Face au recul de l’âge moyen auquel un Français hérite (50 ans soit 10 ans de plus qu’en 1980) et au coût fiscal élevé d’une succession non préparée, des stratégies patrimoniales fractionnant l’héritage en un échelonnement de donations anticipées peuvent être adoptées. Trois solutions d’investissements permettent de transmettre sans se démunir.

Démembrer un contrat de capitalisation

Si les sommes versées sur une assurance-vie avant les 70 ans de l’assuré sont transmises sans fiscalité jusqu’à 152 500 € par bénéficiaire, tel n’est plus le cas pour des montants supérieurs (prélèvement de 20 % sur les 700 000€ suivants, 31,25 % au-delà) et pour les primes versées après 70 ans, soumises aux droits de succession (après un abattement global de 30 500€). De plus, un contrat d’assurance-vie ne peut faire l’objet d’une donation, empêchant toute transmission anticipée et progressive. Le contrat de capitalisation, autre enveloppe d’épargne financière souscrite auprès des compagnies d’assurances, rend possible la transmission de son vivant, y compris un patrimoine important, et souvent à un coût fiscal inférieur à 20 %. Le contrat de capitalisation et l’assurance-vie sont similaires en termes de fonctionnement, d’univers d’investissements (fonds en euros, unités de comptes financières et immobilières), de fiscalité en cas de retrait, mais une différence de taille les sépare : la fiscalité successorale. Lors du décès du souscripteur, le contrat de capitalisation est transmis en l’état aux héritiers avec un triple avantage : ils conservent les supports d’investissements, sans avoir à les désinvestir à un moment inopportun lié à leur faible liquidité (produits structurés, private equity) ou aux secousses de marché, ils profitent de l’antériorité fiscale du contrat en cas de retrait, et les éventuelles plus-values latentes sont purgées.

"Trouver le bon dosage entre l’optimisation de la transmission et la préservation du train de vie"

Amorcer la transmission en conservant une source de revenus est possible en donnant la nue-propriété du contrat. Sa vie durant, le parent usufruitier perçoit des revenus en effectuant des retraits à hauteur des accroissements (plus-values et intérêts) du contrat. La transmission est dans le même temps optimisée : la valeur de l’usufruit, qui dépend d’un barème lié à l’âge de l’usufruitier au jour de la donation, vient en diminution de l’assiette taxable. Si le donateur a entre 61 et 71 ans, la valeur fiscale de son usufruit est fixée à 40 % de la valeur du contrat en pleine propriété. En utilisant cette décote et l’abattement de 100 000€ applicable, un parent peut transmettre à chaque enfant 166 000 € sans aucune fiscalité, et plus de 1 080 000€ à un taux marginal de 20 %. Au décès du donateur, l’usufruit s’éteint et les enfants nus-propriétaires reçoivent automatiquement la pleine propriété du contrat sans fiscalité successorale.

Investir dans la "pierre-papier" par le biais d’une société civile

 Pour obtenir des revenus complémentaires et diversifier son patrimoine sans souci de gestion, acquérir des parts de SCPI est tout indiqué : elles permettent de percevoir des loyers issus des rendements attractifs du marché de l’immobilier résidentiel ou tertiaire (bureaux, commerces, entrepôts, établissements de santé) en mutualisant les risques grâce à la multitude de biens, de locataires et de secteurs géographiques. La limite tient à la pression fiscale pesant sur ces revenus fonciers, soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu dont le taux marginal est de 45 %, auquel s’ajoutent les prélèvements sociaux au taux de 17,2 %, soit un taux global d’imposition grimpant jusqu’à 62,2 %. Les foyers déjà fortement imposés doivent donc éviter ce placement en direct ou via une société civile à l’impôt sur le revenu.

L’alternative consiste à faire acquérir ces SCPI par une société civile constituée pour l’occasion, au moyen soit de fonds empruntés auprès d’une banque, soit de liquidités apportées par les associés, en capital (souscription de parts sociales) ou en compte courant d’associé (prêt de l’associé à la société). L’option pour l’impôt sur les sociétés (IS) accorde une fiscalité à taux réduit au sein de la société (15 % jusqu’à un résultat de 38 120€, 25 % au-delà) et l’absence d’impôt et de prélèvements sociaux chez ses associés tant qu’aucune distribution de dividendes n’a lieu.

Mieux encore, les associés peuvent appréhender la trésorerie de la société issue des revenus des SCPI, sans aucune fiscalité pendant de nombreuses années, par le biais de remboursements partiels de leur compte courant d’associé. S’agissant non pas de dividendes distribués mais du remboursement d’une dette de la société, ces liquidités ne sont pas constitutives d’un revenu imposable pour l’associé. Par la suite, les parents peuvent échelonner des donations de parts sociales aux enfants afin d’utiliser l’abattement de 100 000€ renouvelé tous les 15 ans, tout en conservant le contrôle de la société, via leurs pouvoirs de gérant, et les revenus s’ils se réservent l’usufruit des parts. Ces donations de parts sont d’autant moins coûteuses que la société est fortement endettée car le montant des dettes (compte courant d’associé ou emprunt bancaire) vient diminuer d’autant la valeur des parts données.

Au décès de l’associé prêteur, l’éventuel reliquat de compte courant d’associé non remboursé constitue un actif taxable de sa succession. Il convient donc de bien doser dès le début le montant de l’apport en capital et celui de l’avance en compte courant d’associé, en fonction des besoins de revenus et de l’effort de transmission envisagé.

Diversifier son patrimoine via les Groupements forestiers d’investissement (GFI)

Groupements dont l’objet est l’acquisition et l’exploitation de bois et forêts, les GFI bénéficient sous conditions d’une exonération d’impôt sur la fortune et de droits de donation et succession de 75 %, limitée à la fraction de la valeur des parts investies en actifs forestiers français. Les GFI permettent donc de diversifier et transmettre son patrimoine à moindre coût, surtout pour les successions au taux marginal d’imposition élevé, en raison du montant transmis (jusqu’à 45 % entre parents et enfants) ou du degré de parenté (45 % entre frères et sœurs, 55 % entre oncle/tante et neveux/nièces, 60 % entre tiers). Par exemple, l’impôt est de 275 000€ sur une succession de 500 000€ entre un oncle et sa nièce. Le même montant en parts de GFI investi à 80 % en actifs forestiers français est transmis avec un impôt de 99 000€, soit un gain de 176 000 €. Si l’oncle donne avant ses 81 ans la nue-propriété des parts de GFI à sa nièce, il conserve les revenus du GFI et l’impôt tombe à 69 300 €, soit 205 700€ transmis en plus à son héritière, laquelle pourra lors de la succession conserver ou vendre ces parts de GFI pour récupérer des liquidités.

Guillaume Pinelli, ingénieur patrimonial, Astoria Finance

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