Autorités publiques et chercheurs reconnaissent que le nombre de personnes décédées du Covid-19 serait plus élevé que la réalité. Une situation qui pourrait bientôt être résolue.

Depuis plusieurs jours, la Chine est critiquée, de façon plus ou moins voilée, par une partie de la communauté internationale pour avoir sous-évalué les décès liés au Coronavirus. Pour le moment, impossible de savoir si cela est volontaire ou non. Mais l’Europe n’est pas en reste puisque plusieurs études scientifiques révèlent une sous-estimation probable du nombre de victimes. Précisons d’emblée que les biais statistiques expliquant la situation ne sont pas liés à une volonté de dissimulation de la part des autorités qui font de leur mieux pour donner, au quotidien, les chiffres les plus précis.

Le cas italien

Une étude menée par deux chercheurs italiens à Nembro, petite ville de 10 000 habitants située à côté de Bergame, épicentre de l’épidémie en Europe est à cet égard révélatrice. Elle estime que le nombre de morts ces deux derniers mois serait de 158 alors qu’officiellement, le Covid-19 a tué 31 habitants. Si les autorités italiennes prennent en compte le nombre de décès lié 100% au Coronavirus, les causes multifactorielles ne sont pas, pour le moment, intégrées aux statistiques. Il en est de même pour les décès à domicile ou dans les maisons de retraite.

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Selon deux chercheurs italiens, dans la ville lombarde de Nembro (ci-dessus), le nombre de décès lié au Covid-19 serait de 158. Loin des 31 officiels.

Les Ephad en première ligne

La France est dans une situation similaire. À l’heure actuelle, les décès enregistrés dans les Ephad ne sont pas intégrés aux statistiques que Jérôme Salomon, directeur général de la Santé présente au quotidien. Et pourtant, 700 000 de nos concitoyens résident dans ces établissements plus touchés que la moyenne. En cause : l’âge des résidents et la rapidité de propagation du virus. Conséquence, certains établissements sont particulièrement frappés : 10 morts en 10 jours à Villeneuve-de-Berg en Ardèche, 16 en 8 jours à l’Ephad Le Chêne à Saint Dizier… Selon l’Agence Régionale de Santé Grand Est, 570 décès ont été comptabilisés dans les Ephad de la région qui rassemble les anciennes Alsace, Lorraine et Champagne-Ardennes. Une mortalité bien plus élevée que d’habitude.

Les autorités françaises sont conscientes de la situation et, mardi dernier, Jérôme Salomon a lui même reconnu publiquement : « on sait que les décès à l’hôpital ne représentent probablement qu’une faible part de la mortalité ». Il a promis de déployer les mesures pour recenser le nombre de décès dans les résidences pour personnes âgées. Pour le moment, les directeurs d’Ephad font remonter les chiffres et les causes de décès. Une première estimation devrait être donnée le 2 avril au soir. « Le projet de signalements dans les établissement sociaux et médicaux sociaux progresse » a d’ailleurs déclaré Jérôme Salomon lors de sa dernière conférence de presse. Attendons nous donc à un bond de décès dans les jours qui viennent. Bond davantage lié à un changement de mesures qu’à une hausse de contamination au Covid 19.

Bonne nouvelle

Malgré tout, ces biais statistiques cachent une bonne nouvelle. Si la maladie fait probablement plus de morts que prévu, elle atteint également plus de patients que ce qui est mesuré. Le taux de létalité ne serait pas donc aussi élevé. Ainsi, en Italie, il serait plus proche de la moyenne de l’OMS (3,7%) que des chiffres officiels (11,7%). Pour le moment, le nombre de morts est calculé à chaud. Une fois l’épidémie passée, les données devraient probablement évoluer avec, à l’échelle mondiale, deux enseignements : plus de décès mais un taux de mortalité plus faible.

Lucas Jakubowicz

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