Décideurs. Quels ingrédients du leadership ne sont pas assez mis en lumière selon vous ?

Béatrice Delmas-Linel. Être un leader demande avant tout d’être courageux. Il faut avoir le courage d’imposer ses convictions, de croire en soi-même et de connaître ses points faibles, de reconnaître qu’on a la vision, mais pas toutes les étapes du chemin. C’est essentiel pour travailler en équipe sur des dossiers et avec des clients. Avec les autres, un leader doit cultiver l’honnêteté. Être franc et ne pas entretenir de fausses promesses est impératif pour que les autres aient confiance et décident de vous suivre. Mais pour être honnête, il faut être courageux ! Avec lui-même, un leader sait trouver le courage d’écouter ses intuitions. Dans notre système français cartésien  où c’est l’excellence qui prime, l’intuition n’est pas valorisée. Pourtant, un professionnel découvre chaque jour des situations nouvelles auxquelles il doit s’adapter et sa réflexion doit principalement s’appuyer sur trois critères : son expertise, son expérience et son intuition. Celle-ci se rattache à tout son vécu, à l’empreinte très personnelle de chaque personne. Autre point fondamental, l’intuition est modelée par le rapport au risque, à la créativité : il ne faut donc pas en avoir peur. L’intuition peut être source de motricité ou de prudence.

 

Décideurs. Comment enseigner ce lien à soi, à son intuition ?

B. D.-L. L’enseignement des best practices dans les grandes universités ou écoles est une forme de négation de la personnalité, de négation du cas concret. Il faudrait que l’éducation abstraite soit plus respectueuse et plus compatible avec les démarches individuelles, fondées sur l’intuition et le pragmatisme des situations. Quand j’enseigne ou quand je coache, cela commence par : « Oubliez l’entourage, les enseignants, les médias : quelles sont vos sources de motivations personnelles, d’énergie ? Avez-vous passé du temps avec vous-même ? Pour vous comprendre, vos forces et faiblesses ? » Le système français va contre le fait de montrer ses faiblesses, pourtant on en a tous. Ce qui est important, c’est de les connaître, les circonscrire, et de développer tout le reste. On peut se changer, souvent à la marge, sur ses défauts. Mais l’énergie peut être souvent mieux utilisée sur ses points forts. Les jeunes sont parfois dans une posture d’échec avant même d’avoir commencé. Il y a plein de chemins. Suivez vos inclinations ! N’écoutez pas ceux qui vous disent qu’une voie est bouchée si vous avez une passion.

 

Décideurs. Comment un leader peut-il gérer le doute ?

B. D.-L. Il faut avoir – encore une fois – le courage de reconnaître que l’on a des doutes et de les partager avec son équipe. Savoir s’interroger est aussi important que d’avoir des convictions au cours des processus de décisions. Lors de la construction de l’antenne parisienne d’Osborne Clarke en juillet dernier, je n’ai jamais caché mes doutes. Douter n’est pas un aveu de faiblesse : exprimer mes interrogations a même favorisé l’adhésion entre les membres du cabinet car mes associés ont pu prendre part aux discussions stratégiques et apporter leur expérience. S’ouvrir aux autres permet alors d’entrer en écoute et en interaction.

 

Décideurs. Comment l’écoute joue-t-elle dans la capacité que vous avez à emmener vos équipes ?

B. D.-L. Il ne faut jamais confondre leadership et dictature. Un leader n’existe pas sans un « follower » qui est sa courroie de transmission d’énergie. Il est donc fondamental de ne pas censurer et de reconnaître que chacun a de bonnes idées. Un véritable respect de l’écoute de l’autre doit s’instaurer entre les deux. Attention, le leader n’est pas pour autant un porte-parole : il délivre sa propre vision. S’il est convaincant et entraîne ses équipes, alors c’est un véritable leader.

 

Décideurs. Par quels moyens transformer une ambition individuelle en cause collective ?

B. D.-L. Une ambition individuelle ne peut pas mener seule au leadership : pour réussir, un leader doit savoir rassembler. Il existe, bien sûr, des leaders « naturels » mais dans une organisation politique, sociale ou commerciale, c’est souvent la fonction qui impose à un individu la posture du leader. Il doit alors être capable de recréer ce message sincère d’adhésion sans tomber dans l’artificiel, trouver les thèmes rassembleurs. Mais un leader n’est pas un gourou. Les « suiveurs » restent à chaque instant libre, de leur choix et leur adhésion n’est jamais acquise. Le leader qui dure est plus soucieux de ses convictions et de leur mise en oeuvre que du nombre de ses « suiveurs ».

 

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