements les plus pauvres de France avec les populations les plus exposées. Néanmoins, nous pensons que c’est une très bonne idée, et qu’il va falloir poursuivre l’action solidaire de la mairie, et si cela ne passe pas par une vraie exonération, cela prendra une autre forme.

Quelles sont les contraintes juridiques et financières d’une telle décision ?

C’est le cadre posé par le code de la construction et de la consommation qui mesure les effets d’exonération, pris par le conseil d’administration. Le président de la Caisse de Garantie du Logement Locatif Social lui alerte déjà sur la décision. De notre côté, nous réfléchissons à la meilleure solution permettant de respecter le protocole de retour à l’équilibre financier auquel nous sommes tenus, tout en accompagnant la ville dans sa volonté. Les plans d’alternance sont vraiment minimes, nous avons demandé au département de faire abonder le Fonds de solidarité logement, afin d’obtenir des fonds pour les familles en difficulté.

Où en est la santé financière de l’office aujourd’hui ?

Pour rappel, nous sommes arrivés aux commandes il y a six ans, avec une dette en ligne de trésorerie de 16 millions d’euros… ainsi que des taux de vacances et d’impayés ne permettent pas d’envisager un retour l’équilibre. Rappelons également que la ville de Bobigny a les taxes foncières les plus élevées de France, ainsi qu’un taux de PLAI (Prêt locatif aidé d'intégration) de 66 %. Une des actions très forte qui a été mise en place a été la vente de 270 logements en 2017, ce qui nous a permis une trésorerie de 7 millions, ainsi qu’un gain de 6 points sur le taux d’impayés, le stabilisant à environ 2 %. Nous avons également gagné un point sur le taux de vacance, qui s’est établi à 1,8 %. Cela nous a permis d’entrer dans un cycle vertueux : deux années d’affilée avec un autofinancement positif, une première en 25 ans d’histoire de l’office ! Il ne faut donc pas s’arrêter là et prendre des mesures plus pérennes que ça : j’ai demandé aux notaires et au conseil de pousser la réflexion. Il sera important à l’avenir de consolider le cœur d’action de l’office, à savoir la construction de logement social, en se débarrassant du reste, tels que les locaux commerciaux en pieds d’immeubles.

Et maintenant ?

Il s’agit maintenant de faire revivre et rayonner l’OPH de Bobigny, de redémarrer son développement. Après avoir remis en état une partie du par cet dégagé suffisamment de cash pour retrouver de l’air, la troisième phase sera donc de développer notre foncier, notamment par le biais de l’accompagnement soit des locataires via le bail réel solidaire, ainsi qu’avec les promoteurs. Toutes ces choses sont envisageables à l’horizon 2021. L'office s'est fait accompagner de notaire afin de se concentrer sur le cœur de métier de l'office. Je m'explique : il est question de créer une volumétrie pour séparer les volumes d'habitations, des volumes de commerces et autres. L'idée étant de pouvoir envisager de façon stratégique les ventes éventuelles de volumes de commerces afin de permettre de réinvestir dans le développement des réhabilitations de notre parc HLM. De plus d'autres axes sont également étudiés. L'office aujourd'hui vend un petit collectif insalubre de 320 mètres carrés dont il ne reste plus que deux locataires et qui fera l'objet d'une réhabilitation et qui sera un collectif pour des logements intergénérationnel. Il s'agit pour l'office de se séparer de volumes dont l'office ne peut plus développer ou réhabiliter et dont l'équilibre financier n'est pas possible.

Un rapprochement avec un autre bailleur social est-il envisagé ?

Nous savons que tous les OPH qui n’ayant pas atteint le seuil fixé par la loi Elan seront contraints à une fusion d’ici 2023. Nous n’atteignons pas ces seuils… C’est pour cela que nous avons engagé un rapprochement dans le cadre d’une logique départementale et territoriale avec Seine Saint Denis Habitat. Celui-ci a trois avantages : les sièges des deux structures sont au même endroit, nous conservons en certain nombre d’élus dans le territoire, et enfin la plus importante, notre office et l’office départemental sont les plus gros bailleurs de la ville de Bobigny. Cela permettra d’enclencher une logique territoriale plus cohérente, SSDH disposant également des deux plus gros Anru sur la ville. Cela nous permettra de conserver notre outil de proximité, crucial, puisque notre métier nous place sur un fil permanent entre la technique et le social. Autrement, cela deviendrait compliqué pour les locataires et par extension pour nous.

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