À la tête de la direction financière d’OL groupe, Emmanuelle Sarrabay revient sur les principaux défis du seul club de football français coté en bourse, l’Olympique Lyonnais.

Décideurs. Quel est votre périmètre d’activité et quels sont les projets que vous avez menés au sein de l’OL groupe ?

Emmanuelle Sarrabay. À mon arrivée en 2011 mon rôle était limité à la direction financière. Aujourd’hui, j’occupe le poste de directrice générale adjointe finance, systèmes d’information et juridique corporate. Le financement de notre stade, aujourd’hui Groupama Stadium, ainsi que la structuration de la direction financière au moment de sa construction ont constitué des défis majeurs lors de mon arrivée. Cette étape a conduit à la transformation complète de notre business model. Désormais, les nouvelles infrastructures nous permettent d’avoir des activités complémentaires au football, notre cœur de business. L’exploitation de celles-ci a permis au groupe d’ouvrir des nouvelles lignes de revenu (concerts, séminaires…), décorrélées de la performance sportive.

Le DAF, un véritable business partner?

Concernant la fonction finance, le DAF a toujours été un business partner. Et si cela n’avait pas été le cas, il est nécessaire qu’il le soit. Son positionnement lui permet d’avoir une vision d’ensemble, plus « Big picture » et transversale de l’entreprise. Ainsi, la tendance que vous soulignez se vérifie assez facilement dans les faits. Par exemple, dans les enjeux de croissance (interne ou externe), les directeurs financiers ont toujours joué un rôle central et ne se cantonnent pas à l’accompagnement technique.

Vous tablez sur un chiffre d’affaires de 400 millions d’euros à cinq ans. Comment y parvenir ?

En février dernier, nous avons présenté notre nouveau plan stratégique qui porte sur un objectif de 400 millions d’euros de chiffre d’affaires d’ici à cinq ans et la réalisation d’une nouvelle salle événementielle, voisine du Groupama Stadium. Notre business model permet à la fois de capitaliser sur le football, cœur de réacteur de notre activité, et en même temps de tendre vers d’autres lignes de revenus (grands événements, événement corporate…). Grâce à cette diversité, l’ensemble de nos lignes de revenus en B2B ou en B2C connaissent une croissance solide et les effetcifs du groupe ont augmenté d’environ 60 % depuis la mise en exploitation du stade. Il faut dire que le marché européen du football est en pleine croissance depuis dix ans. Les droits TV domestiques vont par exemple connaître une augmentation de 60 % pour la période 2020-2024. La récurrence de l’Olympique Lyonnais en Ligue des Champions ou en Europa League, caractérisée par une présence continue de vingt-trois ans sur la scène européenne, démontre la solidité sportive du club et renforce encore plus cette ligne de produit [les droits TV, ndlr]. Quant aux cessions de contrats de joueurs (ou mercato pour le grand public), le marché des transferts est en constante progression. Nous avons d’ailleurs l’avantage d’avoir le meilleur centre de formation de France. Véritable pilier stratégique du groupe l’OL Academy forme les talents de demain qui feront et font déjà rayonner le club (cette saison par exemple six joueurs de l’Academy sont sélectionnés en équipe de France U19) et qui possèderont en outre, potentiellement, une forte valeur ajoutée au moment de la cession de leur contrat. Les résultats sont probants pour le centre de formation, au niveau européen, nous nous situons parmi les meilleurs, sur le podium entre le Real Madrid et le FC Barcelone selon le CIES.

Quelles sont les particularités d’être à la direction financière d’un club sportif ?

La direction financière d’un club de football est similaire à celle d’un grand groupe.Il y a le même travail de structuration auquel s’ajoute des fondamentaux comme la gestion de la trésorerie ou encore celle des risques. Seul le cœur d’activité qui diffère : le cadre réglementaire extrêmement exigeant du football, tant au niveau national (DNCG) qu’au niveau européen (UEFA Financial Fair Play) nécessite un pilotage de la performance extrêmement rigoureux. Je fais d’ailleurs partie du panel technique qui traite du Fair Play Financier avec l’UEFA pour l’ECA (European Club Association), et je peux vous assurer que chaque grand club est très impliqué pour assurer une transparence totale de leurs comptes. Autre particularité des clubs sportifs et particulièrement de l’OL : la gestion des actifs incorporels. À la fin de l’année 2018, la valeur de l’effectif au bilan était par exemple de 107,2 millions d’euros alors que les plus-values potentielles, qu’elles soient sur les joueurs acquis ou sur les joueurs formés au club représentaient 368,9 millions d’euros.

Quel a été l’avantage de l’introduction en Bourse ?

Les avantages sont nombreux. La cotation nous a donné l’opportunité de financer notre croissance. Il y a eu plusieurs opérations depuis l’IPO, avec notamment une émission d’OSRANES en juillet 2013 en relation avec le financement structuré du nouveau stade, une augmentation de capital en juin 2015 relative au financement du nouveau centre d’entrainement professionnel et de la nouvelle Academy OL, ou encore la création d’un club actionnaire en juin 2018. En outre, l’introduction en Bourse est un gage de transparence qui constitue un véritable atout lors de la levée des financements du groupe, et qui joue également un rôle-clé pour la rétention des talents.

Propos receuillis par Sandy Andrianabiby

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail

GUIDE ET CLASSEMENTS

> Guide 2024