Le géant de Mountain View fait l’objet d’une communication des griefs de la Commission européenne pour abus de position dominante.
Google n’a toujours pas répondu à la communication des griefs que la Commission européenne lui a adressée le 15 avril. L’autorité européenne reproche à la société américaine de violer les règles de la concurrence en Europe en abusant de sa position dominante sur le marché des services de recherches générales sur Internet. Saisie d’une trentaine de plaignants, parmi lesquels Microsoft, la Commission européenne, après cinq ans d’enquête, retient un seul des nombreux griefs présentés : la promotion systématique par Google de son comparateur de prix dans ses pages de résultats de recherches générales. Selon la Commission, ce comportement porte atteinte aux consommateurs, à l’innovation et au développement des services concurrents. Pour Alexandre Lacresse, avocat chez Fidal, « avec cette communication des griefs, on atteint un degré supérieur de pression. Il s’agit d’un changement radical dans la politique de la Commission à l’égard de Google qui tient pour partie à la personnalité de la nouvelle commissaire à la concurrence. »

Fin des négociations
La Danoise Margrethe Vestager, nommée commissaire européen en novembre dernier, a effectivement décidé d’abandonner la stratégie de négociation adoptée par son prédécesseur, Joaquín Almunia. « Et la Commission a retenu un unique grief car elle est assurée de sa solidité juridique et parce qu’elle est prête à aller au bout de sa procédure », poursuit l’avocat.
La firme de Mountain View a dix semaines pour répondre aux critiques de la Commission européenne. Si elle s’oppose au grief qui lui est reproché, une procédure contentieuse serai alors enclenchée. La Commission peut prononcer des sanctions pécuniaires allant jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires mondial, soit près de six milliards pour Google, mais surtout des mesures « correctives ». La multinationale serait alors contrainte, sous menace d’astreinte, de modifier son modèle économique afin de satisfaire les règles d’une « saine concurrence » sur le marché européen. Et si elle refuse de payer une éventuelle amende, « le seul moyen efficace dont dispose la Commission européenne est l’astreinte. En cas de non-exécution, elle permet d’alourdir la sanction », souligne Alexandre Lacresse.
Un cas d’espèce déjà rencontré dans le dossier Microsoft. L’entreprise, sanctionnée par la Commission d’une amende de 500 millions d’euros pour violation de la loi antitrust en 2004, avait tardé à s’exécuter. Résultat, la Cour de justice des Communautés européennes avait prononcé en 2008 une nouvelle amende de 860 millions d’euros. Google est donc incité à reconnaître le grief et à opter pour la procédure d’engagement négocié. La firme avait déjà choisi cette voie lors des poursuites pour abus de position dominante en matière de recherche en ligne et des annonces publicitaires liées. Cette procédure a abouti en février 2014 à une proposition d’engagements de Google dans une version améliorée après le rejet par la Commission des deux premières propositions. « La procédure d’engagement a un effet immédiat qui permet de rétablir rapidement la concurrence sur le marché et d’éviter à la Commission une procédure contre sa décision devant le Tribunal de l’Union européenne », explique Alexandre Lacresse.

Suite
Google, qui fait l’objet de poursuites croissantes en France et en Europe, reste sous le feu de la Commission européenne qui a aussi ouvert une procédure formelle d’examen pour l’exploitation de son système Android. L’utilisation par la plupart des fabricants de smartphones et de tablettes de ce système leur impose de conclure des accords avec Google pour pouvoir installer ses applications. La Commission s’interroge sur une potentielle violation des règles de la concurrence par le géant américain qui, par son comportement, entraverait l’action de ses concurrents sur le marché des systèmes d’exploitation, d’applications et de services. Consommateurs et développeurs de services et produits innovants en subiraient un préjudice.
Le jour suivant cette communication, Microsoft annonçait son association avec Cyanogen, start-up développant un système modifié d’Android, Cyanogen OS. Par ce partenariat stratégique, Microsoft espère concurrencer Google en proposant ses propres applications sur ce système d’exploitation.

Marianne Briand

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