Comment le private equity peut-il se relever ?
Le private equity est en pleine tourmente. En France, seuls deux millions d’euros ont été levé la semaine dernière. Tous les fonds se concentrent sur la chute des valorisations des entreprises de leurs portefeuilles et sur la manière de les accompagner. Cette phase de latence aidera les fonds à repenser leur stratégie à l’aune de la reprise. Abderahmane Fodil est optimiste sur le potentiel d’Idi Emerging Markets Partners, car son fonds dispose d’un triple avantage pour rebondir.
Capital-développement
De fait, son positionnement est judicieux en ce qui concerne la maturité des entreprises qu’il accompagne. En effet, M. Fodil pense que les fonds de capital-innovation souffriront de la non-rentabilité et du manque de liquidité de leurs participations, quand les entreprises au portefeuille des fonds de LBO seront contraintes par les garanties bancaires à garder un niveau d’endettement supportable et donc potentiellement, à perdre le contrôle à la faveur d’un debt to equity. « Le capital-développement, à l’inverse, s’adresse à des entreprises profitables et peu endettées et ainsi plus résilientes en temps de crise », indique M. Fodil.
Marchés émergents
Sa stratégie est aussi intéressante, car elle se focalise sur les marchés émergents. La Chine a su réagir rapidement face à la crise sanitaire. Un exemple pour les pays développés. « Quand une forme de méfiance à l’égard des fonds de buy out européens s’installe, les perceptions sur la rentabilité, au regard du risque, des marchés en croissance s’améliorent et certains fonds panasiatiques attirent déjà le regard des investisseurs », explique M. Fodil. L’Afrique est, elle, sujette à débat. D’un côté, le champ d’action limité des banques centrales conjugué à de bonnes tendances structurelles, une population jeune et un prix du baril en baisse pourrait créer nombre d’opportunités d’investissement. D’un autre côté, une économie informelle omniprésente et des mesures de télétravail quasi inexistantes rendrait le confinement difficile et l’épidémie potentiellement bien plus dévastatrice sur ce continent. Surement trop tôt pour se prononcer…
Tendances de fond et numérique
Les choix sectoriels d’Idi Emerging Markets pourraient enfin lui permettre de mieux supporter la crise. Le fonds investit dans les secteurs soutenus par la consommation d’une classe moyenne grandissante, dans les pays émergents, comme la santé, l’éducation, les loisirs, la finance et la logistique. M. Fodil est persuadé que « cette crise accélérera certaines mégatendances structurelles comme l’ubérisation ou la dématérialisation de certaines activités liées au nouveau modes de consommation des jeunes notamment dans les économies en croissance ». Les participations d’Idi dans l’éducation en ligne, les télécoms ou les services du numérique se montreront, sans doute, particulièrement résilientes.
Une différenciation au cœur des besoins de diversification des investisseurs
Ce positionnement est plutôt avisé, certes, mais il est aussi différenciant, et M. Fodil estime que « pour optimiser leur gestion de portefeuille, a fortiori en temps de crise, les investisseurs auront intérêt à minimiser leur risque global en diversifiant leur portefeuille, notamment d’un point de vue géographique entre économies mures et économies en croissance ».
Après deux années d’investissements records, les multiples vont enfin redescendre et les valorisations avec. Dans une panique généralisée à toutes les places financières, le manque de liquidité et la surexposition au risque pousse les investisseurs à vendre leurs participations. D’ailleurs, les comportements opportunistes se multiplient déjà grâce aux bonnes affaires sur le marché secondaire. Même si l’illiquidité des investissements en capital pourrait rebuter les entreprises en difficultés passagères, le private equity - en particulier les fonds ayant un positionnement différenciant et appuyé sur des tendances de fonds - pourrait bénéficier de cette réallocation des capitaux.
Baptiste Delcambre