Avec 230 consultants, 25 associés et dix bureaux dans le monde, Advancy a réalisé, en 2021, 55% de croissance. Quelle est la recette de ce pure player du conseil en stratégie très actif auprès du private equity et du restructuring, et qui intervient de plus en plus en chimie & sciences de la vie, au niveau mondial, pour aider les entreprises dans leur transformation écoresponsable.

Décideurs. Avec une hausse de 55% de votre chiffre d’affaires en 2021 et de 35% à fin juin, vous êtes au-dessus des performances du marché comment l’expliquez-vous ?

Eric de Bettignies.  Quand j’ai créé Advancy, il y a plus de vingt ans, l’ambition était d’être agile et transformant, c’est-à-dire d’avoir une approche différente du conseil en stratégie avec une forte dimension de terrain. Dans le cas de la relance du groupe Lapeyre par exemple, il fallait aller sur place et réinventer l’entreprise de l’intérieur aux côtés des équipes et ainsi être dans l’opérationnel, au-delà du rapport stratégique. Ce qui est possible pour nous, car nous avons une agilité que n’ont pas les grands cabinets anglosaxons et qui explique en partie notre croissance continue dans le restructuring.

Surtout nous aimons notre métier. Actuellement, nous travaillons à remettre sur pied un grand groupe en difficulté qui risque d’avoir à faire face à une vague de départs à la rentrée. Dans ce cas précis, il est essentiel de comprendre la vocation première de la structure et de remettre son modèle dans le bon sens. Dans leur cas, en revalorisant son capital humain quitte à dépenser plus et accepter de baisser un peu ses résultats. La valeur d’entreprise va aussi augmenter mais par la confiance dans la solidité de son modèle, donc par son multiple de valorisation.

Aujourd’hui quelle est la répartition entre les entreprises ayant réellement besoin d’être redressées et les autres ? Celles qui ont besoin de relais de croissance et d’améliorer leurs performances ?

Notre ADN nous permet d’agir sur les deux segments, en transformation et dans le private equity. Notre recette est d’avoir une vision stratégique claire et d’être capables de la mettre en œuvre. Nous sommes organisés par secteur d’activité (industrie, chimie, sciences de la vie, pharma, retail & luxe, grande consommation, matériaux/construction). Nous ne sommes pas un cabinet de conseil généraliste mais sur les secteurs où nous sommes présents, nous avons une résonance extraordinaire. Par exemple, en 2012, Novacap valait 100 millions d’euros au moment où nous avons commencé à travailler avec eux. Depuis, son nom à changer pour Seqens et après plusieurs LBO successifs, la valeur de l’entreprise a été multipliée au moins par 30.

"Nous ouvrons notre capital depuis le début à ceux qui le méritent par leurs performances."

Comment gérer une telle croissance de votre activité ?

En 2021, nous avons renforcé nos effectifs d’environ 70 consultants dont la moitié pour le bureau de Paris. Des projets de partenariat avec des écoles pour créer des formations sur des thématiques environnementales adaptées aux besoins de nos clients sont également lancés. Ensuite, pour attirer et retenir nos talents, nous ouvrons notre capital depuis le début à ceux qui le méritent par leurs performances. À titre d’exemple, le directeur du bureau de New York, avec son parcours atypique d’ingénieur et son PhD en physique moléculaire a commencé en tant que consultant avant de passer à la tête d’Advancy à New York au bout de cinq ans seulement. Nous sommes fiers de voir que nos recrues s’épanouissent au sein du cabinet. Ce partage du capital va avec celui de l’expérience, c’est une valeur portée par Advancy. De plus, la possibilité d’évoluer en interne est un élément qui nous permet d’accompagner notre croissance : à la fin de l’année nous ouvrons un nouveau bureau à Singapour en plus de celui de Shangaï pour accompagner l’essor en Asie.

"Le cadre règlementaire évolue et les entreprises doivent s’adapter à de nouveaux enjeux : toutes les entreprises doivent diminuer de 30 à 40% leurs émissions de gaz à effet de serre."

Comment, en tant que cabinet de conseil, accompagnez-vous les entreprises face à l’augmentation des exigences en matière d’impact carbone ?

Notre implication sur ce sujet est en lien avec nos domaines d’expertises historiques : cela fait 15 ans que nous travaillons avec des entreprises spécialisées dans la chimie et les sciences de la vie. Du fait de cette expertise nous avons des liens avec l’ensemble de la chaîne de production : depuis la conception, en biochimie par exemple, jusqu’aux ingrédients présents dans l’assiette. Trois de nos practices, deux en BtB et l’autre BtC sont très fortement spécialisées ce sujet : Chimie-décarbonation Pharmacie-santé en BToB et consumer & nutrition en BtoC. C’est un élément très différenciant d’Advancy.

Le cadre règlementaire évolue et les entreprises doivent s’adapter à de nouveaux enjeux : toutes les entreprises doivent diminuer de 30 à 40% leurs émissions de gaz à effet de serre, auxquelles s’ajoute une pression sociétale croissante. Il est essentiel que les entreprises se transforment. Pour certaines, il s’agit même d’une question de survie. À ce titre nous recommandons une approche originale de la transformation en quatre points : les choix technologiques à faire aujourd’hui pour demain, la transformation des portefeuilles produits vers des ingrédients issus de la bio-ingénierie, la généralisation de la circularité de la chaîne de production avec le recyclable et enfin l’intégration des matériaux propres comme des batteries plus autonomes entre autres. Pour aider au mieux nos clients, nous avons noué deux partenariats stratégiques : avec la start-up Traace (lancée par des anciens d’Advancy) qui vient d’ailleurs de lever 2,5 millions d’euros pour modéliser l'empreinte carbone des entreprises, et Perfesco (filiale d’EDF) qui réalise des diagnostics techniques pour permettre des économies d’énergie. C’est une approche très technologique du conseil en matière d’impact et, à raison, car nous sommes en forte croissance sur ces sujets.

À ce titre, comment accompagnez-vous le secteur du luxe sur lequel vous êtes également particulièrement actif ? 

Nous travaillons pour améliorer la performance sociétale de la supply chain, notamment pour faire en sorte que les achats des grands groupes soient réalisés de façon plus responsable. Nous les accompagnons aussi pour relocaliser une plus grande partie de la production. Nous intervenons aussi pour guider les entreprises vers une plus grande éco-responsabilité à travers le « re-commerce », pour intégrer le marché de seconde main dans leur circuit de vente. Nous avons remarqué que les consommateurs sont souvent les mêmes mais que les produits sortent du circuit de la marque et passent par des plateformes de revente. Nous réfléchissons par exemple avec les marques de luxe sur la meilleure façon pour elles de maîtriser ces circuits : comme développer des plateformes en interne ou bien en externe, capter la valeur du produit et l’accompagner sur toute sa durée de vie.

Comment allez-vous vous adapter aux incertitudes autour du marché du PE (hausse des taux, inflation…) ?

L’activité est toujours dynamique sur ce secteur, en 2021. Nous sommes confiants quant à l’avenir. Les valorisations sont un peu chahutées mais les fonds ont toujours beaucoup de liquidités. Il y aura toujours des acquéreurs. En revanche, il peut y avoir quelques difficultés pour le montage financier. Concernant l’inflation, nous aidons les producteurs et vendeurs à établir des stratégies pour faire face aux différents scénarii d’inflation possibles car ce sont des situations qui seront de plus en plus courantes.

 

Propos recueillis par Céline Toni

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