La fermeture des tribunaux a stoppé l’activité quotidienne de certains avocats spécialistes de la résolution des litiges. Quand elle n’a pas eu que peu de répercussions sur d’autres qui ont maintenu un rythme dense : gestion du pré-contentieux, élaboration ou révision de la stratégie judiciaire de leurs dossiers complexes et poursuite des procédures arbitrales. Rythme qui n’est pas près de ralentir : les modes alternatifs de règlement des litiges vont se développer.

Le retard sera difficile à rattraper. Les audiences décalées ne seront programmées que dans plusieurs mois, l’année prochaine parfois. Une fois le confinement passé, on ne verra aucune amélioration pour ce qui est de l’encombrement des tribunaux et le manque de personnel, magistrats et greffiers en tête, pointés du doigt avant le début la crise déjà, aucune embauche ou hausse de budget n’étant prévues à ce jour. Le système juridictionnel français est à bout de souffle.

Face à cette situation, les avocats réagissent. Ils ont été nombreux à réclamer auprès de leur président de juridiction, qui décide du plan de continuité dans son tribunal, la mise en place d’audiences en visio-conférence et l’autorisation de plaider par téléphone. « La justice claquemurée est dédaigneuse. Nous avons, dès le début de cette tempête sanitaire, offert d’organiser à nos frais et pour assurer le service public des visio-audiences, en vain. Pourtant, cela fonctionne ! »,
déplore le bâtonnier de Lille Jean-Baptiste Dubrulle dans une tribune. C’est donc à l’intérieur des cabinets qu’il faut s’organiser pour assurer la continuité des dossiers.

Stratégie transformée

Un chiffre estimé par le Conseil national des barreaux interpelle : 41 % des avocats individuels ont cessé leur activité durant le confinement. Leur mode d’exercice, la typologie de leur clientèle et leur forte dépendance au palais expliquent cette situation. Dans les cabinets d’avocats d’affaires, en revanche, on prépare l’avenir. Et cela passe par une importante charge de travail. « Durant cette période de fermeture des tribunaux, nous nous concentrons sur les procédures d’urgence et travaillons nos écritures au fond, nos assignations et nos conclusions en défense. L’activité contentieuse est très riche », détaille Jérémie Fierville, un avocat contentieux qui est à la tête de son propre cabinet avec son associée Marie-Aude Ziadé. Dans un cas particulier par exemple, la stratégie juridique est totalement transformée puisque la partie adverse, qui jusque-là était prête à négocier, s’est complètement refermée en raison de ses difficultés de trésorerie. L’inverse, c’est-à-dire la reprise des discussions, est également envisageable, explique Marie-Aude Ziadé : « Dans le cadre d’un différend international, les discussions amiables entamées avec la partie adverse étaient polluées par la menace de procédures devant les juges français. Cette menace a perdu son sens quand les juridictions ont fermé et la négociation a pu reprendre sur des bases plus saines. » L’avocate ajoute que son cabinet tourne à plein régime aussi parce qu’il intervient sur de nombreux litiges internationaux. Même si la situation est très variable d’un pays à l’autre pour ce qui est de la poursuite des audiences, de nombreux pays conservent en effet leur activité juridictionnelle.

Transiger

Autre mode de résolution des litiges qui continue comme si de rien n’était, ou presque : l’arbitrage. Toutes les cours arbitrales sont dotées d’outils de travail à distance sécurisés et sont rodées à la pratique des visio-audiences. Elles procèdent même à des cross examinations à distance, laissant à la personne interrogée et à son avocat la possibilité de faire des apartés privés. « Il est toujours possible de choisir l’arbitrage même si le contrat est dépourvu de clause arbitrale si les deux parties sont d’accord », précise Marie-Aude Ziadé.

Enfin, le phénomène le plus répandu en cette période si particulière est le recours à des solutions extra-judiciaires de règlement des litiges. Lorsqu’un contentieux est en cours, il est peut-être intéressant de transiger durant cette période, les difficultés financières de l’adversaire pouvant rebattre les cartes du litige. Les avocats spécialistes du contentieux sont donc nombreux à penser que le recours aux Marc (les modes alternatifs de règlement des conflits) sera massif dans les prochaines semaines. Le vice-président du tribunal de grande instance de Paris Fabrice Vert incite le monde judiciaire à entamer de virage dans la revue Dalloz Actualité du 27 avril. Le défi de la dématérialisation de la procédure n’est pas insurmontable, l’arbitrage le prouve.

Pascale D'Amore

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