Gérard Rameix est à la tête de l’AMF depuis 2012. Sa vision globale offre une perspective éclairée des marchés financiers dans un contexte de renforcement de l’action du régulateur pour la protection de l’épargne.

Décideurs. Quel regard portez-vous sur les mois écoulés??

Gérard Rameix. Je relève avant tout un paradoxe?: alors que les facteurs économiques sont moroses depuis le début de l’année 2016 (des taux d’intérêt historiquement bas, une baisse de l’euro, du prix du pétrole et des matières premières), l’économie se porte plutôt bien. Les marchés financiers ont connu une activité dynamique avec un CAC 40 en hausse de 12 %, une augmentation du nombre de sociétés cotées (735 contre 728 fin 2014), trente-neuf introductions en Bourse pour un montant de 5,3 milliards d’euros, des montants élevés sur le marché obligataire (178 milliards en 2015 contre 158 milliards l’an dernier) et le maintien des fusions-acquisitions. C’est bizarrement l’effet inverse de ce que nous avons connu en 2015.

Je note par ailleurs une forte hausse de la volatilité caractérisée par plusieurs chocs sur le prix des actifs en 2015 et même un nouvel épisode début 2016 avec l’arrêt brutal des introductions en Bourses et un repli du CAC 40.

 

Décideurs. Qu’en est-il de l’industrie de la gestion d’actifs??

G. R. Leur activité est stable, avec 627 sociétés de gestion existantes, dont 334 sont agréées AIFM. Le flux de création de sociétés de gestion de portefeuille est toujours important mais il n’a pas compensé les trente-huit retraits d’agrément en 2015. Les encours OPC sont en progression de 4,5 % à 1?407 milliards d’euros, principalement du fait des OPC (Organismes de placement collectif) monétaires et diversifiés. J’aurais voulu aussi constater un retour des autres classes d’actifs mais ce n’est pas le cas.

 

Décideurs. Plus globalement, les marchés financiers sont-ils plus sûrs et transparents??

G. R. Les directives Mifid 2 et Mifir constituent un immense chantier très structurant. L’année 2015 a été consacrée à la rédaction des mesures d’application dans le cadre de l’Esma. L’AMF étant au board de cette institution, nous sommes très actifs dans la création des conditions d’application des textes. Nous avons d’ores et déjà lancé les travaux de transposition au niveau national.

Nous assistons à un tournant puisque depuis la crise, l’AMF participe à la réduction du risque comme aux États-Unis. Notre action est même parfois directe auprès des gérants et grâce à des formations dispensées en collaboration avec le FSB.

 

Décideurs. Quelles actions pour le financement de l’économie??

G. R. Le règlement européen sur les fonds à long terme (Eltif) a été adopté en avril 2015 pour une application à compter de décembre. Le premier fonds Eltif a été agréé par l’AMF en 2016. Nous nous réjouissons de la possibilité pour certains types de fonds d’octroyer des prêts comme ceux d’une banque.

 

Décideurs. Côté sanction, l’AMF sera-t-elle entendue par les pouvoirs publics sur la répartition de la compétence pour poursuivre les délits boursiers??

G. R. La question est encore en cours de discussions au Parlement. Dans tous les cas, je suis nostalgique de la période où chacun, procureur financier d’un côté et commission des sanctions de l’AMF de l’autre, pouvait gérer sa décision de poursuivre en toute indépendance.

 

Propos recueillis lors de la remise du rapport annuel (mai 2016)

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