Décideurs. Quels ingrédients nécessaires au leadership ne sont, selon vous, pas assez mis en lumière?

Alain Dinin. Il y a selon moi un ingrédient dont on parle assez peu : l’empathie, au sens de la capacité à comprendre les besoins de l’autre pour en faire l’une de ses propres nécessités. II ne s’agit pas d’être sympathique ou plus humain mais de posséder une sorte de compréhension de ce dont l’autre a besoin. Le charisme, je ne sais pas ce que cela veut dire. Si je suis charismatique, c’est parce que mes collaborateurs me voient de cette façon. Un patron d’entreprise n’existe que par le regard des autres. Combien d’individus réputés charismatiques le seraient en dehors du «costume » qui leur a été confié ?

 

Décideurs. Sur quelles valeurs s’appuie votre leadership ?

A. D. Mes valeurs reposent sur le respect des autres et sur la diversité des modes de pensée. Je ne m’estime pas meilleur ni différent de mes collaborateurs. Je me vois comme un chef d’orchestre ayant à conduire une équipe composée des meilleurs professionnels de leur secteur. C’est d’ailleurs eux qui au premier chef me donnent une légitimité. C’est par eux que je suis devenu dirigeant d’entreprise.

 

Décideurs. Au quotidien, les décisions que vous prenez sont-elles systématiquement guidées par vos valeurs?

A. D. Au quotidien, les décisions que je suis amené à prendre sont inscrites sur le fondement de « l’utilité». Sommes-nous utiles, chez Nexity, à nos clients? La décision à prendre sera-t-elle utile à notre société? C’est évidemment plus simple lorsque comme nous nous construisons des logements ou des bureaux, ou que l’on gère des copropriétés, mais c’est fondamental pour tous les collaborateurs. Par ailleurs, le dirigeant d’entreprise à un rôle d’arbitre et des choix à faire. L’entreprise n’est pas une démocratie. Il faut cependant favoriser en équipe la capacité d’expression et la prise de risque.

 

 Décideurs. Il y a quelques années, vous avez offert à vos salariés L’Art de la guerre de Sun Tzu. Pour quelles raisons avez-vous souhaité sensibiliser vos collaborateurs à ces préceptes?

A. D. Une des citations du livre dit que si on ne se fixe pas d’objectifs, on ne peut pas les atteindre. Pour moi, le leadership correspond à une façon de savoir se projeter à quatre ou cinq ans. Il est dans l’innovation, dans « l’interpreneuriat ». Pour avoir la liberté de notre stratégie, il faut que nous puissions la déterminer en avance. J’amène les dirigeants vers plus de résultats, plus de produits, plus de responsabilités. Au sein de Nexity, j’ai demandé d’oublier le mot crise. Nous avons deux années d’avance sur notre chiffre d’affaires et sommes aujourd’hui en train de travailler sur l’exercice 2016. L’important, c’est de se projeter en permanence. Le succès est dans l’attaque et ce qui m’intéresse, pour construire le futur, ce sont les raisons de l’échec plutôt que celles du succès.

 

Décideurs. Un leader doit fonder sa relation aux autres sur la confiance et encourager leur adhésion. Comment alors éviter l’écueil de la soumission?

A. D. C’est un vrai sujet. Le besoin de plaire, le pouvoir réel ou supposé sur la vie professionnelle des uns et des autres peuvent amener certains à ne pas oser exprimer leurs désaccords, d’autres à vous transformer en « statue du commandeur ». Il faut être vigilant, un dirigeant qui aurait trop souvent raison serait dans le danger de la pensée unique. Ce sujet nécessite selon moi une grande lucidité sur ce que l’on est et ne jamais oublier d’où l’on vient.

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