Directrice générale de Sedgwick France, Carol Etchebarne présente les grandes tendances du métier d’expert d’assurance et de ses engagements en matière de RSE. Elle nous partage également son regard sur l’urgence climatique.

Décideurs. Comment s’est passée l’année 2021 ?

Carol Etchebarne. Sedgwick France rentre dans la dernière année de son plan stratégique actuel. Si nous avons déjà traité de nombreux points, certains objectifs restent à atteindre avant de pouvoir définir un nouveau projet l’année prochaine. Basé sur trois piliers que sont la croissance, la modernisation et la rentabilité, notre plan stratégique 2019-2022 s’est finalement déroulé dans un contexte très particulier, marqué par la pandémie de Covid-19. Il s’agissait pour nous d’apurer le passif et de nous consolider pour mieux rebondir après quelques années difficiles. C’est pour l’instant une réussite, puisque nous sommes en phase avec nos prévisions pour concrétiser ces ambitions.

2021 a été une très bonne année pour nous, dans un contexte social et humain compliqué. Les équipes se sont fortement impliquées et ont surperformé, ce qui nous permet d’enregistrer une croissance de 17 % de notre chiffre d’affaires. Je suis fière du travail accompli par tous les collaborateurs du groupe. Nous notons par ailleurs un effet toujours très positif des activités de coordination de programmes. Sedgwick a une implantation internationale très importante. Avec la crise sanitaire, nous nous déplaçons beaucoup moins qu’auparavant, et seulement pour les sinistres majeurs. Notre organisation coordonnée à l’international nous permet de rester efficaces.

Sedgwick a reçu la médaille d’argent EcoVadis 2021. Quels sont vos engagements en matière de RSE ?

Chez Sedgwick, nous avons une vision du RSE très intégrée à nos domaines d’activité stratégiques (gestion des risques, des sinistres et des dommages). Sous l’impulsion de Cyrille Buisson, global project manager, nous sommes devenus adhérents au Global Compact des Nations unies. Sur les 17 objectifs de développement durable adoptés en 2015 à l’ONU, nous en avons sélectionné 4 sur lesquels nous nous investissons davantage.

"Nous sommes fiers du chemin parcouru, mais aussi conscients qu’il ne s’agit que d’une étape"

Le premier concerne les villes et les communautés durables. En France, de nombreuses villes sont en train de mourir. Il est donc important de poursuivre l’expansion de notre maillage territorial, pour que nos experts soient toujours plus proches des populations locales et des sinistres, et aient moins de kilomètres à parcourir. Ils pourront ainsi participer à l’économie d’une localité. Notre deuxième mesure vise la lutte contre les changements climatiques. Nous avons mis en place un plan d’action plus volontariste en 2022, impulsé notamment par les diverses propositions gouvernementales. Notre troisième objectif recouvre le travail décent et la croissance économique, qui sont des valeurs importantes chez Sedgwick. Notre accord sur le télétravail a été négocié et approuvé conjointement par la direction et l’ensemble des organisations syndicales représentatives dans notre entreprise. Nous attachons une importance au bien-être de nos collaborateurs, à leur temps de trajet pour venir sur leur lieu de travail, ou encore à leur temps disponible pour profiter de leur famille. Enfin, nous sommes investis en matière de respect de la parité. Notre indice d’égalité des sexes a progressé de 12 points entre 2020 et 2021, ce qui est important dans notre secteur d’activité.

Prendre en compte la RSE a de nombreux impacts positifs sur notre entreprise et notre adhésion au Global Compact n’est pas une contrainte, mais un encouragement : nous avançons à notre rythme. Nous avons en parallèle été évalués par EcoVadis. Avec le niveau Silver, nous faisons partie des 30 % d’entreprises les plus performantes en matière de responsabilité sociale et environnementale ! Nous sommes fiers du chemin parcouru, mais aussi conscients qu’il ne s’agit que d’une étape : d’autres améliorations viendront.

Sedgwick a déjà un maillage territorial important. Comptez-vous cependant ouvrir de nouveaux bureaux en France ?

Notre présence sur le territoire national est au coeur de notre stratégie, un des piliers de la croissance durable et du travail décent. Cela fait plus de deux ans que nous vivons au rythme des confinements, mais nos experts continuent de parcourir la France pour se rendre sur des lieux de sinistres. Certains d’entre eux peuvent effectuer plus de 200 kilomètres depuis leur bureau, ce qui les coupe de leur ancrage territorial. Nous souhaitons maintenir l’activité des villes de taille moyenne, pour être plus proches des sinistres, des agents, des courtiers…, et pour mieux répartir la charge de travail des experts.

Nous cherchons constamment à proposer à nos collaborateurs des espaces de bureau adaptés aux règles du télétravail, qui soient des lieux d’échange et de partage, de réflexion commune. Nous avons ainsi déménagé nos bureaux de Nanterre, Lyon et Marseille, dans des locaux plus proches des transports en commun, plus conviviaux et aux nouvelles normes énergétiques, quand cela est possible. Nous comptons ouvrir des bureaux supplémentaires à Beauvais, Caen, Orléans et Monaco, après avoir récemment lancé l’activité à Saint-Étienne, à Gap et en Guadeloupe.

L’un des grands sujets actuels concerne le climat, au regard des événements de grande ampleur qui ont eu lieu l’année dernière ainsi que le rapport du Giec. En temps qu’experts d’assurance, quel regard portez-vous sur l’urgence climatique ?

Nous sommes ici sur du long terme. On recensait auparavant une grande catastrophe naturelle toutes les décennies. Maintenant, c’est presque tous les ans : on passe d’un événement de grande ampleur à un autre, avec des intensités et des volumes complètement différents. Par exemple, lors du passage de la tempête Alex sur la France à l’automne 2020, nous avons dû mobiliser des moyens logistiques inédits, et des compétences techniques de très haut vol. D’autres configurations telles que la catastrophe naturelle Eunice du 18 février dernier génèrent en trois jours dans la région Nord autant de sinistres qu’en trois mois ! Il faut savoir jouer sur tous ces registres pour faire face à ces différents types d’urgence.

L’assurance, c’est prévoir, prendre les données des sinistres précédents pour mieux préparer l’avenir. Mais entre la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine et le dérèglement climatique, anticiper ne suffit plus ! La notion de mémoire d’homme est chahutée, ces événements cassent nos façons de penser, car même si on s’y prépare, on ne les imagine jamais assez. Ainsi, l’expert joue un rôle très important et concret dans la chaîne de gestion. Il accompagne les sinistrés et les assureurs en chiffrant les sinistres et en les mettant en relation avec des réparateurs. Il contribue à l’équilibre économique mais aussi à la bonne application du principe indemnitaire.

Les politiques qui s’appuient sur le rapport du Giec planifient une décarbonation à l’horizon 2050. Mais en trente ans, beaucoup de catastrophes naturelles peuvent survenir. L’idée est donc de contribuer à adapter les bâtiments au climat futur, dès à présent. On sensibilise notamment nos experts sur ce sujet, en partageant les bonnes pratiques. Même si ce sont des transformations sociétales de long terme, il faut les prendre en compte le plus rapidement possible : nous devons pouvoir repenser la façon dont on construit et reconstruit.

Quelles sont les autres grandes tendances de votre métier ?

Les acteurs de la chaîne de l’assurance ont tendance à se spécialiser sur une partie de celle-ci, et ne cherchent plus à se positionner sur l’ensemble des activités. Dans leur modèle économique, rares sont ceux qui font le choix de rester présents de la prospection commerciale au règlement des sinistres. A contrario, nombre d’assureurs décident de déléguer une partie des activités, et notamment la gestion des sinistres. Ce choix se comprend aisément si on prend en compte la volatilité que génèrent par exemple les catastrophes naturelles. Leur traitement nécessite, comme je l’ai exposé plus tôt, de concentrer des ressources importantes, dans un délai très réduit, pour faire face à une intensité exceptionnelle ou à un nombre de dossiers hors norme. En externalisant la gestion de sinistres, les assureurs reportent sur leurs partenaires les risques RH qui lui sont associés, tout en dégageant des marges financières pour investir sur d’autres maillons de la chaîne de valeur, le commercial ou l’actuariat par exemple.

"Prendre en compte la RSE a de nombreux impacts positifs sur notre entreprise"

Ce mouvement global explique le recours croissant par tous types de mandants, assureurs, grands comptes voire courtiers, et même programmes sous franchise, à nos services de gestion pour compte de tiers. Sedgwick France se développe sur ce segment grâce à son approche de gestion sur mesure, portée par une équipe de 45 personnes organisées par pôle métier. En 2021, nous avons ouvert une prestation de gestion de flotte auto dont la vocation sera de se renforcer, notamment en corrélation avec nos programmes internationaux. Ainsi, la spécialisation croissante du marché de l’assurance renforce l’ADN de Sedgwick. Ces évolutions justifient les investissements constants réalisés par notre groupe pour attirer, former et retenir les meilleurs talents, tout en développant des solutions techniques innovantes pour fluidifier le partage d’informations et le pilotage des programmes.

La pandémie de Covid-19 a mis en lumière de nombreux risques, tels que les incidents cyber ou les évolutions législatives, mais surtout les risques de supply chain. Quelle est votre approche ?

Le Covid continue de peser sur l’économie mondiale. C’est l’effet papillon : on constate la pénurie de certains matériaux notamment, essentiels à la réparation de bâtiments. Nous manquons de cuivre, de bois, d’acier… Sous la pression de la demande, les prix augmentent fortement. De plus, la Chine, poumon industriel du monde, est régulièrement reconfinée, tel que c’est le cas à Shanghai, ce qui stoppe la production et donc les approvisionnements pour la France. La pandémie a ainsi entraîné de nombreuses conséquences sur la supply chain. On ne l’a pas remarqué au début de la crise, car une majorité d’entreprises ont réussi à bien gérer le manque, via la gestion de leurs stocks. Mais de nombreux marchés, de l’électronique au bâtiment, sont touchés par ces pénuries.

Et ce n’est pas la guerre en Ukraine qui conduira vers un retour à une situation normale : des routes sont en train d’être recalculées par exemple, afin de contourner les zones de conflits. Mais la guerre en Ukraine finira bien un jour. Certains experts du bâtiment en France sont persuadés qu’il y aura des flux financiers importants pour reconstruire ce pays. De nombreux ouvriers seront alors susceptibles de retourner à l’est de l’Europe pour participer à cet effort, et se rapprocher de leurs familles. On pourrait assister à une pénurie de main d’oeuvre qualifiée en France dans les années à venir, en plus des matières premières…

Que faire donc dans cette situation ? La mitigation des risques. Les grandes entreprises sont capables d’acheter en masse et de stocker, ce qui est plus compliqué pour les petites sociétés. Nous adapterons donc nos solutions en fonction des stocks et aiderons les plus petits financièrement avec une avance de trésorerie. C’est notamment là que la gestion d’acompte en assurance prend tout son sens.

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