Le 16 janvier, le lobby de la place financière de Paris, Europlace, a tiré la sonnette d’alarme devant un parterre de journalistes venus prendre le pouls filant de la finance française. Retour sur une tentative de sauvetage.
Qui dit manque de compétitivité de la finance française, dit risque de fragilisation de l’économie du pays. Voici la le constat alarmiste dressé par l’association Paris Europlace qui publiait le 16 janvier dernier deux rapports sur la compétitivité de la place financière de Paris. « Il faut être lucide, la compétitivité s’est dégradée », concède Yves Perrier, directeur général d’Amundi et auteur d’un des deux rapports.
Depuis 2010 Euronext Paris a, en effet, dégringolé de la cinquième à la huitième place des Bourses mondiales selon l’indice Xinhua-Dow Jones, qui évalue les performances globales et les opportunités de développement des places financières. Dans le box des accusés siège évidemment la sur-fiscalité du secteur financier français. Pointé du doigt également, le dynamisme des Bourses asiatiques. Blâmés, les ménages qui n’ont plus l’amour du risque. Jugés coupables sans appel, les pouvoirs publics.

Paris se fait damer le pion

« La compétition est de plus en plus rude. Il faut créer les conditions de la reconquête », martèle Yves Perrier. Ces dernières années, Paris s’est effectivement fait damer le pion par le Luxembourg qui tient le haut du pavé en Europe pour la domiciliation et la distribution de fonds grâce à un environnement fiscal plus favorable. Même chose du côté des capitaux étrangers où la capacité de la place parisienne à drainer des devises américaines ou chinoises est très insuffisante. Seulement 14 % des encours gérés proviennent en effet de capitaux étrangers contre 38 % pour la City. La faute à qui ? À écouter les experts, à la réglementation d’abord mais aux pouvoirs publics surtout. Séverin Cabannes, directeur général délégué de la Société générale et auteur d’un des rapports, cite en exemple le gouvernement singapourien qui « a pris des initiatives à long terme pour développer sa place financière. Il y a aujourd’hui des résultats concrets qui prouvent que les pouvoirs publics ont un rôle à jouer. »

Mais que fait le gouvernement français ? Il est paraît-il occupé à soigner l’une des plus grosses bêtes noires des professionnels de la finance : la fiscalité. Entre 2010 et 2012, le taux d’imposition du résultat des établissements bancaires est passé de 38 % à 63 %. Même coup de massue du côté de la taxation de l’épargne qui a non seulement fait reculer de 54 % les flux d’épargne financière sur la période 2006-2012 mais aussi réorienté l’allocation de l’épargne des Français vers des investissements immobiliers au détriment des placements à risque. Dans son rapport, le lobby de la place financière de Paris en a donc appelé à « remettre la fiscalité de l’épargne à l’endroit ».

Point de salut sans titrisation

La crainte majeure reste, néanmoins, de voir passer le projet de taxe sur les transactions financières que les professionnels de la finance n’hésitent pas à qualifier de « tsunami » pour la place de Paris. « Si la taxe européenne sur les transactions financières est mise en œuvre dans les onze pays européens concernés cela serait préjudiciable pour la compétitivité des places financières de ces derniers. La France doit renoncer à cette proposition ! », insiste Séverin Cabannes.

Pour le directeur général délégué de la Société générale, le salut des marchés financiers et plus particulièrement de la place de Paris pourrait venir des sources de financements alternatifs comme la titrisation et les placements privés. « Six ans après le début de la crise financière, Paris pourrait prendre une place importante en Europe en matière de titrisation », affirme Séverin Cabannes qui soutient également la mise en place d’une chambre de compensation sur les produits dérivés.

En toile de fond de l’impérieuse nécessité de redonner à la place de Paris les moyens de sa compétitivité se joue en réalité l’avenir de la finance française. Rappelons que le patron d’ICE, Jeffrey Sprecher, avait annoncé dès le lancement de l’OPA son intention de se séparer de la branche d’Euronext, jugée sans intérêt. Quand on sait que qu'Euronext pesait plus de cinq milliards d'euros de capitalisation avant son union avec Nyse, le divorce à venir risque de laisser un goût amer lors de son IPO avec une valorisation estimée à deux milliards d’euros…

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