« Un effort d’information est à entreprendre concernant la protection sociale internationale »
Fondé en 1998, le Cercle Magellan est un réseau professionnel de rencontre, d'échange et d'information s’adressant aux DRH internationaux et responsables des ressources humaines internationales.

Décideurs. Quelles compétences sont indispensables pour exercer la fonction RH à l’international ?

Claude Mulsant. La fonction RHI procède de la maîtrise des différentes composantes techniques et stratégiques d'administration et de ressources humaines. Il s'agit d'un ensemble de trois métiers qui requiert de nombreuses compétences techniques transverses souvent mal connues des entreprises, des capacités linguistiques ainsi que des qualités humaines importantes.

La gestion des talents, d’abord, suppose le recrutement et le suivi des carrières des collaborateurs clés et de profils internationaux pour le développement de l’entreprise à l’international. La mobilité internationale, ensuite, requiert la maîtrise de notions juridiques complexes (droit social, protection sociale, fiscalité, immigration) qui doivent être déclinées dans un cadre international. Elle nécessite également d’avoir une bonne connaissance des environnements locaux et de pourvoir à l’accompagnement humain et logistique des collaborateurs et leurs éventuelles familles à l’international. Enfin, les compétences concernant la rémunération et les avantages sociaux font appel à une bonne maîtrise des aspects financiers et réglementaires de l’entreprise, ainsi que des contextes de chaque filiale à l’international.

Décideurs. La majorité des entreprises sont désormais conscientes de la nécessité de renforcer leur présence à l’étranger. Dans quelle mesure la crise affecte-t-elle leurs ambitions en la matière ?

C. M. Dans un contexte d’internationalisation, les entreprises ont besoin d’avoir recours à des collaborateurs mobiles, même si ceux-ci ne représentent qu’une petite minorité des membres du personnel (en moyenne 0,2 % du personnel, généralement inférieur à 1 %, mais souvent stratégique…).

Si les grands groupes ont réduit leur volume de personnel en mobilité internationale dans les années 1990, on ne constate plus d’hémorragie, malgré la crise. Les multinationales semblent avoir atteint un plancher de collaborateurs expatriés en dessous duquel il leur serait dangereux d’aller, pour des raisons de bon fonctionnement (reporting, qualité, management, etc.). Les grandes entreprises qui sont encore en phase de développement important à l’international ont, quant à elles, de plus en plus recours à des politiques RH qui favorisent la mobilité. Celles-ci ne sont plus conçues comme réservées à quelques nationalités, généralement celle du pays d’origine de l’entreprise. Ainsi les mouvements d’impatriation vers le siège mondial ou les sièges régionaux se développent et les mobilités s’opèrent dans tous les sens, y compris entre filiales.


Décideurs. Quels leviers d’action sont mis en place pour modeler leur internationalisation et la mobilité des salariés en fonction des coûts et des risques inhérents à chaque contexte local ?

C. M. Aujourd’hui, les « expatriés occidentaux » se trouvent en concurrence frontale avec des collaborateurs locaux aux compétences techniques équivalentes. De plus, ces derniers ont l’avantage sur les expatriés de connaître la langue et la culture locale. Ainsi, dans les dernières années, on a pu constater la recherche d’optimisation des packages de rémunération pour correspondre à la réelle plus-value apportée par un collaborateur envoyé à l’étranger.

Les entreprises ont également cherché à développer des politiques de mobilité internationales qui répondent aux nouveaux besoins exprimés par leurs collaborateurs mobiles (protection sociale, mobilité des jeunes, gestion des doubles carrières …).

Cette évolution a également conduit à la diversification des types de transferts en marge de l’expatriation classique : des politiques dédiées aux jeunes diplômés, des contrats dit « locaux + » proposés dans certaines situations, des missions de courte durée, etc.


Décideurs. Des actions sont-elles souhaitables à l’échelle européenne pour favoriser la mobilité des salariés ?

C. M. La matière juridique concernant la protection sociale internationale est très difficile d’accès pour des non-initiés. Un important effort d’information est donc à entreprendre, non seulement auprès des entreprises, quelle que soit leur taille, mais aussi auprès des citoyens européens et des organismes locaux qui gèrent la protection sociale dès lors qu’elle a un caractère international.

D’une manière générale, les entreprises ainsi que les salariés en mobilité internationale recherchent une « portabilité » des systèmes de retraite visant à conserver les droits dans le pays d’origine. En effet, la très grande diversité des systèmes, des règles et les durées minimum de participation à chacun peuvent induire une perte globale de droits pour les collaborateurs mobiles (et ce même au sein de l’EEE dès lors, et ce sera de plus en plus souvent le cas, qu’un salarié aura l’occasion de passer une partie de sa carrière hors de l’EEE).


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