Instance d’échanges, de concertation et d’études réunissant plus de 150 membres issus des différents métiers de la fabrique de la ville, l’Observatoire régional de l’immobilier d’entreprise va se pencher dans ses prochains travaux sur l’impact de la crise sanitaire pour le secteur. Antoine Derville, son président, livre à Décideurs ses premières observations.

Décideurs. Quels premiers enseignements tirez-vous de la crise sanitaire et du confinement ?

Antoine Derville. Les tendances qui structurent la fabrique de la ville s’inscrivent dans un temps long. Les inflexions nées de la crise sanitaire actuelle ne se matérialiseront donc pas immédiatement et nous devons le garder à l’esprit avant de tirer des conclusions hâtives. Il est néanmoins évident que le télétravail forcé amènera des changements profonds. Nous avons réussi à rester efficaces depuis le début du confinement grâce aux nouvelles technologies. Mais travailler de chez soi non-stop pendant huit semaines aura également été insupportable car nous avons tous besoin de lien social. La crise sanitaire va relancer la recherche de l’adéquation entre lieux de travail et de résidence.

Concernant le logement justement, un certain nombre de particuliers ont exprimé la volonté de s’installer dans des maisons avec des jardins au calme. Il est trop tôt pour savoir si ce sera un mouvement de fond mais cet état d’esprit conduira à une modification du rapport à la ville et aux bâtiments. Les promoteurs avaient déjà commencé à faire évoluer la conception des logements et cette tendance va s’accélérer après la crise sanitaire. Ce besoin d’espaces supplémentaires devra toutefois s’accompagner d’une réduction des coûts afin de rendre les nouveaux appartements et maisons accessibles au plus grand nombre tout en garantissant la viabilité de l’équation économique.

Concernant la vie professionnelle, la plupart des grandes entreprises ont ratifié des accords qui incluent en moyenne une journée de télétravail par semaine. Nous allons rapidement changer d’échelle à ce niveau. Mais les incidences immobilières se matérialiseront plus tard car les sociétés se laisseront le temps de la réflexion avant de prendre une décision. De plus, elles ont des engagements contractuels à respecter à travers les baux commerciaux. A l’échelle de la ville, beaucoup d’observateurs s’interrogent sur la fin de la métropolisation. Il est néanmoins trop tôt pour mesurer l’incidence de la crise sanitaire sur ce phénomène.

Quel regard portez-vous sur l’action du gouvernement ?

Il a pris de bonnes mesures économiques pour faire face à la crise. Le plan de CDC Habitat visant à construire 40 000 logements apporte par exemple une aide salutaire aux promoteurs et aux développeurs. Le gouvernement va désormais devoir se projeter dans l’avenir. La relance économique passera par le bâtiment et les grands travaux. L’ORIE rassemblant les forces vives du public et du privé, nous serons probablement amenés à contribuer à la réflexion.

Dans quelle mesure cette crise sanitaire pourrait-elle faire évoluer à moyen terme les grands principes de fonctionnement du secteur de la fabrique de la ville selon vous ?

Outre les modifications dans la conception des logements et des bureaux, la crise sanitaire pourrait aussi avoir un impact géographique. Des villes moyennes où il sera plus facile de se déplacer émergeront peut-être. La grande question de la verticalité va également se reposer. Les prochaines études de l’ORIE permettront de mesurer progressivement les conséquences de la crise sanitaires sur la fabrique de la ville. Celle qui sera publiée d’ici la fin de l’année portera sur l’innovation dans l’immobilier, sujet qui prendra nécessairement en compte l’impact du Covid-19 et du confinement.

Propos recueillis par François Perrigault (@fperrigault)

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