Du point vue des entrepreneurs, accomplir une formalité s’avère à la fois obligatoire et fastidieux. Pour remédier à cet inconvénient se développent sur le marché des agences de formalités qui aident les entreprises à gagner du temps et à se concentrer sur leur activité principale.

Si la profession de formaliste est peu connue du grand public, ses services sont pourtant essentiels aux acteurs économiques. Le formaliste accompagne en effet les entreprises de leur création jusqu’à leur transmission en effectuant à leur place et auprès des organismes idoines (greffes des tribunaux de commerce, recettes des impôts…) toutes leurs tâches administratives obligatoires, lesquelles sont chronophages et nécessitent à la fois une réelle maîtrise technique du droit des sociétés et une longue pratique des greffes.

Le profil du formaliste

Il n’existe a priori pas de formation spécifique pour devenir formaliste. Le métier requiert néanmoins une formation juridique couplée à une longue pratique au sein d’organismes tels que le centre de formalités des entreprises (CFE), ou les greffes des tribunaux de commerce, ou encore au sein de directions juridiques, de cabinets d’expertise comptable ou de cabinets d’avocats. Cette activité s’est réellement développée au lendemain de la publication de la loi du 24 juillet 1966 et du décret du 23 mars 1967 relatifs aux sociétés commerciales, et a d’abord été assurée par des conseils juridiques.

Le cœur du métier

Les formalistes interviennent dans toutes les étapes de la vie d’une société, de sa création jusqu’à sa radiation le cas échéant, en passant par la modification de ses activités. Ils s’assurent que les dossiers soient complets, vérifient le contenu des pièces administratives et assurent éventuellement leur enregistrement auprès des administrations concernées. Afin de présenter une palette de services complète aux entrepreneurs, certaines agences proposent également de prendre en charge des démarches complémentaires telles que la domiciliation ou la publicité des sociétés. Médialex, le leader français de la publication d’annonces légales a d’ailleurs voulu conforter sa place sur ce marché en rachetant la division consacrée aux annonces et formalités légales (AFL) du groupe néerlandais Wolter Kluwer au 1er janvier 2021. Créée en 1990, la filiale du groupe Précom, lui-même filiale du groupe Sipa-OuestFrance, avait commencé par gérer la publication des annonces légales de nombreux titres et radios appartenant à Précom, et présents dans la région rennaise avant d’étendre ses services sur l’ensemble du territoire national. "La branche AFL et nos métiers étaient complémentaires. Nous souhaitions ainsi nous rapprocher de ce fonds de commerce pour asseoir nos positions dans ce marché de niche", explique Olivier Colin, directeur général de Médialex, qui s’engage à former les 34 personnes dont 18 formalistes de la division AFL à leurs méthodes de travail, lesquelles reposent essentiellement sur des outils numériques, afin de garantir un traitement rapide et efficace des dossiers. Un traitement qui est cependant étroitement lié à celui des organismes habilités à délivrer des pièces à valeur légale.

Les formalités restent difficilement automatisables malgré les récentes avancées technologiques.

Une digitalisation forcée 

Alors que la publication des annonces légales était l’apanage de la presse papier conformément aux dispositions de la loi du 4 janvier 1955, elle a fait l’objet d’un changement de réglementation depuis la loi Pacte du 22 mai 2019, notamment son article 3, les services de presse en ligne ayant reçu l’habilitation à publier eux aussi des annonces légales, ce qui a permis de simplifier les démarches des entreprises. Les entrepreneurs ne sont pas les seuls bénéficiaires de cette disposition puisque les agences de formalité peuvent également en tirer profit. À titre d’exemple, à la fin de l’année 2020, Médialex a réalisé plus de 80 % de son chiffre d’affaires grâce à sa plateforme en ligne qui peut assurer une publication dans la presse écrite et la presse en ligne. 

Si de nombreux acteurs promettent un "bouton magique", les formalités restent difficilement automatisables malgré les récentes avancées technologiques. "En réalité, il n’existe pas. Et à ce jour, l’analyse et le traitement des dossiers nécessitent encore des experts sans même évoquer les interprétations de la loi ", nous confie Dusan Jacimovic, directeur chez Médialex. Il reste toutefois lucide : "Dans un contexte général de dématérialisation, il nous a semblé naturel de mettre à la disposition de nos clients des outils digitaux pour sécuriser, fluidifier les échanges et gagner en réactivité." Médialex ayant digitalisé son activité de publication d’annonces légales, il faut s’attendre à ce que la société fasse de même pour son activité de formalités juridiques. 

L’état du marché

Dans les années 1980, avec la mise en place des centres de formalités des entreprises et l’augmentation du nombre de créations d’entreprises, de nouveaux acteurs sont apparus, donnant ainsi naissance aux cabinets de formalités. Aux acteurs historiques tels que le groupe Lextenso, le Journal Spécial des Sociétés ou les Affiches Parisiennes s’ajoutent de nouveaux arrivants nés du développement de la legaltech en France parmi lesquels LegalVision pro ou LegalPlace. Néanmoins, ces acteurs issus de la nouvelle génération sont peu présents sur les segments BtotB, car leurs activités visaient à l’origine essentiellement les TPE et PME.

De son côté, avec le rachat de la division AFL de Wolter Kluwer, Médialex compte bien s’imposer sur le marché qui fut longtemps la chasse gardée de quelques acteurs importants. "Nous ambitionnons de devenir le numéro un d’ici deux à trois ans en formalités juridiques comme nous le sommes pour les annonces légales et d’être encore plus incontournables que nous le sommes aujourd’hui", déclare son dirigeant Olivier Colin.  

L'institut national de la propriété industrielle (Inpi) a été désigné comme organisme le seul gestionnaire du guichet électronique unique. 

Un développement bienvenu, les entreprises devant encore et toujours effectuer des démarches juridiques. Par exemple, le dépôt d’un registre des bénéficiaires effectifs auprès du greffe du tribunal de commerce, une formalité obligatoire imposée par la loi Sapin II du 9 décembre 2016 à toutes les sociétés, existantes ou en cours de création. Dans ce panorama, les agences de formalités constituent pour les entreprises un levier de productivité non négligeable.

L’avenir de la profession

Difficile de parler d’avenir sans évoquer la directive européenne "Service" du 12 décembre 2006 et subséquemment la loi Pacte du 22 mai 2019 qui s’inscrit dans la logique de cette directive. En effet, les États membres sont tenus d’examiner et, le cas échéant, de simplifier les procédures et formalités applicables pour accéder à une activité de services et l’exercer. D’où la création d’un guichet électronique unique qui aura vocation à centraliser toutes les démarches des porteurs de projets et faciliter l’accès à l’information relative aux sociétés. Et c’est l’institut national de la propriété industrielle (Inpi) qui, par le décret du 30 juillet 2020, a été désigné comme organisme unique gestionnaire du guichet électronique unique. Il gérera à la place de l’État deux services informatiques. Le premier permet aux entrepreneurs d’effectuer, par voie électronique, pour toutes les procédures et formalités nécessaires à la création de leurs sociétés, la modification et la cessation d’activité, ainsi que les formalités d’accès à une profession réglementée. Le second permet aux ressortissants de l’Union européenne et aux États membres de l’Espace économique européen d’accomplir, par voie électronique toujours, la procédure de reconnaissance de la qualification professionnelle pour l’exercice d’une profession réglementée en France. 

Les formalistes craignent l’impact difficilement quantifiable mais dans tous les cas préjudiciable de la création de ce guichet unique, accessible courant 2022 selon l’Inpi, mais dont les modalités de mise en œuvre n’ont toujours pas été précisées. "Une disposition qui complique et assombrit l’avenir des agences de formalités quand bien même les besoins en la matière demeurent persistants pour les entreprises", résume Myriam de Montis, présidente du Journal spécial des sociétés. 

Yannick Tayoro & Jessie Razafindrabe

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