Face aux conséquences économiques de la crise sanitaire, les disparités entre les avocats sont immenses. Si les spécialistes du contentieux et du corporate/M&A semblent les plus affectés dans l’immédiat, ce sont les structures à la trésorerie la plus fragile, quel que soit leur positionnement, qui se montrent les plus à risques.

Les avocats se sentent mis de côté. Certaines mesures prises par le gouvernement pour assurer la survie des entreprises françaises, en l’occurrence le chômage partiel des salariés, ne s’appliquent pas à la profession, les avocats exerçant pour 98 % d’entre eux sous le statut de collaborateurs ou d’associés. Seules les fonctions support des cabinets ont pu bénéficier du dispositif. « Une fois de plus, les avocats ne sont pas reconnus en tant qu’entreprise », réagit Louis de Gaulle, l’associé à la tête de la centaine d’avocats de De Gaulle Fleurance & Associés.

Emprunts bancaires

Les cabinets peuvent en revanche voir leurs cotisations fiscales, sociales et leurs échéances bancaires reportées, leurs loyers suspendus et avoir accès aux prêts garantis par l’État. Ils sont nombreux à avoir déposé un dossier de candidature pour obtenir ces derniers. Selon le Conseil national des barreaux (CNB) (lire ici), 61 % des avocats exerçant individuellement solliciteront dans les prochaines semaines le fonds de solidarité instauré par l’État, 28 % se tourneront vers la CNBF, leur caisse nationale, et 20 % demanderont un soutien à leur ordre professionnel. Ce qui montre que les cabinets fonctionnent souvent en flux tendu, leur trésorerie ne permettant pas d’absorber les retards de paiement de leurs honoraires au-delà de quelques semaines.

Une bonne santé financière garantit une sortie de crise heureuse, même pour les cabinets dont l’activité est freinée

Certaines structures ont donc commencé par ronger les coûts « superflus ». « Nous allions fêter les 100 ans du cabinet au mois de juin, regrette José Desfilis, qui dirige Desfilis Avocats, mais avons décidé de reporter les célébrations. » Il en sera certainement de même pour le géant Gide, né lui aussi en 1920, qui voulait des festivités en grande pompe. Mais ce sont les associés qui, avant tout, seront touchés par la réduction des dépenses au sein des cabinets. Il ressort du sondage réalisé par Décideurs Juridiques auprès des avocats que 47,1 % des associés réduisent ou réduiront les rémunérations des associés (lire ici). Pour les structures les plus fragiles, celles ayant multiplié les emprunts auprès des banques, cela risque de ne pas suffire : elles  ne se relèveront peut-être pas de trop nombreuses semaines d’inactivité et d’absence de facturation. Les conséquences de la crise sur le marché des avocats vont se faire sentir dans les prochains mois et on s’attend à une vague de licenciements visant tout d’abord les salariés. Ceux qui ont été mis au chômage partiel risquent en effet de se montrer trop chers dans la période post-confinement. Les cabinets externaliseront certaines fonctions pour faire des économies.

Bouée de secours

Pour certains, ces mesures d’urgence prises par les cabinets eux-mêmes devraient suffire. « Ce sont les associés qui assurent la trésorerie du cabinet, pas les banques », se félicite José Desfilis. Avant de poursuivre : « Mes prédécesseurs m’ont averti en me disant qu’il y avait une chose plus importante que nous, c’est le cabinet. Lorsque j’ai débuté, j’étais à découvert sur mon compte bancaire personnel pour être créditeur sur le compte du cabinet. Cette philosophie paie aujourd’hui. » L’associé confie même pouvoir tenir toute l’année sans nouvelles rentrées d’argent. Quant aux autres, ils évaluent les risques de mois en mois, et adoptent des mesures selon les lignes de comptabilité entrantes et sortantes. En somme, une bonne santé financière garantit une sortie de crise heureuse, même pour les cabinets dont l’activité est freinée. Par exemple, les boutiques spécialistes du contentieux sont directement touchées par la fermeture des tribunaux. Il s’avère en réalité que si elles sont nombreuses à en souffrir, elles peuvent quand même se concentrer sur les dossiers de pré-contentieux, de médiation ou encore d’arbitrage qui, eux, suivent leur cours. Elles pourront également recouvrer leur santé après le confinement, lorsque les litiges commerciaux vont se multiplier. Pour ce qui est des professionnels des deals financiers qui travaillent aux côtés des investisseurs, ils ont vu la plupart de leurs dossiers stoppés alors qu’ils étaient à peine commencés lors du passage en stade 3 de la lutte contre la propagation du virus. Le private equity en souffre beaucoup. Les négociations qui étaient bien avancées ont quant à elles été parfois suspendues et n’attendent que la reprise pour aboutir. Quant aux cabinets équipés d’outils digitaux de négociation et de signature à distance, ils ont pu réaliser des levées de fonds, des acquisitions ou des projets d’investissement durant la période de confinement. Le recours à un équipement sécurisé de closing apparaît alors comme un investissement plus que rentable, une bouée de secours.

Pascale D'Amore

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