Le détachement de salariés au sein de l’Union européenne continue à représenter un phénomène en augmentation. D’après le Parlement européen, 2 millions de salariés sont concernés chaque année, soit près d’1% des emplois salariés de l’Union européenne...

De façon générale, le détachement est une opération de courte durée (environ 4 mois dans l’ensemble de l’Union et 3 mois pour les détachements vers la France), qui concerne tout particulièrement certains secteurs d’activités, notamment le Travail temporaire, le BTP ou l’Industrie. Parmi les évolutions à noter en matière de détachement, on relève l’avancée de la révision de la Directive sur le sujet de 1996, la suppression du droit de timbre de 40 € avant son entrée en vigueur et l’annonce d’une ordonnance sur le sujet. 

  • Projet de révision de la Directive « Détachement »

Le cadre règlementaire qui encadre actuellement le détachement de salariés au sein de l’Union européenne résulte d’une Directive de 1996[1]. La révision de la Directive de 1996 est un exercice délicat, car les différents Etats membres ont des intérêts divergents, selon qu’ils soient plutôt concernés par l’envoi ou l’accueil de salariés détachés. 

Le 23 octobre 2017, les Ministres concernés des Etats-membres de l’Union européenne (groupe « ESCO ») ont arrêté un document d’orientation générale sur la révision de la Directive de 1996[2].

Le principal apport de ce texte de compromis – outre les modifications déjà prévues lors des précédentes étapes de la révision – est de fixer le principe d’une durée maximale du détachement, que la Directive de 1996 ne prévoyait pas.

Ainsi, la possibilité de procéder à une opération de détachement serait désormais limitée à une durée maximale de 12 mois, portée à 18 mois lorsque l’entreprise procédant au détachement en fait une demande motivée. A priori, cette possibilité de prolonger la durée de détachement de 12 à 18 mois ne suppose qu’une demande motivée de l’entreprise à l’origine du détachement, sans pouvoir d’appréciation de l’Etat d’accueil. Elle devrait donc être fréquemment utilisée en pratique.

On ne peut que regretter que la durée maximale de détachement ainsi prévue en matière de droit du travail soit différente de celle prévue en matière de droit de la sécurité sociale, où le détachement au sein de l’Union européenne est défini comme une mission temporaire d’une durée maximale de 24 mois, sauf exceptions[3]. L’alignement des deux durées maximales aurait simplifié grandement les pratiques des entreprises européennes.

Pour le reste, aucun accord n’a été trouvé sur la question délicate et spécifique du détachement dans le secteur du transport routier. La révision de la Directive de 1996 s’en fait l’écho, en affirmant formellement que ce secteur est inclus dans le champ d’application de la Directive « Détachement », tout en précisant que des règles propres à ce secteur seront adoptées ultérieurement.

En tout état de cause, ces nouvelles dispositions en matière de détachement n’ont vocation à entrer en vigueur qu’au terme d’un délai de transposition de 3 ans laissé aux Etats-membres après l’adoption définitive de la Directive révisée. D’ici là, les dispositions actuelles restent en vigueur.

  • Le droit de timbre de 40 €, supprimé avant son entrée en vigueur

Créé par la loi « Travail » du 8 août 2016, le droit de timbre était une contribution due par tout employeur détachant des salariés en France destinée à couvrir les coûts de mise en place et de fonctionnement du système dématérialisé de transmission des déclarations de détachement (« Sipsi ») à l’administration[4]. Son montant avait été fixé à 40 euros par salarié détaché[5].

Toutefois, cette taxe ne devrait jamais entrer en vigueur. Accusé de protectionnisme par les autres Etats-membres de l’Union européenne, le Ministère du travail français a annoncé sa suppression par un décret à paraître courant janvier 2018, alors qu’elle devait entrer en vigueur au 1er janvier 2018.

  • Une 7ème ordonnance « Macron » annoncée en matière de détachement

La loi d’habilitation du 15 septembre 2017 autorisait le gouvernement à modifier par ordonnance les dispositions légales en matière de détachement, en l’adaptant aux spécificités des entreprises frontalières ou à celles exerçant des prestations de courte durée dans certains secteurs ou encore dans le cadre d’événements ponctuels[6].

Cette ordonnance n’a pas encore été publiée à ce jour. Toutefois, d’après le gouvernement, une 7ème et dernière ordonnance « Macron » portant sur le détachement devrait intervenir en janvier ou février 2018.

Cette ordonnance devrait principalement prévoir trois séries de mesures :

- la création d’une « contribution forfaitaire » pour sanctionner les cas de fraude au détachement (entrée en vigueur différée au 1er janvier 2019) ;

- la simplification des formalités de détachement pour les entreprises frontalières, avec la négociation d’accords bilatéraux permettant à ces entreprises d’effectuer une déclaration unique valable 12 mois au lieu de devoir effectuer une déclaration par opération de détachement ;

- l’allégement des formalités de détachement pour certaines prestations spécifiques (artistes, formateurs, journalistes…), soit sur la base d’une liste d’activités exonérées de formalités, soit lorsque le détachement est inférieur à une certaine durée.

 

Louis Richard, Capstan Avocats

 

[1] Directive n°96/71/CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services

[2] Conseil de l’Union européenne, document n°13153/17 du 24 octobre 2017

[3] Cette durée de 24 mois était d’ailleurs celle proposée par la commission européenne.

[4] Article L.1264-4-6 du code du travail

[5] Article R.1263-20 du code du travail

[6] Article 5 de la loi n°2017-1340 du 15 septembre 2017

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail