À la différence de 2008-2009, les fondamentaux des corporates sont bons, voire excellents
Décideurs. Depuis quelques années, on oppose souvent boutiques et banques d’affaires. L'année 2011 fait-elle exception à la règle ?
Ariel Ohana.
Je ne le pense pas. Je parlerais plutôt de la poursuite d’un mouvement de fond entamé il y a une dizaine d’années. Ainsi en 1994 (année de création de Ohana & Co.), tout restait à faire en termes d’image pour les boutiques. Dans un marché M&A encore assez peu développé, les corporates et entrepreneurs privilégiaient les grandes banques, dont l’image de marque impressionnait. Avec l’arrivée des fonds de private equity et le développement général du marché M&A, les années 2000 ont vu une sophistication croissante des clients. C’est ce qui a changé la donne : en gagnant en expérience, les clients fondent le choix de leur conseil sur la pertinence et le track record des hommes, plus que sur l’image de marque grande banque. La crise des banques a-t-elle rendu les boutiques plus fortes en 2011 ? Oui, peut-être car même l’image grande banque en a pris un coup, mais en toute honnêteté, ce ne sont pas tant les activités M&A des banques que leurs activités de marché qui sont en cause ici. Donc l’enjeu de long terme demeure la sophistication des clients et non les attaques plus ou moins justifiées contre les grandes banques.

Décideurs. Après l’effondrement des marchés à l'été 2011, faut-il être inquiet quant à l’avenir des opérations de fusions-acquisitions ?
A. O.
Les sept premiers mois de 2011 ont effectivement été une belle fenêtre de sortie. Pour ce qui est de l’avenir, il faut distinguer les deals en cours du pipe de deals futurs. Sur les deals en cours, on note des rallongements de process, parfois des durcissements des conditions de l’acheteur ou des prêteurs, mais pour l’instant peu d’annulations. Côté pipe en revanche, certains vendeurs d’actifs de qualité hésitent à se lancer, surtout quand il s’agit d’opérations à destination des fonds. Mais il existe une différence majeure avec la période 2008-2009 : les fondamentaux des corporates continuent d’être bons, parfois même excellents. De ce fait, la confiance des corporates n’est pas encore fortement entamée et, s’ils restent vigilants, ils continuent de faire des acquisitions. En LBO, je pense que les belles opérations de mid-cap arriveront encore à trouver des financements, d’autant que ces opérations sont souvent menées avec les banques commerciales des entreprises cibles.

Décideurs. Quels secteurs paraissent les plus propices à des opérations de M&A ?
A. O.
Ohana & Co. intervient dans les domaines de la santé, du luxe et des médias. Je vous donnerai donc mon sentiment sur ces segments. Le secteur de la santé, dont les moteurs suivent des cycles de long terme (innovation, vieillissement de la population, etc.) est moins sensible aux conditions conjoncturelles et devrait donc continuer à délivrer de beaux deals, y compris des mégadeals.
Le luxe, bien que très impacté par la crise de 2008-2009, a connu un beau rebond post-crise en tirant profit de la demande émanant des pays émergents pour des marques et de la qualité. On a également vu des opérations de concentration verticale visant à assurer un accès privilégié à des matières premières ou à un savoir-faire de production.
Quant aux médias, il est difficile de définir une tendance, car le secteur connaît des mutations structurelles favorables au M&A, comme la digitalisation, parallèlement à des cycles courts bien connus, comme celui de la publicité, très lié à la conjoncture, puisque les budgets des annonceurs dépendent de la consommation. Bref, tant que la consommation et donc les investissements publicitaires se maintiennent, le M&A devrait bien se porter.

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